Bangladesh : l'économiste Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix en 2006, a été reconnu coupable dans une affaire de droit du travail
Le lauréat du prix Nobel 2006 de la paix, Muhammad Yunus, a été jugé coupable d'avoir enfreint le droit du travail au Bangladesh, lundi 1er janvier. Un tribunal de la capitale, Dacca, l'a condamné à six mois d'emprisonnement, a appris l'AFP auprès du procureur principal, Khurshid Alam Khan. Il a précisé que l'économiste avait été immédiatement libéré sous caution, dans l'attente de l'appel.
Aux côtés de trois collaborateurs, également condamnés en première instance, Muhammad Yunus est accusé de ne pas avoir créé de fonds de prévoyance au sein de Grameen Telecom, l'une des entreprises qu'il a fondées. Les quatre mis en cause rejettent ces accusations.
"J'ai été puni pour un crime que je n'ai pas commis."
Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix 2006à l'issue de son procès
"Ce verdict est sans précédent", a déclaré à l'AFP Abdullah al-Mamun, l'un de ses avocats. "Nous n'avons pas obtenu justice." Khaja Tanvir, un autre avocat de l'économiste interrogé par l'AFP, évoque une affaire "sans valeur, fausse et injustifiée (...). Le seul but de ce dossier est de le harceler et de l'humilier devant le monde entier".
Ciblé par des attaques du gouvernement
Muhammad Yunus fait par ailleurs l'objet d'une centaine d'autres accusations concernant des violations supposées du droit du travail et des allégations de corruption. En novembre, il avait déclaré aux journalistes qu'il n'avait profité d'aucune des plus de 50 entreprises qu'il avait créées au Bangladesh. "Elles n'étaient pas destinées à mon bénéfice personnel, qu'il s'agisse de la Grameen Bank ou de nombreuses autres organisations". Les partisans et soutiens du prix Nobel dénoncent des procédures judiciaires lancées pour des raisons politiques.
Muhammad Yunus, 83 ans, est reconnu pour avoir sorti des millions de personnes de la pauvreté grâce à sa banque de microcrédit pionnière, mais il s'est brouillé avec la Première ministre, Sheikh Hasina, qui l'a accusé de "sucer le sang" des pauvres. La popularité de l'économiste auprès de la population bangladaise a fait de lui un rival potentiel de l'actuelle cheffe du gouvernement, pratiquement assurée de décrocher un cinquième mandat lors des élections législatives qui doivent se tenir dimanche, et que l'opposition boycotte.
Des critiques accusent les tribunaux du pays d'approuver les yeux fermés les décisions du gouvernement de Sheikh Hasina, de plus en plus ferme dans sa répression de l'opposition politique. En août, 160 personnalités internationales, dont l'ancien président américain Barack Obama et l'ex-secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, avaient publié une lettre ouverte commune dénonçant le "harcèlement judiciaire continu" dont est victime le pionnier du microcrédit.
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