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Robert Mugabe, le père de l'indépendance du Zimbabwe, poussé vers la sortie

L’introduction en mai d’une nouvelle devise, à parité avec le dollar, soulève une vague de protestation à travers le Zimbabwe. Les manifestations se multiplient et un pasteur a pris la tête du mouvement. Le président Robert Mugabe, le vieux lion de 92 ans, est de plus en plus contesté. Même ses compagnons d’arme de la guerre d’indépendance veulent son départ.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Le président du Zimbabwe, Robert Mugabe, à Harare le 18-4-2012. (Reuters - Stringer)

«Si l’argent manque pour nos projets, nous l’imprimerons», avait scandé en 2008 le président Mugabé rappelle Le Figaro. Avec un tel postulat, l’inflation n’a fait que s’accélérer. Alors, le président a fait imprimer le fameux billet de 100.000 milliards de dollars zimbabwéens. Mais en juin 2015, le gouvernement jetait l’éponge et abandonnait cette devise dont le taux de change atteignait 58.000 milliards pour un dollar américain. Même pas le prix du papier.
 
Depuis, le pays vivait avec trois devises étrangères: dollar, euro, rand. En mai 2016, le gouvernement a introduit le «billet d’obligation». Une monnaie qui n’en est pas vraiment une, indexée sur le dollar américain. Mais ce que certains prédisaient à l’époque, s’est avéré exact. Le peuple se méfie de cette monnaie et réclame surtout du travail.
 
Un billet de 100.000 milliards de dollars, retiré de la circulation en juin 2015. (Desmond Kwande/ AFP)

80 à 90% de la population, autant dire tout le pays, vit de l’économie informelle. «Ce que nous disons est simple : nous avons besoin d’emploi», lance à l’AFP un manifestant lors du rassemblement de Harare le 3 août 2016. Il a 30 ans, et n’a jamais trouvé de boulot depuis sa sortie de l’université.
 
Défiance des vétérans
Et Robert Mugabe, le vieux lion de 92 ans, est de plus en plus contesté. Il dirige le pays d’une main de fer depuis l’indépendance en 1980. Sa politique, notamment de redistribution des terres, a en partie conduit le pays à la ruine. Mugabe doit aussi faire face désormais aux critiques de son propre camp.
 
Les vétérans de la guerre d’indépendance, piliers du régime, dénoncent l’attitude dictatoriale du vieux président. Ils jugent également que le parti de Mugabe avait «lamentablement échoué à résoudre les problèmes économiques du pays.»
En réponse, Mugabe fait le ménage. Deux responsables de l’Association des anciens combattants ont été arrêtés pour avoir critiqué le pouvoir.
 
«#ThisFlag»
Un mot dièse pour un mouvement conduit par un pasteur, Evan Mawarire. «This flag», ce drapeau en  anglais, est celui du Zimbabwe. Mawarire appelle les fidèles à protester contre la corruption, la pauvreté et l’abus de pouvoir de Mugabe. Poursuivi pour incitation à la violence puis tentative de renversement du gouvernement, le pasteur a finalement été relaxé par la justice.


«Je suis en colère contre la misère et le combat quotidien pour la survie», réagit un militant. «Le gouvernement a volé notre argent. Il ignore nos problèmes… C’est un mouvement non violent et il doit le demeurer», a déclaré Mawarire au journal britannique The Guardian.
 
Le mouvement prend lentement de l’ampleur. La manifestation du 3 août 2016 à Harare a été violemment dispersée par la police. Pour l'heure Mugabe tente de museler l'opposition. Mais pour combien de temps?

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