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Après un nouvel assaut des forces de Ouattara qui a cessé mercredi soir, Gbagbo restait retranché dans son bunker

Les combattants d'Alassane Ouattara se sont repliés mercredi, quelques heures après avoir lancé l'assaut sur la résidence du chef d'Etat ivoirien.Dans le quartier de chic et verdoyant de Cocody, la résidence de l'ambassadeur du Japon a été attaquée par des "mercenaires", qui ont ensuite tiré roquettes et coups de canon depuis le bâtiment.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Eléments des forces pro-Ouattara à Abidjan, le 6 avril 2011 (France 2)

Les combattants d'Alassane Ouattara se sont repliés mercredi, quelques heures après avoir lancé l'assaut sur la résidence du chef d'Etat ivoirien.

Dans le quartier de chic et verdoyant de Cocody, la résidence de l'ambassadeur du Japon a été attaquée par des "mercenaires", qui ont ensuite tiré roquettes et coups de canon depuis le bâtiment.

La sécurité se détériore, disent des diplomates
Un haut responsable du département d'Etat a annoncé mercredi soir que des diplomates indiens, israéliens et japonais en Côte d'Ivoire ainsi qu'une vingtaine de journalistes avaient sollicité l'aide des Etats-Unis pour quitter le quartier de Cocody, à Abidjan.

Dans ce quartier qui abrite la résidence présidentielle,
où M. Gbagbo était toujours retranché mercredi dans un bunker, "l'offensive s'est heurtée à une très forte résistance du dernier carré de fidèles à Gbagbo", selon une source gouvernementale française. "Il y a encore des mortiers et des chars dans l'enceinte de la présidence, l'offensive est suspendue pour quelques heures, manifestement", a ajouté cette source.

Dans l'après-midi, un témoin a parlé de "pause dans les combats" après "plusieurs heures de tirs nourris à l'arme lourde". "Les Forces républicaines (pro-Ouattara) sont arrivées jusqu'à 150 mètres du portail (de la résidence de M. Gbagbo) mais ne sont pas entrées", a poursuivi ce témoin. Elles ont dû opérer un "retrait", a-t-il ajouté.

Justifiant cet assaut, la source gouvernementale française avait indiqué mercredi matin que "le président Ouattara a estimé que les négociations engagées pour obtenir la reddition de Gbagbo traînaient en longueur (...). Il a donc décidé d'intervenir militairement pour essayer de régler le problème, c'est-à-dire de capturer Gbagbo en vie".

Paris a toutefois affirmé ne pas avoir participé à cette attaque, réfutant une accusation du camp Gbagbo.

Selon un porte-parole des Nations-unies, le président sortant Laurent Gbagbo continuerait à négocier sa reddition avec des représentants étrangers.

Gbagbo dénonce une tentative d'assassinat

Laurent Gbagbo a dénoncé une "tentative d'assassinat" du président sortant.
Les forces du président Ouattara, reconnu par la communauté internationale, sont parties "chercher" mercredi dans sa résidence d'Abidjan le chef d'Etat sortant, qui refuse toujours de se rendre, a indiqué un porte-parole de ces forces à Abidjan. "Gbagbo refusait toujours de reconnaître par écrit la victoire de Ouattara, ainsi qu'il le lui demandait, Ouattara a jugé qu'il n'était pas honnête", a-t-on également indiqué de source gouvernementale française.

"Je ne reconnais pas la victoire de Ouattara. Pourquoi voulez-vous que je signe ça ?", a expliqué Laurent Gbagbo, mardi lors d'un entretien sur la chaîne privée LCI. "Je trouve absolument ahurissant que la vie d'un pays se joue sur un coup de poker de capitales étrangères", a-t-il lâché.

Laurent Gbagbo : "Je ne suis pas un kamikaze"
"Je sors d'un culte pour prier, pour que la sagesse habite les uns et les autres, pour que l'on discute", a encore déclaré ce fervent chrétien évangélique. "Que l'on s'asseye et qu'on discute, mais on ne veut pas s'asseoir, parce qu'on compte sur les forces armées étrangères", a-t-il déploré. "Moi, je ne suis pas un kamikaze, j'aime la vie. Ma voix n'est pas une voix de martyr, je ne cherche pas la mort mais si la mort arrive, elle arrive", a-t-il encore expliqué.

Selon une source proche du dossier, une pierre d'achoppement pour la reddition de Laurent Gbagbo serait la destination du président sortant: restera-t-il en Côte d'Ivoire ou sera-t-il contraint à l'exil ? Le président américain Barack Obama a appelé l'ex-homme fort d'Abidjan à "démissionner immédiatement", soutenant "fermement" les frappes de l'ONU et de la France lundi sur ses derniers bastions. Une polémique a éclaté sur ces frappes.

Laurent Gbagbo, ex-opposant devenu président en 2000 lors d'un scrutin déjà contesté, n'a jamais reconnu sa défaite à la présidentielle du 28 novembre 2010, un vote pourtant certifié par l'ONU. Il a toujours refusé d'abdiquer ou de partir en exil.

Mais la résistance acharnée de ses troupes à Abidjan, qui comptait avant la crise environ 5 millions d'habitants, a plongé la ville dans le chaos. Le haut commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a fait état de "dizaines de morts" ces derniers jours dans des combats à l'arme lourde. La situation humanitaire "est devenue absolument dramatique à Abidjan", selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies.

L'ONU a estimé à "plusieurs centaines" le nombre de personnes qui ont péri dans des massacres la semaine dernière à Duékoué, dans l'ouest de la Côte d'Ivoire. Les bilans font état, selon les sources, de 330 à un millier de victimes sans parler de l'existence d'un charnier contenant 200 corps. Les forces pro-Ouattara ont notamment été pointées du doigt.

Des hélicoptères français ont tiré sur les forces pro-Gbagbo
Quatre hélicoptères de Licorne ont tiré lundi sur le camp de gendarmerie d'Agban, bastion des forces pro-Gbagbo dans le nord de la capitale économique, avait constaté un journaliste de l'AFP. Des témoins ont aussi rapporté des tirs sur le camp d'Akouédo (nord-est) par des hélicoptères de l'ONU.

La présidence française a confirmé que les troupes de l'Onuci ont engagé des actions auxquelles participent les forces françaises, en application de la résolution 1975 du Conseil de sécurité de l'ONU, pour "neutraliser les armes lourdes utilisées contre les populations civiles".

Les frappes résultent d'une demande "urgente" du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon au président Nicolas Sarkozy, selon des responsables des Nations unies.

A Abidjan, deux Français enlevés, les ressortissants français regroupés
Dans la capitale économique, théâtre depuis jeudi soir de combats et de pillages, la France a entamé lundi matin le "regroupement" de ses ressortissants en trois points de la ville, notamment le camp de Licorne à Port-Bouët.

Quelque 1900 étrangers se trouvaient lundi soir sous protection de l'armée française et 447 autres ont quitté Abidjan depuis dimanche, selon Licorne.

Le Quai d'Orsay évalue à quelque 12.200 le nombre de Français actuellement en Côte d'Ivoire, dont 11.800 à Abidjan. Quelque 7300 ont la double nationalité.

Quelques heures avant les frappes, deux Français, un Béninois et un Malaisien ont été enlevés à l'hôtel Novotel d'Abidjan par des "éléments armés" dans un quartier contrôlé par le président sortant Laurent Gbagbo.

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