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"On a affaire à des espèces qui sont à l'agonie", Allain Bougrain-Dubourg dénonce les arrêtés fixant les quotas de chasse aux oiseaux

Le président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) s'alarme des 155 000 prélèvements autorisés cette saison et des méthodes de capture des oiseaux. 

Article rédigé par franceinfo
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Allain Bougrain Dubourg, président de la Ligue de Protection des Oiseaux, le 11 novembre 2010 à Carcen-Ponson, dans les Landes. (PIERRE ANDRIEU / AFP)

"Il faut arrêter avec tout cela. On n'est plus à une époque où on a besoin de capturer des oiseaux pour arriver à survivre" a réagi vendredi 6 septembre sur franceinfo Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) après la publication, cette semaine dans le Journal Officiel, d'arrêtés fixant les conditions et les quotas de la chasse d'oiseaux, déjà ouverte sur une grande partie sud de la France. Plus de 155 000 animaux vont pouvoir être piégés avec des filets ou avec de la glu. "C'est l'agonie de ces espèces qui s'ouvre", prévient-il.

franceinfo : Ces quotas de chasse vous inquiètent ?

Allain Bougrain-DubourgIl arrive un moment où il faut cesser le feu. On a affaire à des espèces qui sont à l'agonie. Il faut savoir qu'en France on chasse 64 espèces d'oiseaux différentes contre une moyenne de 20 à 30 dans le reste de l'Europe. Sur les 64 espèces, vous en avez 20 qui sont en déclin, à l'agonie, et qui figurent sur la liste rouge de l'UICN [Union internationale pour la conservation de la nature]. L'alouette des champs a perdu 30% de sa population en 15 ans.

C'est une question de survie de l'espèce ?

Pas seulement, il y a d'abord la survie de l'espèce, évidemment, mais je rappelle quand même que quand les chasseurs et le gouvernement nous disent "ce n'est pas grave", nous, on va devant les tribunaux administratifs, on va devant le Conseil d'État et on gagne à chaque fois. Ce n'est pas la LPO qui lance comme ça des anathèmes à l'égard des porteurs de fusils.

La fédération nationale des chasseurs vous reproche de diviser ?

C'est ridicule. Ce que je constate, c'est qu'Elisabeth Borne vient de prendre des mesures pour le courlis cendré. Elle a autorisé la chasse de 6 000 oiseaux. La LPO a porté plainte, elle a gagné devant le Conseil d'État et son arrêté a été retoqué. La réalité, c'est le droit et la conséquence c'est que la France non seulement est montrée du doigt par la Commission européenne mais elle doit rendre des comptes dans les semaines qui viennent concernant ces méthodes de captures qui, par ailleurs, sont odieuses faute de quoi elle va se retrouver devant la Cour européenne de justice.

Je le regrette, mais on a tout tenté au niveau français. On a gagné 12 fois devant le Conseil d'État concernant la prolongation de la chasse aux oies. Mais ça continue. Je voudrais juste faire remarquer qu'un citoyen lambda, s'il est condamné pour une faute grave et qu'il récidive, on durcit sa peine, il récidive encore, il va peut-être se retrouver en prison. L'État, non. Il continue chaque année de la même manière en dérogeant et en ensanglantant la gibecière des chasseurs et ça on ne l'admet plus.

De quelle technique de capture parle-t-on ?

La technique de capture par la glu, par exemple. On met des petits bâtonnets dans les arbres avec de la colle, tout simplement, et en principe on attrape des grives ou des merles. Évidemment, n'importe quel oiseau va se poser sur ces pièges. Par conséquent, des espèces protégées sont prises. Dans les Ardennes, ce sont des lacets qui étranglent les oiseaux. Ailleurs, ce sont des pierres qui leur tombent dessus, ou encore des cages en grillage. On est au 21e siècle ! Il faut arrêter avec tout cela. On n'est plus à une époque où on a besoin de capturer des oiseaux pour arriver à survivre.

C'est archaïque selon vous et pourtant par endroit, ce sont des traditions ancestrales ?

C'est archaïque et c'est un sport, c'est un loisir. C'est honteux. C'est scandaleux. C'est l'agonie de ces espèces qui s'ouvre. Il y a des traditions qui n'ont plus lieu d'être. Il n'y a pas si longtemps les femmes ne votaient pas, c'était une tradition. Il faut évoluer.

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