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Mardi 19 août : le jour du dépassement est arrivé

Ce mardi 19 août 2014 n’est pas le jour le plus long, c’est celui du dépassement. En huit mois, nous avons en effet déjà épuisé la totalité des ressources naturelles que la Terre peut produire en un an. Ressources énergétiques, végétales, animales, minérales… Une date qui arrive de plus en plus tôt dans le calendrier, s’alarment plusieurs associations.
Article rédigé par Cécile Mimaut
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
  (Christophe Roturier, directeur scientifique de WWF France © Radio France/Sylvie Johnsson)

Imaginez un budget global au niveau des ressources naturelles de la planète, avec des recettes et des dépenses. Hé bien aujourd’hui, "nous sommes dans le rouge ", s’inquiète Christophe Roturier, directeur scientifique de WWF France, "c'est-à-dire que nous dépensons plus que ce que nous gagnons ", poursuit-il.  

 "En 2000, c’était le 1er octobre et en 2014 nous sommes le 19 août"

Ce déficit des ressources naturelles, comme les poissons, les forêts, les terres cultivables, indispensables à notre vie sur terre, est d’autant plus inquiétant que ce jour du dépassement est de plus en plus précoce dans l’année. "En 2000, c’était le 1er octobre et en 2014 nous sommes le 19 août ", souligne Christophe Roturier. Au-delà d’une question de calendrier, ce jour du dépassement tient aussi du symbolisme. "On tient à le marquer chaque année pour alerter l’opinion publique, les gouvernements, sur la nécessité de prendre très vite les mesures pour enrayer le phénomène ", explique le directeur scientifique de WWF France.

Le jour du dépassement : à partir de ce mardi 19 août, l'Humanité va vivre à crédit, explique Christophe Roturier, directeur scientifique de WWF France, au micro de Mathilde Munos

La planète sur-exploitée

Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce déficit en ressources naturelle. Facteur démographique d’abord, avec une croissance de l’Humanité très importante depuis le début des années 1970, mais aussi facteur industriel avec une consommation qui augmente, notamment dans certains pays. Ainsi, dans le top cinq des pays qui consomment le plus, on retrouve la Chine, les Etats-Unis, l’Inde, le Brésil et la Russie, la palme de la consommation par habitant revenant au Koweït.

La  France, elle, ne s’en sort pas trop mal car elle a "la chance" d’avoir une nature assez généreuse. "Il faudrait à peu près 1,6 fois la production des ressources naturelles de la France pour nous permettre de continuer à vivre comme nous vivons aujourd’hui ", indique Christophe Roturier, "ce qui ne veut pas dire qu’on ne consomme pas trop nous aussi ", ajoute-t-il.

Les services rendus par la nature représentent deux fois le PIB mondial

Pour enrayer le phénomène, des solutions existent et "concernent tout le monde ", insiste Christophe Roturier, "le citoyen, les états, les entreprises, les organisations internationales ". Elles consistent principalement en deux stratégies, d’abord "protéger le capital naturel dont nous disposons " et, deuxième partie de l’action, "être beaucoup plus actifs dans la réduction de notre consommation ", en consommant différemment et en produisant de manière plus durable.

Considérer le capital naturel au même titre  que le capital productif ou le capital humain, devient "indispensable ", estime WWF. "Si vous considérez qu’à peu près 70% des populations pauvres dans le monde dépendent de la nature pour vivre, il est évident qu’il est important de considérer ce capital au même titre que le capital humain ou le capital productif ", nous dit Christophe Roturier, en s’appuyant notamment sur les investigations de chercheurs qui ont estimé il y a quelques années que les services rendus par la nature représentaient  plus de 33 mille milliards de dollars, c'est-à-dire deux fois le PIB mondial.

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Consommer pour relancer la croissance ou préserver la planète ?

Cette équation impossible entre croissance et réduction de la consommation devient envisageable si on considère une croissance différente et si on consomme différemment, affirme WWF. "On sait très bien par exemple que consommer de la viande dégage beaucoup plus de gaz à effet de serre que de manger des légumes ", souligne Christophe Roturier, qui ne nous dit pas de ne plus manger de viande mais qui explique que réduire la consommation de viande dans les pays développés permettrait déjà d’avoir un effet positif sur la planète "dans la mesure où la consommation de viande nécessite dans certains pays, comme en Amérique du Sud, une production énorme de soja qui se fait au détriment de la forêt amazonienne, ce qui entraîne de la déforestation, qui crée elle-même des gaz à effet de serre... et on est dans le cercle infernal ", explique-t-il.

"Nous sommes tous dans le même bateau" 

Reste à savoir si tout le monde est prêt à faire les efforts nécessaires, à changer de comportement, à renoncer à certains luxes dont les autres profitent pourtant. Pour le directeur scientifique de WWF, la question ne se pose pas. On n’a plus le choix, affirme-t-il. "Nous sommes tous dans le même bateau et nous sommes forcés de coopérer parce que les dégâts qui sont faits à un endroit aujourd’hui concernent toute la planète ", explique-t-il, citant notamment le problème des gaz à effet de serre qui représentent plus de 50% de l’empreinte écologique de l’humanité produite par l'homme et qui sont notamment responsables du réchauffement climatique.

Depuis 1990, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont déjà augmenté de près de 40%, souligne WWF sur son site, et "les prévisions les plus alarmistes prévoient une augmentation de 6°C des températures d'ici 2050". D’autant plus préoccupant quand on sait qu'une hausse supérieure à  2°C  entraînerait "un emballement climatique irréversible", selon l’organisation écologiste.

 

  (© Anton Balazh - Fotolia.com)
 

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