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Suicides sous les tropiques: les chiffres alarmants de l'OMS
Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Guyana, petit pays d’Amérique du Sud est affecté du plus grand nombre de suicides par habitant au monde. Politiques et scientifiques s’interrogent sur ce chiffre tandis que l’OMS s’inquiète de la montée du suicide comme problème de santé publique.
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Selon l'OMS, chaque année, environ 800 000 personnes se suicident dans le monde. Parmi elles, en 2012, 277 venaient du Guyana, petit pays néerlandophone situé au nord du Brésil, entre le Suriname et la Guyane française. Une proportion bien faible, mais ramenée à la population totale du pays, le chiffre est accablant. Le taux de suicide standardisé par âges s'élève à 44,2 pour 100 000 personnes par an au Guyana. C'est plus de 4 fois la moyenne mondiale de 11,4 et plus de 7 fois la moyenne des pays comparables en Amérique du Sud.
La «Suicide belt»
Plusieurs explications sont possibles pour expliquer ce cas, ainsi que celui du Suriname voisin, le seul autre pays des Amériques à figurer dans le «top 10» (ou plutôt «bottom 10») du rapport de l'OMS.
La plupart des cas de suicides sont concentrés dans la région rurale de Berbice, le long de la rivière qui forme la frontière avec le Suriname, surnommée la «suicide belt». Elle cumule des conditions de vie difficile, un alcoolisme rampant et très peu d'accès aux services de l'Etat, en matière de santé ou d'aide sociale. De plus, note sombrement Associated Press, la plupart des paysans ont recours à des pesticides très nocifs bannis dans la plupart des pays. Selon des spécialistes, leur utilisation accélère la dégradation de la santé mentale et l'ingestion de ces poisons est devenue la méthode préférée des paysans guyanais.
La revue Medical Daily nuance le problème. En s'appuyant sur les brusques augmentations du nombre de suicide d'années en années, l'auteur défend la thèse d'une «épidémie de suicides». Ces phénomènes semblables dans leur propagation à une épidémie virale, sous la forme d'un important stress mental passant directement de personne à personne, sont bien connus. Aux Etats-Unis, la mort de Marylin Monroe avait été suivie d'une augmentation de 12% du nombre total de suicide sur l'année. Un phénomène tragique que l'auteur colore d'un peu d'optimisme: il est généralement passager.
La santé mentale, un enjeu du XXe siècle
Sur le fond, la situation du Guyana révèle un problème plus profond, la prise en charge de la santé mentale dans les pays en voie de développement. L'OMS estime qu'entre 17% et 24% de la population des Amériques souffre de troubles psychiatriques. Au Guyana, cela se traduirait par un chiffre compris entre 140 000 et 180 000 personnes ayant besoin d'un suivi médical. Le pays compte, aujourd'hui, 5 psychiatres à plein temps et 300 lits dans un unique institut spécialisé.
Depuis 2010, le gouvernement du Guyana s'est déjà attaqué au problème.
Sa politique est fondée sur le modèle des pays ayant déjà réussi à enrayer un taux de suicide important, comme le Japon. Dans les années 90, le pays avait connu une brusque augmentation du nombre de suicides, passant de 24 391 en 1997 à 32 863 en 1998. Une politique publique volontaire, axée sur le dialogue et l'assistance aux survivants, engagée à partir de 2006, a permis au pays de juguler le problème. En 2012, le nombre de suicides est repassé en dessous de 30 000 par an pour la première fois depuis 1998, permettant au pays d'être cité en exemple par l'OMS.
Le Guyana ne dispose ni des finances, ni des infrastructures japonaises. Mais le gouvernement a déjà entrepris d'apprendre aux forces de l'ordre, aux enseignants et même aux prêtres à repérer et assister les cas sensibles. Une hotline a été mise en place et de nouvelles structures médicales sont en construction.
La «Suicide belt»
Plusieurs explications sont possibles pour expliquer ce cas, ainsi que celui du Suriname voisin, le seul autre pays des Amériques à figurer dans le «top 10» (ou plutôt «bottom 10») du rapport de l'OMS.
La plupart des cas de suicides sont concentrés dans la région rurale de Berbice, le long de la rivière qui forme la frontière avec le Suriname, surnommée la «suicide belt». Elle cumule des conditions de vie difficile, un alcoolisme rampant et très peu d'accès aux services de l'Etat, en matière de santé ou d'aide sociale. De plus, note sombrement Associated Press, la plupart des paysans ont recours à des pesticides très nocifs bannis dans la plupart des pays. Selon des spécialistes, leur utilisation accélère la dégradation de la santé mentale et l'ingestion de ces poisons est devenue la méthode préférée des paysans guyanais.
La revue Medical Daily nuance le problème. En s'appuyant sur les brusques augmentations du nombre de suicide d'années en années, l'auteur défend la thèse d'une «épidémie de suicides». Ces phénomènes semblables dans leur propagation à une épidémie virale, sous la forme d'un important stress mental passant directement de personne à personne, sont bien connus. Aux Etats-Unis, la mort de Marylin Monroe avait été suivie d'une augmentation de 12% du nombre total de suicide sur l'année. Un phénomène tragique que l'auteur colore d'un peu d'optimisme: il est généralement passager.
La santé mentale, un enjeu du XXe siècle
Sur le fond, la situation du Guyana révèle un problème plus profond, la prise en charge de la santé mentale dans les pays en voie de développement. L'OMS estime qu'entre 17% et 24% de la population des Amériques souffre de troubles psychiatriques. Au Guyana, cela se traduirait par un chiffre compris entre 140 000 et 180 000 personnes ayant besoin d'un suivi médical. Le pays compte, aujourd'hui, 5 psychiatres à plein temps et 300 lits dans un unique institut spécialisé.
Depuis 2010, le gouvernement du Guyana s'est déjà attaqué au problème.
Sa politique est fondée sur le modèle des pays ayant déjà réussi à enrayer un taux de suicide important, comme le Japon. Dans les années 90, le pays avait connu une brusque augmentation du nombre de suicides, passant de 24 391 en 1997 à 32 863 en 1998. Une politique publique volontaire, axée sur le dialogue et l'assistance aux survivants, engagée à partir de 2006, a permis au pays de juguler le problème. En 2012, le nombre de suicides est repassé en dessous de 30 000 par an pour la première fois depuis 1998, permettant au pays d'être cité en exemple par l'OMS.
Le Guyana ne dispose ni des finances, ni des infrastructures japonaises. Mais le gouvernement a déjà entrepris d'apprendre aux forces de l'ordre, aux enseignants et même aux prêtres à repérer et assister les cas sensibles. Une hotline a été mise en place et de nouvelles structures médicales sont en construction.
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