Etats-Unis : Joe Biden suspend la construction de terminaux gaziers d'exportation vers l'Europe, citant la "menace" climatique
"Cette pause (...) prend en compte ce qu'est vraiment la crise climatique : une menace existentielle." Le président américain Joe Biden a annoncé, vendredi 26 janvier, un moratoire sur la construction de nouveaux terminaux d'exportation de gaz naturel liquéfié (GNL). Les Etats-Unis sont le premier exportateur mondial de GNL, selon des données publiées par l'organisation internationale Cedigaz, pour le premier semestre 2023. Selon la Maison-Blanche, environ la moitié des exportations de GNL en 2023 ont été envoyées en Europe, alors que le continent a mis fin aux importations de gaz russes depuis l'invasion de l'Ukraine.
Depuis cet essor de la demande, scientifiques, écologistes, mais aussi élus locaux alertaient sur les conséquences pour l'environnement d'une accélération des projets de terminaux méthaniers, à la fois en termes de santé publique sur le sol américain, mais aussi en termes d'émissions de gaz à effet de serre.
Début décembre, en marge de la conférence COP28 sur le climat organisée à Dubaï, plus de 250 organisations et groupes de défense de l'environnement avaient ainsi demandé à Joe Biden de ne plus autoriser de nouveaux terminaux GNL.
Du gaz de schiste importé en Europe
"A mesure que les exportations augmentent, nous devons examiner ces demandes à la lumière des analyses les plus récentes sur le plan économique, environnemental et de la sécurité nationale", a déclaré la ministre de l'Energie, Jennifer Granholm, lors d'une conférence téléphonique. Aucun nouveau permis d'exportation ne sera donc délivré avant que le ministère américain de l'Energie (DOE) n'ait mis à jour son analyse de chaque projet, a-t-elle ajouté, assurant que les projets d'ores et déjà validés feraient monter la capacité d'exportation des Etats-Unis à 1,35 milliard de mètres cubes par jour (contre environ 328 millions de mètres cubes par jour à la fin 2023, selon l'agence américaine d'information sur l'énergie.)
Or, aux Etats-Unis, 79% de la production provient du gaz de schiste, selon l'administration en charge de l'énergie. Le procédé pour extraire ce gaz, la fracturation hydraulique, est pointé du doigt pour les dégâts qu'il cause sur l'environnement. Enfin, si le gaz constitue une énergie fossile moins émettrice en CO2 que le pétrole et le charbon, son extraction et son transport entraînent un risque d'émissions de méthane, un gaz au pouvoir réchauffant 10 fois supérieur au CO2.
En France, où l'extraction du gaz de schiste est interdite, le gaz en provenance des Etats-Unis a été livré en novembre via le nouveau terminal méthanier flottant du Havre, lequel reçoit depuis octobre du gaz en provenance également de Norvège, d’Algérie, du Qatar, du Nigeria, d’Angola, ou encore d’Egypte.
Dans un rapport publié en octobre, l'Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA) redoutait que l'Europe ne se retrouve à terme avec des capacités d'importation de GNL surdimensionnées par rapport à l'augmentation modérée de la demande de gaz. Une croissance forte qui fait craindre à terme à l'IEEFA "un écart important entre la demande prévue de GNL en Europe et les nouvelles capacités de regazéification en cours de construction et en projet". Le think tank estimait alors que la demande européenne de GNL "n'excédera pas 150 milliards de mètres cubes en 2030", ce qui entraînerait un écart potentiel de "près de 256 milliards de mètres cubes de capacités inutilisées".
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