La conférence climat de Copenhague court "à la catastrophe", a prévenu jeudi le président français dans un discours
"Il faut changer de braquet", a lancé M. Sarkozy devant la conférence de l'ONU.
"Nous ne sommes pas ici pour un colloque sur le réchauffement climatique, nous sommes ici pour prendre des décisions", a-t-il martelé. "Il reste moins de 24 heures, si on continue comme ça, c'est l'échec", a-t-il insisté.
M. Sarkozy a demandé l'organisation d'une réunion dès jeudi soir après le dîner de gala des dirigeants chez la reine du Danemark pour "enfin discuter sérieusement" et "trouver un texte de compromis" d'ici vendredi pour lutter contre le réchauffement climatique.
"L'échec à Copenhague serait catastrophique pour chacun d'entre nous", a prévenu le président français. "Tous, nous aurions des comptes à rendre devant l'opinion publique mondiale et devant nos opinions publiques".
"Les Etats-Unis, première puissance du monde, devront aller au-delà des engagements qu'ils ont annoncés". Quant à la Chine, elle "ne peut pas considérer que la transparence des efforts de chacun soit une remise en cause de la souveraineté de chacun".
Le président français a plaidé pour un véritable soutien aux pays les plus pauvres et les plus vulnérables au changement climatique, jugeant nécessaire le versement d'une aide immédiate de 10 milliards de dollars pour les trois prochaines années et de 100 milliards à partir de 2020.
"Mais je le dis à nos amis africains: si nous n'avons pas d'accord, vous serez les premières victimes", a souligné le chef de l'Etat français alors que les négociations se sont enlisées dans des arguties de pure forme entre pays développés et pays en développement et qu'il reste moins de 24 heures pour finaliser un projet d'accord susceptible d'être adopté par les chefs d'Etat et de gouvernement vendredi.
L'ambassadeur français pour le climat, Brice Lalonde, a jugé "salutaire" le coup de colère de Nicolas Sarkozy . "C'est le coup de talon qu'il fallait pour remonter à la surface", a-t-il confié à des journalistes. La secrétaire d'Etat française à l'Ecologie, Chantal Jouanno, avait auparavant estimé que le "ping pong" entre la Chine et les Etats-Unis, les deux premiers pays pollueurs de la planète constituait le "gros point de blocage" de la conférence, ouverte il y a dix jours et en panne depuis plus de 48 heures.
Depuis dix jours, les pourparlers achoppent sur la répartition des efforts financiers et d'engagements pour arriver à limiter la hausse de la température moyenne de la planète à 2°.
Les deux plus grands pollueurs de la planète, Etats-Unis et Chine, s'affrontent notamment sur ce point. L'UE s'est déclarée "préoccupée par l'absence de progrès". Semblant renvoyer Pékin et Washington dos à dos, l'Union européenne a appelé chacun des pays, "surtout les grands pollueurs" à aller "de toute urgence jusqu'à l'extrême limite de leur flexibilité".
La Chine a annoncé mercredi à Copenhague qu'elle ne voyait pas comment parvenir à une solution cette semaine. Dans ce contexte, la venue de Barack Obama qui doit s'exprimer vendredi au dernier jour du sommet, est attendue avec une forme d'espoir.
"On est loin du compte", résume un climatologue
Pékin comme Delhi se sont dits prêtes à réduire leur "intensité carbonique", qui mesure les émissions par point de PIB mais n'assure pas une réduction en volume compte tenu de leur croissance économique.
"Ce n'est pas la négociation dont on rêve du point de vue scientifique", a résumé le climatologue français Jean Jouzel, vice-président du Groupe international d'experts sur le climat (GIEC). "On est loin du compte", a-t-il ajouté à propos des engagements de réduction des émissions des pays riches à l'horizon 2020, sensiblement inférieurs à la fourchette de -25% à -40% recommandée par les scientifiques. "On voit bien qu'il y a un certain pessimisme", a-t-il ajouté, rappelant l'enjeu: éviter un emballement de la machine climatique, qui marquerait une rupture brutale après quelque 10.000 années d'une grande stabilité du climat sur la Terre.
A peine arrivée à Copenhague, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a martelé qu'il n'y aurait pas d'accord sans engagement vérifiable des grands pays en développement. Elle a promis une participation financière, non chiffrée, de son pays à une enveloppe globale de 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 pour lutter contre le réchauffement, mais l'a subordonnée à "des actions significatives" et vérifiables des grands pays émergents.
De leur côté, ces pays insistent sur des engagements permettant de préserver leur croissance économique.
Quant aux Danois, hôtes du sommet, ils ont assuré "se battre de toutes (leurs) forces pour sortir de l'impasse".
La chancelière allemande Angela Merkel, a souligné avant de partir pour le Danemark que "les nouvelles (...) de Copenhague n'étaient sont pas bonnes". Tout en espérant que l'arrivée des dirigeants débloquerait les discussions. Elle a également dit que la proposition américaine manquait d'ambition.
A ce stade, le seul consensus qui semble émerger concerne une aide immédiate totale de 10 milliards de dollars par an sur trois ans dès 2010 pour aider les pays les plus démunis à faire face aux impacts du réchauffement. L'Union européenne a déjà annoncé qu'elle en assumerait au total 10 milliards de dollars à elle seule entre 2010 et 2012. Mais rien n'a été arrêté au-delà.
Le but de la conférence est de trouver un accord apportant la meilleure riposte possible au changement climatique et pouvant entrer en vigueur début 2013.
Des incidents mercredi
La police danoise a arrêté mercredi quelque 230 manifestants qui tentaient de forcer les cordons de police établis autour du Bella Centre, qui abrite la conférence internationale sur les changements climatiques. Selon des témoins et la police, des heurts et des échaufourées ont éclaté alors qu'une poignée de protestataires réussissaient à enfoncer très brièvement les barrages de sécurité.
Un porte-parole d'Action Justice Climat, le groupe à l'origine du mot d'ordre, a fait savoir que l'objectif était d'enfoncer les cordons de police et de perturber les débats. Une poignée de protestataires ont réussi à enfoncer un premier cordon de sécurité établi devant le siège de la conférence pendant une minute ou deux avant, d'après un journaliste de Reuters présent sur les lieux, d'être poursuivis par les forces de l'ordre.
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