: Témoignages "Les producteurs de soja forcent les populations à quitter leur village" : des représentants des peuples autochtones du Brésil alertent sur la déforestation
Ils ont traversé l'océan Atlantique pour alerter sur la déforestation du Cerrado, une région du centre du Brésil bien moins connue que la forêt amazonienne. Des représentants des peuples autochtones étaient à Paris jeudi 14 mars, après Amsterdam et avant Bruxelles. Ils appellent l'Europe à agir davantage contre la déforestation causée par la production de soja, une catastrophe environnementale mais aussi sociale.
À plus de 9 000 km de chez lui, Dinaman Tuxa n'a pas abandonné sa coiffe à plume bleu, symbole de son peuple qu'il est venu défendre jusqu'à Paris. La production de soja détruit tout sur son passage, alerte ce responsable de "l'Articultation des peuples autochtones du Brésil". "Les conséquences sont catastrophiques, on parle d'écosystèmes complètement ravagés. Les producteurs de soja forcent les populations à quitter leur village pour étendre leurs cultures, décrit-il. Le peuple Guarani-Kaiowa par exemple : leur village a été complètement baigné de pesticides, les fleuves sont contaminés, les personnes aussi... De nombreuses femmes perdent leur bébé à cause de ces produits."
Et le phénomène s'aggrave : la déforestation a été en hausse de 40% l'an dernier au Cerrado. Boris Patentreger, directeur France de l'ONG Mighty Earth, s'en alarme."C'est quasiment la surface de Paris qui est déboisée pour du soja à proximité des négociants de soja qui exportent vers l'Europe, chaque mois", détaille-t-il.
La savane du Cerrado pas protégée par une future réglementation européenne
Dans ces conditions, la future réglementation européenne sur la déforestation a toute son importance. Le texte visera à l'interdiction d'importer des produits responsables de la destruction de forêt, entré en vigueur à la fin de l'année mais avec une exception de taille dans sa version actuelle. "C'est une super réglementation qui va avoir un impact énorme sur les forêts, mais la réglementation n'inclut pas les écosystèmes avec des arbres de moins de cinq mètres, ce qui est le cas de la savane du Cerrado", nuance le directeur France de l'ONG Mighty Earth.
"On a un gros trou dans la raquette avec l'exclusion du Cerrado. D'autant plus que c'est là où l'Union européenne et la France ont le plus d'impact."
Boris Patentreger, directeur France de l'ONG Mighty Earthà franceinfo
Car 60% du soja importé par la France vient du Brésil, selon l'ONG, principalement pour nourrir les élevages. Chacun a donc son rôle à jouer, même à l'autre bout du monde. C'est ce que demande Eliane Chouakalo, autre représentante des peuples autochtones : "Utilisez les réseaux sociaux qui sont une arme incroyable pour faire pression, parlez-en à vos élus, vos voisins, vos amis. Parlez-en la plus possible, voilà ce que vous pouvez faire." Le Cerrado doit devenir un symbole, ajoute Eliane Xunakalo, comme la forêt amazonienne. Cette dernière est désormais mieux protégée puisque la déforestation y a fondu de moitié l'an dernier, par rapport à 2022.
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