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"Avant, on était plus chaleureux, le capitalisme nous a rendus froids" : en Roumanie, des habitants restent nostalgiques de l'ère soviétique

Alors que l'Allemagne célèbre les 30 ans de la chute du mur de Berlin, "l'ostalgie" (la nostalgie de la période soviétique), est toujours à l'œuvre chez certains habitants de l'ex-bloc de l'Est.

Article rédigé par Louise Bodet - Édité par Noémie Bonnin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le Parlement à Bucarest, en Roumanie (illustration). (SIMON DAVAL / MAXPPP)

"Peu importe la météo, la pluie, la neige, rien ne peut nous empêcher d'y aller." Comme chaque année depuis 30 ans, Petre va fleurir la tombe du Conducator, Nicolae Ceausescu, qui a régné d'une main de fer sur la Roumanie entre 1965 et 1989.

Alors que Berlin célèbre la chute du mur, le 9 novembre 1989, il reste des habitants qui regrettent l'ère soviétique, sur fond de désenchantement économique et démocratique. "Ceux qui utilisent le mot dictateur, ce sont ses opposants, les ennemis du communisme", poursuit Petre.

Pour nous, la démocratie était bien plus aboutie dans le système socialiste que dans votre monde capitaliste.

Petre

à franceinfo

En Roumanie, le rideau de fer s'est brutalement abattu le soir de Noël 1989, quelques semaines après Berlin. Ceausescu est fusillé au terme d'un simulacre de procès, point final sanglant d'un règne despotique de 24 ans. Pendant toutes ces années, les Roumains ont vécu le pire : affamés, claquemurés, réprimés par la Securitate... Et pourtant, "l'ostalgie" est toujours à l'œuvre chez certains. Pas d'idéologie, mais de la nostalgie, explique cet habitant, au marché populaire d'Obor : "Depuis la révolution, tout a changé et en mal. Avant, on se parlait autrement, on était plus chaleureux. Le capitalisme nous a rendus plus froids." Une dame acquiesce : "Du temps de Ceausescu, un retraité pouvait faire quelques provisions pour l'hiver : un sac de patates, un sac d'oignons, de haricots... Maintenant, on ne peut plus, car on ne peut plus payer."

Beaucoup de Roumains regrettent cette période, surtout les retraités. Aujourd'hui on ne peut pas vivre avec la pension qu'on a.

Une retraitée roumaine

à franceinfo

L'ère soviétique avait un côté rassurant pour ces habitants, décrypte Adrian Cioroianu, historien, ancien ministre, aujourd'hui ambassadeur à l'Unesco : "C'est la nostalgie d'une période qui semblait être plus prédictible, plus tranquille. Il y a vraiment des gens qui pensent que tout se passe trop vite aujourd'hui."

Cette nostalgie reste toutefois minoritaire et illustre une fracture générationnelle, dans un pays où la jeunesse aspire à l'exil : un Roumain sur quatre âgé de moins de 40 ans vit aujourd’hui hors de Roumanie.

Berlin : franceinfo fait le mur

À l'occasion des 30 ans de la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989, franceinfo vous propose une série de reportages, entre souvenirs insolites et immersion dans l'Allemagne d'aujourd'hui.

- "Je me suis dit, ils se sont fait voler leur révolution !" : quand la chute du mur de Berlin laissait les militants communistes pantois

- "Moi, j'ai pleuré devant le mur de Berlin" : il y a 30 ans, des Français partent en Allemagne pour assister à la chute du mur

- "Qui sait me dire quel était le régime politique en RDA ?" : pour ces lycéens berlinois, l'Allemagne d'avant la chute du mur paraît bien loin

- "J'ai toujours espéré que ce mur tombe avant ma mort" : Jamila, fille d'une mère Est-allemande et d'un père palestinien, aimerait voir un autre mur tomber

- VIDEO. Il a franchi le rideau de fer suspendu à une ligne à haute tension : plus de 30 ans après, Robert raconte son passage à l'Ouest

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