Cet article date de plus de neuf ans.

Retour forcé au pays des Haïtiens de République dominicaine

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 1min
Jusqu’en 2010, conformément au droit du sol en vigueur dans le pays, les descendants d'Haïtiens nés en République dominicaine avaient la nationalité dominicaine. Mais un décret de 2013 a remis en cause cet acquis. Des milliers d’Haïtiens deviennent de facto apatrides.

De plus une nouvelle politique migratoire, taxée par ses détracteurs de xénophobe et de raciste a été mise mise en place par le gouvernement dominicain. Pour régulariser la situation de tous ces nouveaux «sans-papiers», une date butoir non négociable leur a été fixée au 17 juin 2015. Depuis, tous ceux qui n’ont pu le faire sont expulsés manu militari. 

Sur les 450.000 Haïtiens vivant en République dominicaine, 250.000 n’aurait pas pu régulariser à temps leur situation, selon le Mouvement justice migratoire, qui regroupe des organisations de la communauté haïtienne et des syndicats. Ils ont alors été expulsés sans ménagement. Au 1er juillet, 31.225 Haïtiens étaient de retour dans leur pays, d’après les services dominicains.
 
Plusieurs d’entre eux ont trouvé refuge dans l'école communautaire de Fond-Bayard, dans la petite ville de Fond Parisien. Retourner un jour en République dominicaine est inenvisageable pour ces victimes du racisme au quotidien qui ne veulent plus être agressés.
 
Aujourd’hui, ils voudraient pouvoir vivre à Haïti, mais sans que la charité leur soit offerte. D’autant que les maigres dons de la communauté religieuse voisine de l’école et les distributions sporadiques de quelques ONG et des citoyens ne leur suffisent pas pour avoir une vie décente.
 
L’école n’a ni eau ni électricité. Aucun médecin n'est passé depuis deux semaines. Les enfants portent des vêtements sales et trop grands. Les nourrissons dorment à même le sol.
 
La journaliste Amélie Baron et le photographe Hector Retamal racontent…

vivait depuis 10 ans en République dominicaine avant d’être expulsée. Elle a été arrêtée par des officiers de l'immigration dominicaine le 27 juin 2015 alors qu’elle se promenait avec sa fille de 10 mois. Elle a réclamé de pouvoir prévenir ses deux autres enfants et son mari qui se trouvaient à quelques mètres d'elle, avant d’être reconduite à la frontière, mais la police a refusé.
  (AFP/Hector Retamal )
«Ils m'ont dit de retourner dans mon pays: ‘’Vas retrouver le président Michel Martelly, on n'a plus besoin des Haïtiens. Que vous ayez des papiers ou non, retournez chez vous.’’». Des insultes racistes lui ont été proférées durant tout le trajet vers la frontière. «Ils m'ont dit que les Dominicains n'ont pas le même sang et que je devais aller retrouver ceux de mon sang en Haïti.» (AFP/Hector Retamal )
«J'ai été superviseuse dans une usine textile, et aussi caissière en supermarché. Je ne veux pas de l'argent ou de la nourriture mais un travail, pour pouvoir faire venir mes enfants de 5 et 6 ans et mon mari ici, qu'on vive ensemble tranquillement», explique-t-elle. (AFP/Hector Retamal )
était arrivé en République dominicaine à 8 ans. Elle travaillait depuis 1981 à couper la canne à sucre et vivait dans un campement. Elle gagnait peu mais avait réussi à se construire une petite maison.  (AFP/Hector Retamal )
de République Dominicaine le 27 juin et comme Beltha, elle s’est réfugiée dans la petite école de Fond-Bayard. «Tout est resté là-bas, je n'ai plus rien. La femme du pasteur du village ici m'a offert cette robe pour me changer», raconte-t-elle.
    (AFP/Hector Retamal )
un autre pensionnaire, n’a vécu que ses quatre premières années en Haïti. Il est sans nouvelle de sa femme et de ses quatre enfants. Il confirme leurs propos. «Quand ils voient un Haïtien, les Dominicains disent : ‘’Regarde le cochon, Haitiano diablo…’’ On nous traite comme des bêtes. Parfois, quand on s'assoit à côté d'un Dominicain, il s'écarte en faisant comprendre qu'il ne veut pas que notre peau touche la sienne.» (AFP/Hector Retamal )
a publié un rapport le 1er juillet a dénoncé la politique mené par la République dominicaine envers les personnes d’origine haïtienne.             (AFP/Hector Retamal )

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.