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Climat : on vous explique pourquoi le jour du dépassement tombe cette année cinq jours plus tard qu'en 2022

Article rédigé par franceinfo, Gabrielle Trottmann
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Un champ à San Marcos (Colombie), le 13 mars 2016. (JOAQUIN SARMIENTO / AFP)
Une nouvelle méthode de calcul permet de gagner plusieurs jours par rapport à l'an dernier sur cet indicateur qui mesure la dette écologique contractée chaque année par l'humanité.

L'année est loin d'être terminée, pourtant, le jour du dépassement est déjà atteint. Mercredi 2 août, l'humanité aura consommé l'ensemble des ressources que la nature met un an à produire et à renouveler (le temps que les plantes repoussent, par exemple). Soit cinq jours plus tard que l'année précédente. 

Le jour du dépassement est calculé par une ONG américaine spécialiste de l'écologie, le Global Footprint Network, en partenariat avec la Footprint Data Foundation de l'Université York, à Toronto (Canada). Dans les grandes lignes, les chercheurs prennent en compte toutes les ressources nécessaires pour produire les biens et les produits consommés, ou gaspillés, chaque année : nourriture, habits, énergie, déchets, infrastructures. Puis ces ressources, qui correspondent à notre empreinte écologique, sont croisées avec la biocapacité de la Terre, soit la capacité de la planète à les recréer.

  

En suivant ce raisonnement, à compter de ce mercredi, l'humanité vit à crédit, puisqu'elle a consommé plus de ressources que ce que la Terre est capable de fournir en une année. A ce rythme, selon le Global Footprint Network, il faudrait l'équivalent de 1,7 planète Terre pour subvenir aux besoins de la population mondiale. La France ne fait pas partie des pays qui donnent le bon exemple concernant cet indicateur : cette année, elle a atteint son jour du dépassement dès le 5 mai. Ce qui fait dire au WWF, une ONG environnementaliste, que "si tout le monde consommait comme les Français, nous aurions besoin de 2,9 planètes."

Un changement de méthodologie

Cette année, la date du jour du dépassement a reculé de cinq jours par rapport à l'année dernière. Mais ce progrès est avant tout dû à une nouvelle méthode de calcul. Dans les faits, les avancées attribuées à nos réels efforts correspondent à un peu moins d'une journée, selon le Global Footprint Network.

En effet, jusqu'à présent, le jour du dépassement était calculé grâce à des données fournies par plusieurs agences des Nations unies, comme l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Des données actualisées avec un décalage de trois à quatre ans, en moyenne, avec l'année en cours.

Pour combler cet écart, le Global Footprint Network prend désormais en compte de nouvelles informations de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) ou encore du Global Carbon Project, une organisation qui cherche à quantifier les émissions mondiales de gaz à effet de serre et leurs causes. Cette nouvelle méthode a permis de reculer la date d'un peu plus de quatre jours.

Plusieurs leviers pour réduire l'empreinte écologique

En prenant plus de recul, le jour du dépassement a beaucoup avancé depuis plusieurs décennies, à l'exception de l'année 2020, pendant la pandémie de Covid-19, qui avait permis un recul de vingt-cinq jours. En 1970, il est tombé le 29 décembre, puis le 4 novembre en 1980, le 11 octobre en 1990, le 23 septembre en 2000 et le 7 août en 2010.

Pour Jean Rousselot, responsable eau douce au WWF France, il existe de nombreuses solutions pour réduire notre empreinte écologique : "En tant que consommateur, l'un des gestes les plus efficaces est de manger moins de viande, puisque l'élevage utilise à la fois beaucoup de surfaces cultivées et d'eau, en même temps qu'il émet des gaz à effet de serre [11,8% des émissions de la France rien que pour les bovins, selon la Cour des comptes]." Selon lui, "il faut aussi aider les agriculteurs à développer des pratiques agroécologiques plus respectueuses de l'environnement, grâce à des aides économiques et en réorientant la politique agricole commune [PAC], décidée à l'échelle de l'Union européenne."

Certains leviers permettent aussi aux écosystèmes de se rétablir plus vite, développe Jean Rousselot : "On peut redonner aux rivières leurs formes naturelles [de nombreux cours d'eau ont été canalisés dans du béton et déviés de leur trajectoire originelle pour rallier le plus rapidement possible un point A à un point B depuis le début du XXe siècle]. Les méandres ralentissaient leur débit, ce qui permettait à l'eau de mieux infiltrer le sol et les nappes phréatiques. On peut aussi planter des haies, qui font revenir les oiseaux et les insectes qui transportent le pollen, ou protéger les zones humides."

Un outil de communication efficace

Reste que le concept de jour du dépassement conserve un certain nombre d'incertitudes, comme le souligne Aurélien Boutaud, consultant spécialiste de l'environnement et auteur du livre L'Empreinte écologique (La Découverte, 2009). Selon lui, les données disponibles ne reflètent pas exactement la réalité, tout comme le calcul de l'empreinte carbone, qui représente environ 60% de l'empreinte écologique totale des humains à l'échelle de la planète.

Dans un article du média Reporterre, Aurélien Boutaud explique aussi que cet indicateur est anthropocentré. Ainsi, le simple fait de parler de ressources donne l'impression que tout ce qu'il y a sur Terre est là pour que les humains en disposent. Néanmoins, par sa simplicité, le jour du dépassement reste un outil de communication efficace.

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