Sécheresse : en Alsace, le cours du Rhin au plus bas menace le transport fluvial européen
À cause de la sécheresse, le fleuve est au plus bas. Une faible hauteur qui oblige les péniches à réduire considérablement leur chargement pour éviter de s'échouer.
Au nord de Strasbourg, à l'écluse de Gambsheim (Bas-Rhin), sous la bruine et les nuages, une énorme péniche d'hydrocarbures passe avec lenteur. Il y a un peu de pluie ce jour-là, synonyme de remontée de quelques centimètres du niveau du Rhin. Mais dans la tour de contrôle du centre de contrôle rhénan, située sur le quai de l'écluse, Bastien Dion, chef de l'unité Strasbourg-Rhin pour Voies navigables de France, ne se fait pas trop d'illusions, "on ne peut pas dire que ça soit suffisant pour clore l'épisode" de sécheresse.
Depuis deux mois, la sécheresse touche les principaux fleuves d'Europe. Sur le Rhin, le plus gros fleuve commercial d'Europe avec 300 millions de tonnes de marchandises transportées chaque année, le chargement des barges est réduit de trois quarts pour éviter de s'échouer et paralyser tout le trafic fluvial.
Tout l'été, Bastien Dion a vu passer des péniches chargées au quart ou au tiers de leurs capacités : 400 à 500 tonnes contre 3 000 habituellement, pour éviter de s'échouer dans la partie allemande du Rhin, à Kaub, le point le plus bas du fleuve. Résultat : ces difficultés ont fait monter le prix des marchandises et le trafic a chuté de 7% par rapport à l'an dernier. À l'écluse, Bastien Dion ne voit plus passer qu'une cinquantaine de bâteaux par jour au lieu de 70 en moyenne.
"À un moment donné, quand le coût devient trop important par rapport au transport, le transporteur ou son client peut décider que finalement, ça n'est plus rentable."
Bastien Dion, chef de l'unité Strasbourg-Rhin pour VNFà franceinfo
La baisse du niveau du Rhin n’est pas un problème nouveau. En 2018,le niveau était encore plus bas. Mais à l'époque, cela posait moins de problème. Le marché des matières premières était beaucoup plus calme. Depuis quatre ans, le transport fluvial s'est développé.
Dans son bureau strasbourgeois, Guy Erat, directeur de "Danser France", une entreprise de transport, regarde la maquette d'un impressionnant convoi fluvial. "Les tailles des bateaux ont quasiment doublé en 50 ans. Il n'y avait également pas le même niveau d'échanges internationaux, grâce aux conteneurs maritimes, qui a suivi l'essor des échanges mondiaux de ces 20 dernières années. Donc, forcément, les volumes à transporter sont aussi plus importants, explique-t-il. C'est une nécessaire évolution pour rester compétitif par rapport aux camions, par rapport aux trains, etc.", poursuit Guy Erat.
Un report du trafic vers le ferroviaire... et les camions
Avec des bateaux loin d'être remplis, le grand gagnant pourrait être le frêt. "Une des solutions, c'est de reporter ce qui ne peut pas être transporté au niveau fluvial via le ferroviaire", reconnait Claire Merlin, directrice du Port autonome de Strasbourg. "On a aujourd'hui 17 rotations par semaine au niveau ferroviaire et c'est quelque chose qui est appelé à croître. Une partie de la marchandise a pu être reportée. Mais aujourd'hui, effectivement, les trains sont pleins", détaille la directrice.
Quant aux camions, d'habitude plus chers que le transport par bateau, ils profitent aujourd'hui de la montée des prix du fluvial. Mais ils peuvent transporter bien moins de marchandises et sont bien plus polluants. Une péniche remplace près de 60 camions.
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