Sommet pour un nouveau pacte financier : "Nous avons déjà toutes les ressources nécessaires pour financer la transition" écologique, assure le rapporteur du Giec François Gemenne
"Nous avons déjà toutes les ressources nécessaires pour financer la transition" écologique, assure le rapporteur du Giec, enseignant à Sciences Po et à l’université de Liège, spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement François Gemenne, jeudi 22 juin sur franceinfo. Il estime que le "sommet pour un nouveau pacte financier" qui se tient jeudi et vendredi à Paris, "va dans le bon sens" et doit entamer la transition vers une "finance climat".
franceinfo : L'objectif affiché de ce sommet est de rénover en urgence l'architecture financière internationale pour répondre à de nouveaux besoins, notamment écologiques. Est-ce pour vous un but sain et réalisable ?
François Gemenne : C'est un objectif très important et j'irai même jusqu'à dire que c'est le nerf de la guerre. Le problème, évidemment, c'est que je ne pense pas qu'on va parvenir à réformer tout le système avec une réunion de 48 heures au Palais Brongniart. Il va falloir plus de temps que cela. Plus de chefs d'État réunis. Mais très clairement, ça va dans le bon sens et à l'évidence aujourd'hui, le système financier international ne permet pas de lutter efficacement contre le changement climatique, en particulier dans les pays du Sud. Or, il faut bien réaliser que notre futur climatique va largement dépendre des politiques qui seront mises en place dans les pays du Sud.
"Pour le moment, les pays du Sud n'ont pas les moyens ni d'actionner la transition énergétique ni de faire face aux impacts du changement climatique parce que les pays industrialisés leur promettent de l'argent mais ne mettent jamais l'argent sur la table, alors que les pays du Sud, par contre, continuent à devoir assumer le service de la dette."
François Gemenne, rapporteur du Giecsur franceinfo
D'autant que les pays du Sud sont les plus menacés par le réchauffement climatique ?
C'est la grande injustice fondamentale du changement climatique. Les pays du Sud et les pays les plus pauvres en particulier, ne portent quasiment aucune responsabilité dans le problème, mais sont les premiers exposés face aux impacts du changement climatique et de surcroît, ont beaucoup moins de ressources pour pouvoir s'adapter. Cette injustice doit être corrigée. Et la finance climat est une manière à la fois de corriger cette injustice, mais aussi de mobiliser les ressources qui permettront à ces pays du Sud d'engager leur transition énergétique.
Que peut-on attendre de ces deux jours ?
Je pense que l'on peut faire des progrès sur certains aspects. Notamment la question de la suspension des remboursements de la dette pour les pays du Sud lorsqu'ils sont touchés par une catastrophe climatique. C'est un résultat que l'on peut espérer. Et puis peut-être que l'on pourrait mobiliser certains moyens supplémentaires pour aider à la transition dans certains pays sur certains projets. Si on a déjà ça à l'issue des 48 heures, ce sera un résultat intéressant.
Comment convaincre suffisamment de pays et d'institutions comme le FMI ou la Banque mondiale de faire les efforts nécessaires pour atteindre ces objectifs ?
La meilleure manière de les faire bouger, c'est de réaliser que nous avons déjà, en réalité, toutes les ressources nécessaires pour financer la transition et pour financer les pertes et dommages. Le problème, c'est que ces ressources, pour le moment, ne sont pas allouées aux bons endroits.
"La Banque mondiale, la semaine dernière, a révélé que le montant des subventions directes aux énergies fossiles, à l'agro-industrie, et à la pêche industrielle dans le monde s'élève à 1 250 milliards de dollars par an. Si nous pouvions déjà réorienter une partie de ces subventions à la transition climatique, ce serait déjà un énorme pas en avant."
François Gemenne, rapporteur du Giecsur franceinfo
On a aujourd'hui des gouvernements qui cherchent désespérément à gratter des fonds de tiroirs à la recherche de fonds nouveaux, sans réaliser qu'ils mobilisent déjà énormément d'argent public contre la transition et contre le climat.
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