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Allemagne : sur l'île de Rügen, la colère des habitants contre un projet de terminal gazier menaçant un écosystème unique

Le gouvernement allemand et le ministre vert de l’économie prévoient de construire au large de l'île touristique de Rügen, en mer Baltique, une plateforme pour importer du gaz naturel liquéfié. Mais sur place les habitants sont inquiets de voir arriver les gigantesques navires remplis de méthane.
Article rédigé par franceinfo, Sébastien Baer
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La plage de Binz, sur l'île de Rügen (Allemagne) - Juin 2023 (SEBASTIEN BAER / RADIO FRANCE)

Le gouvernement allemand prévoit de construire au large de l’île de Rügen, dans la mer Baltique, une plateforme pour importer du GNL, du gaz naturel liquéfié. Car depuis la guerre en Ukraine, l’Allemagne cherche de nouvelles sources d’énergie pour remplacer ses importations de gaz russe. 

Sous le soleil de ce début juin, l’île a tout du paysage de carte postale, avec ses cabines de plage posées sur le sable blanc face au bleu de la mer où s’aventurent les premiers baigneurs. La "perle de la Baltique" est l’une des destinations préférées des touristes. Mais pour combien de temps encore ? Les 65 000 habitants de l'île sont très remontés contre le projet du gouvernement, porté par le ministre (Vert) de l’économie.

>>> Crise énergétique : l'Allemagne inaugure son troisième terminal de gaz liquéfié en un mois

Sur place, la perspective de voir arriver les gigantesques navires remplis de méthane inquiète les habitants. Thomas Kunstmann, un retraité à la tête d’un collectif d’opposants au projet de terminal désigne un point à une centaine de mètres de la côte. " C’est à peu près à ce niveau qu’il faut s’imaginer ces gigantesques bateaux, qui font jusqu’à 400 mètres de longueur. On entendra le bruit des générateurs et ils seront visibles depuis la côte."

Thomas Kunstmann, président d’un collectif citoyen d’opposants au projet de terminal GNL (RADIOFRANCE  - Sébastien Baer)

Le retraité insiste, son île doit rester intacte. "C’est dommage pour les habitants et les touristes qui viennent ici pour le calme et la beauté de la nature. Les installations industrielles, ils les ont chez eux."

"Cela fait vraiment mal quand on voit avec quelle légèreté on traite une telle île, une telle richesse que rien ne peut remplacer"

 Thomas Kunstmann, à la tête d'un collectif d’opposants au projet de terminal

à franceinfo

Pour les habitants, il est hors de question de sacrifier la carte postale. Ils multiplient manifestations et pétitions, soutenus par la présidente de la région. Rügen est aussi connu pour son écosystème remarquable.

 

Marlies Preller est la présidente d’une association locale de défense de la nature et elle s’inquiète pour cet environnement unique. " Il y a le marsouin commun, le phoque gris et de nombreuses espèces d'oiseaux qui font halte ici dans le sud de la Baltique, explique-t-elle. Et c’est ici qu’on veut exploiter le gaz le plus polluant qui existe sur Terre ?"

"Le méthane est 100 fois plus nocif que le CO2. Tout ça est une aberration. Qu’un ministre écologiste ne sache pas cela, c’est un scandale."

Marlies Preller, présidente d’une association locale de défense de la nature

à franceinfo

Les insulaires s’interrogent aussi sur l’intérêt d’un nouveau terminal. L’Allemagne en a déjà trois et en construire un quatrième serait superflu, affirme Karsten Schneider, le maire de la station balnéaire la plus fréquentée de Rügen. " Nous avons passé le premier hiver et nous n’avons plus de pénurie d’énergie."

Karsten Schneider, le maire de la station balnéaire la plus fréquentée de Rügen (RADIOFRANCE - Sébastien Baer)

Nous avons des terminaux dans la mer du Nord dont les capacités ne sont pas épuisées et qui suffiront à approvisionner tout le monde. Même une grande partie des membres du parti écologiste doute de la nécessité de ce projet."

"Ce n’est pas comme si on construisait un bac à sable qu’on pourrait retirer quand il ne sera plus utile. Là, c’est irréversible."

Karsten Schneider, maire de la station balnéaire la plus fréquentée de Rügen

à franceinfo

Pour tenter d’apaiser les mécontents, le gouvernement promet un million d’euros de subventions en contrepartie de la construction du terminal. Officiellement, la mise en service du site est prévue pour le début d’année prochaine.

L'île de Rügen menacée par un terminal gazier : reportage de Sébastien Baer

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