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Espagne : cinquième anniversaire du mouvement Indignados, du rêve à la réalité

Cinq ans que les Espagnols se sont «indignés» à Madrid et dans les autres grandes villes. Depuis, un parti politique, Podemos, est né et La Puerta Del Sol ne bruit plus d’indignation mais de rumeurs d'alliances et de dosages politiques. Podemos veut arriver au pouvoir le 26 juin et vient de se résoudre à s’allier avec son ancien adversaire, le «schtroumpf grognon» de la gauche, Izquierda Unida.
Article rédigé par Frédérique Harrus
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Alberto Garzon, leader d'Izquierda Unida, et Pablo Iglesias, leader de Podemos dans une rue de Madrid (Espagne), le 9 mai 2016. (Marcos del Mazo / citizenside)

La scène se veut emblématique. Pablo Iglesias et Alberto Garzon se sont donné une accolade le 10 mai 2016 sur la très symbolique Puerta del Sol, place de Madrid où était né il y a cinq ans le «mouvement des indignés contre l'austérité». Ce nom d'Indignés vient du petit livre du Français Stéphane Hessel Indignez-vous !, qui a remporté un grand succès en Espagne.

Des centaines de milliers de personnes s'étaient retrouvées sur la Puerta del Sol, mais aussi dans les grandes villes ibériques via les réseaux sociaux. De ce mouvement populaire est né le parti politique Podemos, ayant fait une percée spectaculaire aux législatives. Refusant tout compromis, à l'image des Indignés originels, les hommes de Podemos n'ont pas accepté de s'allier à quelqu'autre parti que ce soit, mieux, ils ont demandé des ministères importants, bloquant le jeu politique et provoquant de nouvelles élections législatives.

La vidéo a été postée sur les réseaux sociaux pour rassurer les Indignados qui refusent une victoire des socialistes du PSOE ou des conservateurs. Le chemin de la réconciliation était ardu. Il y a encore un an, Pablo Iglesias, 37 ans, qualifiait le parti Izquierda Unida (IU, écolo-communiste) de «schtroumpf grognon» qui portait malheur. Objectif : arriver en force pour les législatives du 26 juin.

 «Nous sommes convenus de l'essentiel: nous irons ensemble aux élections pour les remporter, et je m'attends à ce que nos militants comme ceux d'IU, réagissent à cette opportunité historique en participant avec enthousiasme», a déclaré le jeune chef de Podemos.
 
Pour le cinquième anniversaire de la naissance du mouvement des Indignés (15 mai 2011), la gauche extrême veut se présenter unie, après le constat que Podemos ne peut arriver à former un gouvernement seul. Le parti de Pablo Iglesias ne souhaite pas réitérer l’expérience des dernières législatives où il est apparu comme 3e force du pays, mais sans allié solide. D'autant qu'au sortir de ces premières élections législatives, Podemos a refusé toutes les propositions de ministère bloquant de fait la situation.

Juan M., monteur de 43 ans, le déplore: «Je me sens trahi, affirme-t-il au Monde. Les leaders de Podemos ont mis leur soif de pouvoir au-dessus de l’intérêt général. Ils se sont mis à dos tout l’arc parlementaire. Pablo Iglesias s’est montré immature, prétentieux et sectaire. Il aurait été plus logique qu’ils avancent petit à petit… »

Revirement idéologique ou real politik ? Podemos n’exclut plus pour gouverner de s’allier, en plus de l’IU (lien en espagnol), avec les socialistes «honnis». «Pour gouverner, nous aurons besoin du PSOE. Nous voulons un accord avec le PSOE», a assuré Pablo Iglesias.
 
Les élections de décembre 2015 avaient mis fin à la division traditionnelle du parlement en deux blocs, conservateur et socialiste, en faisant émerger Podemos et les libéraux de Ciudadanos. Mais ces quatre formations ont été incapables de former une coalition de gouvernement, obligeant les Espagnols à  retourner aux urnes le 26 juin.
 
Podemos et ses alliés avaient recueilli 5,18 millions de votes et 69 sièges, Izquierda Unida plus de 900.000 suffrages, mais deux sièges seulement. Tous les sondages réalisés depuis sont constants: les intentions de vote pour Podemos sont en baisse, à l'inverse de celles de IU en nette progression. L’alliance entre les deux partis peut créer une véritable surprise.
 
Quel bilan pour les Indignados ? La presse espagnole est partagée. Pour certains spécialistes, les Indignés ne le sont plus, revenus de la politique traditionnelle et déçus par les perspectives économiques. Pour d’autres, Podemos est parti pour durer même si les résultats des législatives ne se montrent pas à la hauteur de leurs ambitions

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