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Mon Starmania, les souvenirs émus et sans concession de Fabienne Thibeault, la serveuse automate

Pour célébrer les 40 ans du premier opéra-rock, la chanteuse québécoise Fabienne Thibeault publie chez Pygmalion Mon Starmania, par la première serveuse automate. Elle y rapporte ses souvenirs de l'aventure vécue aux côtés de Michel Berger, Luc Plamondon, Daniel Balavoine, France Gall et bien d'autres.

Article rédigé par Jean-François Lixon
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Une partie de la troupe de originale de Starmania (BENAROCH/SIPA / SIPA)

Autant le dire tout de suite, Fabienne Thibeault n'a rien oublié. Le temps a passé depuis la première de Starmania le 10 avril 1979, quarante ans, mais les souvenirs restent frais comme s'ils avaient été vécus hier. Dans ces moments inscrits dans sa mémoire, il y a les merveilleux instants passés avec Daniel Balavoine, par exemple, et d'autres moins agréables qu'elle a gardés notamment de France Gall. La mort n'efface rien et même si le livre est bien loin d'être un règlement de comptes, Fabienne Thibeault y écrit sans concession ce que lui dicte sa mémoire.

On croise dans Mon Starmania tous les protagonistes de ce premier opéra-rock complètement chanté de l'histoire de la scène française. Le lecteur passe de l'autre côté, suit la chanteuse dans la maison de France Gall et Michel Berger, et l'écoute lui confier ses moments de complicité avec Daniel Balavoine.

Daniel Balavoine, c'est un garçon avec qui on riait beaucoup et qui avait parfois des moments de solitude. Je pense qu'il avait au fond de lui-même un secret. Et nous partagions une chose : nous avions tous les deux des petits problèmes de poids !

Fabienne Thibeault

Rencontre avec Fabienne Thibeault, journaliste : Jean-François Lixon

Rencontre avec Fabienne Thibeault auteure de "Mon Starmania"
Rencontre avec Fabienne Thibeault auteure de "Mon Starmania" Rencontre avec Fabienne Thibeault auteure de "Mon Starmania"

Dans une écriture très naturelle, Fabienne Thibeault raconte les multiples petites histoires qui entourent une troupe telle que celle de Starmania. Elle évoque aussi les origines très diverses des protagonistes, raconte sa propre histoire et compose un faisceau de destinées qui se rejoignent le 10 avril 1979 sur la scène parisienne du Palais des Congrès.

Les stars, mais aussi les autres

La chanteuse québécoise ne se contente pas d'évoquer les stars, Berger, Gall, Balavoine. Elle n'oublie pas les personnalités artistiques moins connues de ce côté de l'Atlantique comme la somptueuse et déjantée Diane Dufresne ou la délicieuse rockeuse Nanette Workman, ou encore le "businessman" Claude Dubois. Fabienne Thibeault n'oublie pas non plus qu'un spectacle ne se fait pas sans techniciens, sans spécialistes du son, des costumes, des lumières, sans tout ce peuple de l'ombre que le public ignore souvent. Elle leur accorde des lignes qui prouvent qu'elle ne faisait aucune différence entre ceux qui sont vus du public et les autres. Elle a même recueilli certains de leurs souvenirs pour compléter son livre. Tout comme elle a profité des réseaux sociaux pour récolter les graines qu'elle et ses amis avaient semé il y a quarante ans : les témoignages des spectateurs. Certains d'entre eux, parfois très émouvants, figurent à la fin du livre.

Une partie de la troupe de originale de Starmania (BENAROCH/SIPA / SIPA)

Le duo Plamondon-Berger

L'aventure franco-québécoise a été imaginée par deux artistes hors du commun. Le Canadien Luc Plamondon, auteur des textes, et le Français Michel Berger compositeur aérien qui a laissé une trace indélébile dans la musique des années 70 et 80. La première de la version scénique a été donnée à Paris le 10 avril 1979. L'album original s'est venu à plus de 2, 2 millions d'exemplaires, en France seulement. De la profonde complicité des deux "pères" de Starmania sont nées une amitié impresciptible et une oeuvre scénique, le premier opéra-rock de l'histoire : Starmania. De nombreuses versions ont été enregistrées ou jouées sur scène, y compris en anglais. Mais c'est bien celle-ci, la première, celle que nous raconte Fabienne Thibeault, qui est restée mythique.

La couverture de "Mon Starmania, de Fabienne Thibeault. Editions Pygmalion (La couverture de "Mon Starmania, de Fabienne Thibeault)

Starmania

Trois histoires d'amour qui se croisent dans un futur inquiétant. L'histoire est celle de Johnny Rockfort (on a le droit, encore aujourd'hui, de douter de la pertinence du jeu de mot), interprété par Daniel Balavoine, qui lutte contre la société devenue mondiale et ultra dirigiste avec Sadia (Nanette Workman) le cerveau de la révolte, et qui tombe irrémédiablement en amour avec Cristal (France Gall). L'histoire est aussi celle de Marie-Jeanne, la serveuse automate interprétée par Fabienne Thibeault et qui observe tout ce qui se passe depuis son Underground Café. Elle entretient un amour sans espoir pour Ziggy (Gregory Ken), homosexuel et rêvant de devenir Disc jockey. Mais l'histoire est aussi celle de Zéro Janvier (Etienne Chicot), politicien sans scrupules qui jette son dévolu sur Stella Spotlight (Diane Dufresne), ancienne actrice de cinéma hypersexy, ils forment un couple à la Donald et Melania Trump.

Les deux auteurs de Starmania, Luc Plamondon et Michel Berger (MATTON YANN/SIPA / SIPA)

Deux regrets

La distribution originale a joué la pièce trente-trois fois. C'est peu. Mais ces trois dizaines de représentations ont laissé un souvenir indélébile dans le coeur de ceux qui en ont formé le public et qui arrivaient en connaissant tous les airs. Depuis six mois, les ondes diffusaient Les uns contre les autres, Le monde est Stone, Quand on arrive en ville, La complainte de la serveuse automate, Le blues du businessman,Le SOS d'un Terrien en détresse et d'autres "tounes" encore, comme on appelle les chansons au Québec. La version originale n'en comptait pas moins de cinquante-deux ! Et que dire de l'émotion de ceux qui ont vécu toute cette saga de l'intérieur. Fabienne Thibeault n'avoue aujourd'hui que deux regrets: celui de n'avoir pas joué plus souvent Marie-Jeanne  et surtout de ne pas voir pu l'incarner chez elle, à Montréal ou ailleurs au Québec.

Nostalgique mais jamais triste

Si l'auteur, on le sent, conserve une nostalgie de cette épopée vécue avec l'équipe de Starmania, son livre est loin de se complaire dans une tristesse désabusée. Certes, nombre de figures importantes de cette histoire ont disparu, et pas des moindres à commencer par Michel Berger et France Gall, mais Fabienne Thibeault sait raconter et ne néglige pas les anecdotes teintées d'humour. Mon Starmania n'est pas un énième livre consacré à l'opéra-rock, il y a en a eu beaucoup mais c'est le premier qui conte l'aventure vécue de l'intérieur, et à ce titre rapporte des détails que son auteure est l'une des seules à connaître. Un livre à lire en écoutant les albums. Fabienne Thibeault conseille d'ailleurs de priviléger l'enregistrement public réalisé avec cette première et exceptionnelle distribution.

Mon Starmania, par la première serveuse automate

de Fabienne Thibeault

Editions Pygmalion

200 pages 19,90 euros

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