Cet article date de plus de deux ans.

A la tête du Commonwealth, Elizabeth II a été le témoin des bouleversements politiques au sein de plusieurs Etats africains

Sous son règne, les royaumes se sont transformés en Républiques et les colonies en Etats indépendants. 

Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
De gauche à droite, au premier rang, le Premier ministre de Singapour Goh Chok Tong, le président sud-africain Thabo Mbeki, la reine Elizabeth II de Grande-Bretagne, le secrétaire général du Commonwealth Emeka Anyaoku et le duc d'Edimbourg assistent à la cérémonie d'ouverture du sommet du Commonwealth à l'International conference center à Durban, en Afrique du Sud, le 12 novembre 1999. (YOAV LEMMER / AFP)

La reine Elizabeth II, dont le décès est survenu le 8 septembre 2022 à l'âge de 96 ans, s'est retrouvée à la tête de différents pays africains qui sont devenus indépendants durant ses sept décennies de règne, le plus long d'un souverain britannique. A savoir les membres du "Commonwealth of Nations" qui réunit le Royaume-Uni et la plupart de ses anciennes colonies. L'organisation, qui se définit comme "une association volontaire" d'Etats souverains, compte aujourd'hui 56 membres et l'Afrique y est encore le plus important bloc géographique avec 21 pays.

Le "roc" du Commonwealth 

Dans leurs différents hommages, les présidents du Kenya, du Nigeria ou encore du Ghana − des membres historiques−, ou ceux du Rwanda et du Togo qui ont rejoint l'organisation plus récemment, ont ainsi salué son rôle déterminant au sein du Commonwealth. En tant que cheffe de cette organisation, "elle a supervisé la transformation spectaculaire de l'Union et l'a dirigée pour qu'elle accorde une plus grande attention à nos valeurs communes et à une meilleure gouvernance. Elle était le roc qui a maintenu l'organisation solide et fidèle à ses convictions positives", a souligné dans un tweet Nana Akufo-Addo, le président du Ghana.

"L'histoire du Nigeria moderne ne sera jamais complète sans un chapitre sur la reine Elizabeth II, une personnalité mondiale imposante et un leader exceptionnel. Elle a consacré sa vie à faire de sa nation, du Commonwealth et du monde entier un endroit meilleur", a indiqué pour sa part le président du Nigeria, Muhammadu Buhari.

Pour son homologue rwandais Paul Kagame, qui assure la présidence en exercice de l'organisation depuis juin 2022, "le Commonwealth moderne est son héritage""En ce moment de tristesse à la suite du décès de Sa Majesté la reine Elizabeth II, nous nous rappelons de ses 70 ans d'intendance du 'Commonwealth of Nations' ", écrit le dirigeant rwandais.   

Elizabeth, qui n'est alors qu'une princesse, exprime dès son 21e anniversaire son attachement au Commonwealth dont elle prendra la tête après le décès de son père, le roi George VI, en 1952. "Je déclare devant vous tous que ma vie entière, qu'elle soit longue ou courte, sera consacrée à votre service", promet-elle le 21 avril 1947 lors d'une émission de la BBC où elle s'adresse du Cap à l'empire britannique, durant une tournée en Afrique du Sud (sa première dans le Commonwealth).

Plus tard, en présence de Nelson Mandela − le premier président sud-africain avec qui elle entretenait de chaleureux rapports − la souveraine britannique raconte qu'on lui a demandé si elle avait déjà visité le continent africain. "J'ai été partout dans le Commonwealth en Afrique et dans d'autres pays du continent. Je pense que j'ai vu plus d'Afrique que presque tout le monde", rappelle-t-elle alors dans l'échange diffusé par la BBC. 

(Retour sur la relation de longue date de la reine Elizabeth II avec l'Afrique)

Suspensions et retraits

Mais le Commonwealth est loin d'être une affaire de géographie. Au fil du temps et de l'évolution de leur politique intérieure, les relations des membres africains avec l'organisation sont devenues de plus en plus complexes. Dès les premières heures de l'indépendance, plusieurs pays prendront leurs distances avec l'institution qui incarne l'impérialisme britannique, avant de la rejoindre de nouveau comme Etats indépendants. A l'instar du Ghana de Kwame Nkrumah indépendant en 1957. La reine tiendra une promesse de longue date en rendant visite en 1961 à cet Etat qui a quitté son giron et accordera une mémorable danse à son premier président. 

Membre depuis son indépendance en 1931, l'Afrique du Sud quitte, elle, au bout de 30 ans l'organisation sous le coup des critiques de ses pairs qui pointent sa politique ségrégationniste, l'apartheid. Il faudra attendre 1993, à la veille de ses premières élections démocratiques, pour qu'on lui propose de revenir au sein du "Commonwealth of Nations". Son retour sera effectif en 1994. La situation en Afrique du Sud est l'une des rares qui ait fait sortir la souveraine britannique de sa réserve habituelle. "Au début des années 80, rapporte l'AFP, la reine avait apporté son discret soutien au Premier ministre canadien, Brian Mulroney, qui militait pour des sanctions économiques contre l'Afrique du Sud, alors que son homologue britannique Margaret Thatcher y était opposée"

En 1995, le Nigeria sera suspendu pendant quatre ans après l'exécution de neuf militants écologistes dont l'écrivain Ken Saro-Wiwa. Le Zimbabwe fera aussi l'objet d'une supension en 2002 en raison des violations des droits de l'Homme. "Dans un accès de colère en 2003", peut-on lire sur le site d'information zimbabwéen Times Live, l'ancien président Robert Mugabe retire son pays du Commonwealth. Tout comme la reine d'Angleterre lui retirera son titre de chevalier en 2008 afin de sanctionner la dérive autocratique du dirigeant. Depuis, 2018, Harare souhaite sa réintégration (lien en anglais) dans le Commonwealth à qui l'actuel dirigeant zimbabwéen, Emmerson Mnangagwa, a présenté ses condoléances après l'annonce de la disparition d'Elizabeth II.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.