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"Le parti communiste chinois a lancé la guerre contre la mémoire": 30 ans après le massacre de Tiananmen, les victimes en quête de vérité

Alors que les autorités chinoises continuent de maintenir l'omerta sur la répression sanglante du 4 juin 1989, les victimes de la place Tiananmen veulent "sauver la vérité".

Article rédigé par Dominique André - Édité par Adrien Bossard
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Feng Cong De, l’un des principaux leaders étudiants de la place Tiananmen en 1989, aujourd'hui réfugié aux États-Unis. (DOMINIQUE ANDRÉ / RADIOFRANCE)

L'image a fait le tour du monde. Celle d'un jeune chinois, mains nues, qui défie les chars de l'armée du pays. C'était il y a 30 ans. En 1989, et pendant près de sept semaines, des étudiants, des intellectuels et des ouvriers ont tenu tête au pouvoir, installés pacifiquement sur la grande place Tiananmen de Pékin, devant la Cité Interdite. Cette occupation s'est terminée dans un bain de sang, dans la nuit du 3 au 4 juin. L’armée a tiré à balles réelles. Aujourd'hui, 30 ans après, les anciens leader de Tiananmen continuent de se battre pour que la vérité éclate. Une guerre contre l'oubli difficile à mener.

Pourquoi les tanks ont pris en chasse les jeunes ? Qui a donné l’ordre ? Quel tank m’a attaqué? Qui était le conducteur ? Je veux connaître la vérité.

Fang Zheng, ancien manifestant étudiant

à franceinfo

Parler du 4 Juin est interdit, réprimé, et peut conduire à la prison. Fang Zheng peut en témoigner. Cet ancien manifestant étudiant est toujours sur la liste noire en Chine. C'est à Taiwan que nous l’avons rencontré, 30 ans après avoir été écrasé par un char près de la place Tiananmen, le 4 juin 1989. Il a perdu ses deux jambes. "Le 4 juin à 6 heures du matin, les tanks ont poursuivi les jeunes étudiants qui quittaient pacifiquement la place Tian'anmen. C'est à ce moment-là qu’un tank a roulé sur moi et m’a écrasé les jambes." 

Feng Cong De était l’un des principaux leaders de la contestation. Exfiltré de Chine par l’opération "Yellow birds" en 1989, il a été accueilli en France, pour rejoindre les États-Unis. Il a fondé un site pour conserver la mémoire du mouvement pro-démocratique. "Beaucoup de gens ont perdu leur vie le 4 juin. C'est pour ça que je dois continuer à rassembler des preuves et les conserver. J'ai créé un site sur le 4 juin. Le parti communiste chinois a lancé la guerre contre la mémoire. Ils veulent détruire les souvenirs. Essayons de sauver la vérité."

Les jeunes Chinois peu renseignés sur le 4 juin

Tout juste un incident pour les officiels chinois, Tiananmen est banni des livres d’Histoire. Les jeunes nés après le mouvement ne savent rien ou pas grand-chose. "Le 4 juin à Tiananmen ? Je ne connais pas. Je suis née en 1989, raconte une trentenaire chinoise. Donc je ne connais pas bien ce sujet. Ça ne m'intéresse pas trop. J'ai l'impression que ça ne me regarde pas." Alors que le bilan officiel du massacre n’a jamais été publié, la Croix-Rouge chinoise avait évalué le nombre de morts à 2 700. Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix en 2010 et mort en détention en 2017, les appelait "les âmes errantes de Tiananmen".

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