Pour la première fois, la justice rejette une demande de suspension d'arrêtés anti-pesticides
Le tribunal adminsitratif de Cergy-Pontoise a rejeté la requête de la préfecture des Hauts-de-Seine qui demandait la suspension de deux arrêtés anti-pesticides.
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté en référé vendredi 8 novembre une demande de la préfecture des Hauts-de-Seine qui réclamait la suspension de deux arrêtés anti-pesticides à Gennevilliers et Sceaux. L'audience avait eu lieu le 29 octobre dernier. Les deux maires avaient défendu leurs arrêtés au nom de "la santé pour la population". Après cette décision en référé, les deux arrêtés pris au printemps doivent désormais être examinés au fond. Le tribunal décidera alors de l'annulation ou pas de ces arrêtés qui s'appliquent en attendant.
Cette décision du tribunal administratif est une première. Jusqu'à présent toutes les communes qui avaient pris des mesures similaires avaient vu leur arrêté suspendus. Le cas le plus emblématique est celui de Langouët. En prenant un arrêté antipesticides en mai dernier, le maire de cette commune bretonne avait lancé un vaste débat et fait des émules. Fin octobre, la justice avait tranché estimant que l'interdiction des produits phytosanitaires n'était pas de la compétence d'un maire.
Corinne Lepage "extrêmement heureuse"
"C'est une première et j'en suis extrêmement heureuse", a réagi l'avocate Corinne Lepage qui a représenté les deux communes dans cette affaire. "Le tribunal donne la compétence au maire pour agir" et interdire les pesticides sur sa commune, et "le tribunal considère sur le fond, dans la mesure où la dangerosité des produits est suffisamment établie, que le maire peut réglementer comme il l'a fait", explique l'avocate à franceinfo.
"Le maire a pu à bon droit considérer que les habitants étaient exposés à un danger grave justifiant qu'il prescrive les mesures" contenues dans son arrêté, et qui avaient été contestées devant la justice par la préfecture, ajoute Corinne Lepage.
A la lumière de cette décision, on va aller voir ce qu'il en est pour les communes rurales en s'appuyant sur cette jurisprudence.
Corinne Lepagesur franceinfo
Le juge des référés a donc rejeté les contestations de la préfecture "sur l'urgence", mais pas encore sur le fond. "Mais vu les motivations du référé, il va être rejeté sur le fond aussi", estime Corinne Lepage.
Aller "au-delà de la loi"
"Nous en sommes évidemment tout à fait heureux", mais "c'est une étape, naturellement", a réagi Philippe Laurent, maire de Sceaux, sur franceinfo. "Il faut attendre le jugement sur le fond, tempère-t-il. Il faut aussi attendre de savoir si l'État fera appel ou pas de cette décision en référé. Donc il y a encore énormément de travail."
"Je vois bien le débat permanent sur la compétence du maire", poursuit celui qui est également secrétaire général de l'Association des maires de France, et alors que le congrès de l'association doit avoir lieu dans une dizaine de jours. "Quelles sont les compétences du maire par rapport à l'Etat, jusqu'où le maire peut aller par rapport à la loi ? (...) Le juge, finalement, reconnaît d'une certaine manière à un maire la possibilité d'aller, non pas contre, mais au-delà de la loi, lorsqu'on estime qu'il y a danger pour la protection des populations".
Le débat est certainement un peu plus complexe en milieu rural qu'il ne l'est en milieu urbain
Philippe Laurentà franceinfo
Le maire de Sceaux note toutefois que les seuls arrêtés anti-pesticides validés l'ont été dans un milieu urbain. Le fait que les arrêtés municipaux cassés l'aient été dans des communes rurales "pourrait laisser penser" que l'agriculture est un frein à ce type d'arrêtés, estime-t-il. Entre les copropriétés et l'agriculture, "il n'y a pas le même enjeu économique, cela va de soi", poursuit Philippe Laurent. Quant à la RATP ou la SNCF, "ce sont des entreprises qui sont à même d'assumer la disparition totale de ces produits."
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