L’Allemagne se reconfine : "Tout le pays est en train de couler et nous, on va toucher le fond"
L’Allemagne va fermer mercredi ses commerces "non-essentiels" et ses écoles et ce, jusqu’au 10 janvier, pour tenter d’infléchir "la croissance exponentielle" des infections au Covid avant les fêtes de fin d’année. L'État de Saxe est le plus touché par la pandémie.
Il n’y a guère que les cloches des églises ou de ce temple protestant, la Frauenkirche, pour briser le silence qui a envahi Meissen, une ville de 30 000 habitants située en Saxe, à l’est de l’Allemagne. C’est l’État le plus touché par la résurgence du Covid-19 qui touche durement le pays qui avait été relativement épargné jusqu’ici par la pandémie. Le nombre de nouvelles infections et de morts a atteint ces derniers jours des records poussant la chancelière Angela Merkel à prendre dimanche des mesures de reconfinement du pays pour trois semaines et demi. Du 24 au 26 décembre, seules les rencontres entre membres de la très proche famille seront autorisées.
En ce troisième dimanche de l’Avent, la Frauenkirche est le seul lieu un peu fréquenté à Meissen, qui permet à Brigita, une retraitée, de sortir de son confinement : "Ça va mal en ce moment, très mal, dit-elle. On a plusieurs cas positifs dans la famille. Encore un nouveau hier. Oui, c’est dur."
"J’avais devant moi ce matin des parents qui venaient de perdre leur fils de 39 ans, et ils n’étaient pas les seuls dans ce cas, raconte Bernd Oehler, pasteur de la Frauenkirche depuis 21 ans. Il y a des destins difficiles en ce moment. Mais je leur dis : le plus important, c’est de voir les choses en gardant l’espoir et de ne surtout pas lâcher. J’ai des gens qui viennent se plaindre parce qu’il leur est insupportable de porter un masque... C’est un comportement indigne !"
La Saxe est un bastion de l’extrême-droite AfD, qui a réalisé à Meissen parmi ses meilleurs résultats électoraux. Et l’AfD soutient les nombreuses manifestations anti-masques. "Il y a un lien évident, je le vois aussi ici, poursuit le pasteur Oehler. Vous savez ils doivent bien représenter 20% des paroissiens. Il y a un ressentiment qui se développe, de plus en plus."
"On cherche à nous terroriser"
La Saxe compte sept des 15 plus gros foyers de l’épidémie en Allemagne. C’est le cas de ce district de Meissen où l’incidence est trois fois plus élevée que la moyenne nationale. Ici, les habitants sont déjà confinés depuis huit jours. Et désormais les commerces "non-essentiels" doivent baisser le rideau. "Tout le pays est en train de couler et nous on va toucher le fond", commente Michael, un fleuriste dégoûté.
Plus loin, deux voisines Cora et Annette font leur balade du dimanche, insouciantes. Aucune d’elles ne porte le masque. "C’est logique que les infections augmentent, on teste cinq fois plus de monde. Mais la réalité c’est qu’il y en a autant qu’avant, analyse Annette. Et puis, en novembre ou décembre, on a toujours une vague de grippe ou un rhume, une angine. Mais là, rien. Il n’y a que le coronavirus. Ce n’est rien d’autre qu’une grippe. Et on l’oubliera vite", affirme-t-elle. "Les gens ont changé. Avec le coronavirus, ils sont devenus tellement agressifs et égoïstes. L’empathie, il n’y en a plus dans la société, ajoute sa voisine Cora, aussi pétrie de certitudes. On cherche à nous terroriser. On crée la panique dans les têtes".
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