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Climat : où sont les milliards de la COP 21 ?

A deux mois et demi du sommet de Paris sur le climat, la COP 21, les négociations préliminaires butent toujours sur le financement des mesures pour maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2°. Sur les 100 milliards de dollars par an demandés d'ici 2020, seuls 10 sont promis. Et les sources de financement restent incertaines.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (A deux mois et demi du lancement de la COP 21, il manque 90 milliards de dollars pour atteindre l'objectif de financement fixé en 2009. © REUTERS / Charles Platiau)

Un rapport est en préparation. Encore un. Mais celui-là aura un goût de dernier avertissement : il devra faire le point sur les 100 milliards de dollars par an promis en 2009 au sommet de Copenhague, pour financer l'adaptation au changement climatique. Un objectif qui doit être atteint à l'horizon 2020. Rédigé par des experts de l'OCDE, il sera présenté le 9 octobre à l'assemblée d'automne du FMI et de la Banque mondiale. 

10 milliards en cinq ans

Le 9 octobre, c'est à dire dans 24 jours. Et tous les regards se tournent vers le Fonds vert, le principal outil public qui doit financer la transition énergétique mondiale. Au dernier décompte, les montants promis au Fonds depuis qu'il est opérationnel en avril dernier n'ont pas beaucoup évolué. Ils se montent à 10,2 milliards de dollars : plus de cinq ans de négociations pour en arriver là. Si les choses continuent à ce rythme, la trajectoire pour arriver à engranger 100 milliards par an d'ici 2020 paraît plus que ratée. Et encore, seuls 56,8% de cette somme sont acquis.

36 Etats engagés sur 195

En effet, si 36 Etats se sont manifesté, 27 seulement ont "signé" leurs promesses de dons. Le principal contributeur confirmé à ce jour est le Japon, qui s'est engagé sur 1,5 milliard de dollars, devant le Royaume-Uni (1,2) et l'Allemagne (un milliard). La France, pour sa part, s'est engagée sur 577 millions de dollars. 

Au chapitre des promesses de dons encore non tenues, les Etats-Unis sont vainqueurs haut-la-main, avec trois milliards de dollars. La France figure aussi dans cette catégorie, car elle n'a pas signé l'intégralité de ses engagements, qui dépasseront légèrement le milliard. Mais avec une nuance, car une partie de la somme - 381 millions de dollars - figure au tableau du fonds vert en tant que simple prêt. Le Canada procède de même. Ces prêts devront être remboursés sur une période de quatre ans.

Les prêts peuvent être efficaces à l'aide au développement... à condition qu'ils soient bien fléchés, explique Pierre Cannet, responsable du programme Climat et Energie à WWF France

A ce panorama peu encourageant, il faut ajouter que la progression des sommes promises n'incite pas à l'optimisme. En effet, il y a un an à peine, les contributions s'élevaient déjà à 9,3 milliards de dollars. La course lancée par François Hollande la semaine dernière, lors du lancement officiel des manifestations de la COP 21, ressemblera donc à un sprint de dernière minute. Si elle a lieu. 

Fonds moins riches

Le Fonds vert n'est toutefois pas le seul à capitaliser des aides publiques au développement. Sous le chapeau de la Convention cadre des Nations unies pour le changement climatique (les initiés disent la "knuk"), créée à Rio en 1992, à l'heure des pionniers de la lutte contre le réchauffement, il existe d'autres fonds, à commencer par le Fonds d'adaptation, qui finance des projets essentiellement destinés à "réparer" les dégâts qui se sont déjà produits. Comme par exemple la protection du trait de côte dans plusieurs villes du Sénégal, menacées par l'érosion. Mais sa dotation - autour de 100 millions de dollars - n'a rien à voir avec celle du Fonds vert. Et la quarantaine de projets qu'il mène de par le monde ne va pas juguler les effets du réchauffement climatique. Les sommes placées sur ce fonds n'en seront pas moins comptabilisées dans l'objectif 100 milliards en 2020.

2.600 milliards de dollars par an

Une somme qui, si elle est atteinte, ne suffira évidemment pas à la conversion de l'économie rendue nécessaire par l'objectif de maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2°. Selon les Pierre Cannet, du WWF, il faudra en effet 2.600 milliards de dollars par an sur les trente prochaines années pour y parvenir. Un fardeau qui devrait échoir pour l'essentiel au secteur privé et à l'investissement généré par la transition économique. Le chiffre paraît énorme, mais les ONG soulignent qu'il y a déjà 1.100 milliards de dollars d'investissements annuels dans les énergies fossiles à rediriger vers le renouvelable. Et le rapport Calderon, du nom de l'ancien président mexicain, souligne que la somme nécessaire ne représente "que" 1 à 4% du PIB mondial. 

Si le réchauffement climatique dépasse les 2°, le modèle économique actuel risque de s'effondrer. Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice générale de Novethic, média spécialisé dans l'économie de l'environnement

De plus en plus d'entreprises prennent conscience des enjeux économiques du réchauffement climatique. Le rapport Stern sur le changement climatique, publié en 2006, démontre que le coût de l'inaction sera plus élevé que le coût du changement, selon une formule désormais consacrée : des secteurs économiques entiers risquent de s'écrouler. Le charbon a déjà commencé. Et les assurances commencent à s'inquiéter d'un monde qui se réchaufferait au-delà des 2°. Il serait tout simplement inassurable. Les incendies de forêts en Californie, détruisant habitations et structures économiques, constituent un douloureux prologue de ce qui attend le monde en cas d'échec des négociations climat .

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