Climat: vivons-nous vraiment à crédit après le «jour de dépassement»?
En 1970, le «jour du dépassement» tombait un 15 décembre. En 2016, nous devrons vivre «à crédit» pendant 145 jours. Un constat alarmant dressé par l’ONG Global Footprint Network qui publie cet indicateur depuis 1986.
Ces chiffres sont issus d’évaluations très complexes. Pas moins de 70 organisations ont fourni des données pour aboutir à ce résultat. Mais ce jour marque surtout, selon l’institut, «la date à laquelle la demande exercée par l’humanité sur la nature (empreinte écologique) dépasse la capacité de la planète à régénérer ces ressources et à absorber les déchets dont les émissions de carbone (biocapacité)».
Cette date relève donc plus de la symbolique que d’un réel manque de ressources. Oui, demain et après-demain, nous aurons toujours à manger, nous pourrons toujours nous éclairer, et nous aurons toujours de l’eau à boire.
La difficile mesure de nos ressources
Plusieurs experts émettent des critiques quant à cet indicateur. Car la mesure essentielle sur laquelle repose l'étude de Global Fooprint Network est «l’hectare global». Or un «hectare global» est une moyenne qui calcule la productivité d'oxygène et le rejet de CO² d'une parcelle de terre ou de mer. Une unité contestée par beaucoup.
Dans ce même communiqué, il est précisé que pour aboutir à établir le «jour de dépassement», il faut faire le calcule suivant : (biocapacité de la planète / empreinte écologique de l’humanité) x 365.
Dans un article du Guardian, Leo Hickman conteste la méthode. «Cela a des inconvénients, surtout parce que cela semble comparer des pommes et des poires dans l’objectif d’apporter une conclusion qui fasse les gros titres. Après tout, comment pouvez-vous assembler des faits comme les gaz à effets de serre, les destructions de forêts tropicales et le rendement du maïs, et arriver après à un chiffre aussi inflexible et singulier ?»
Comment calculer notre empreinte écologique ?
Vous pouvez, si vous le souhaitez, trouver de nombreux sites vous permettant de calculer votre empreinte écologique. Si à l’échelle individuelle, cela semble possible, et relativement fiable, cette question est beaucoup plus difficile à traiter à l’échelle planétaire.
Dans un article publié par latribune.fr, le controversé Bjorn Lomborg, directeur du Copenhagen Consensus Center, dénonce un instrument non pertinent. Il affirme ainsi que: «Dans le fond, cet exercice s'avère utile, mais comme toutes les évaluations impliquant le recoupement de plusieurs aspects du comportement de l'humanité, il aura tendance à simplifier ses données».
Son avis est partagé par d’autres instituts, comme le rapporte Slate.fr. «Selon l'échelle étudiée (locale, nationale, internationale), les données disponibles ne sont pas les mêmes et les modes de calcul changent également. Les facteurs pouvant être pris en compte sont multiples (consommation du pays, importations, exportations, cycles de vie des produits)».
Faire prendre conscience
Le calcul du «jour de dépassement» peut donc être remis en cause, mais le constat qu’il apporte, aussi apocalyptique soit-il, reflète tout de même une réalité.
Car les chiffres sur lesquels s’appuie le Global Footprint Network sont pour la plupart pertinents. C’est la méthode qui peut poser problème, et surtout, le fait de fixer un jour précis pour une question aussi complexe.
Mais l’objectif n’est-il pas d'abord médiatique avant d'être scientifique ? Faire prendre conscience des enjeux environnementaux aux sociétés pour les faire changer de mode de consommation est l’un des problèmes majeurs auxquels font face les écologistes. La vulgarisation de ces questions très complexes est également... très compliquée.
Et si l’on en juge par le nombre de publications qui ont accompagné «le jour du dépassement», la mission est réussie.
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