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Attentats à Bruxelles : "La collaboration internationale pour lutter contre le terrorisme doit encore progresser"

Bruxelles a été frappée mardi 22 mars par plusieurs attentats terroristes qui ont touché l'aéroport international et une station de métro. Un chercheur belge analyse la façon dont la Belgique peut réagir à ces attaques.

Article rédigé par Violaine Jaussent - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Devant l'aéroport de Bruxelles (Belgique), touché par deux explosions le 22 mars 2016. (CHRISTIAN NEYT / BELGA MAG / AFP)

Il était 8 heures environ lorsque deux explosions ont retenti à l'aéroport de Bruxelles, mardi 22 mars. L'une a été "probablement provoquée par un kamikaze", a annoncé le procureur fédéral belge. Une demi-heure plus tard, une autre explosion s'est produite à la station de métro Maelbeek, dans le quartier européen de la capitale. Au total, au moins une trentaine de personnes sont mortes.

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Pourquoi Bruxelles est-elle la cible d'attaques aujourd'hui ? Comment la Belgique peut-elle lutter contre le terrorisme ? Pour le savoir, francetv info a interrogé David Stans, maître de conférences à l'université de Liège et docteur en sciences politiques. 

Francetv info : Bruxelles était-elle visée depuis longtemps, ou bien les terroristes ont-il agi en représailles de l'arrestation de Salah Abdeslam, soupçonné d'être impliqué dans les attentats du 13 novembre à Paris ?

David Stans : Nous sommes dans une phase post-attentats, donc il faut être prudent sur toute interprétation hâtive. Est-ce que cela a un lien avec Salah Abdeslam ? On ne peut pas encore le dire. Il est vrai que Najim Laachraoui, l'artificier des attentats de Paris, est toujours en fuite. Mais la coordination de telles attaques est difficile. Impossible de croire que cela a été préparé en une semaine ou quelques jours. L'arrestation de Salah Abdeslam a pu jouer le rôle de déclencheur.

Avant que cela ne se produise, Bruxelles était clairement visée. Depuis un an et demi, les services de sécurité sont particulièrement visés. Je rappelle qu'en janvier 2015, une quinzaine de personnes ont été interpellées à Verviers car elles étaient soupçonnées de préparer des attentats contre les forces de police. 

Les contrôles ont donc été renforcés. Mais il existe encore des cellules actives en Belgique, plus ou moins autonomes. Malheureusement, il faut souvent qu'un attentat se produise pour qu'on sache précisément d'où vient la menace.

Quelles conséquences peuvent avoir ces attentats pour la Belgique ? Le gouvernement va-t-il instaurer un état d'urgence, avec des mesures semblables à la France ?

L'alerte antiterroriste a été relevée à son niveau maximal pour tout le pays, le niveau 4, qui symbolise une menace "sérieuse et imminente". La sécurité vient d'être renforcée dans tous les transports à Bruxelles. L'aéroport international et les gares ont été évacués et la surveillance "renforcée" dans les centrales nucléaires de toute la Belgique. Car il existe la crainte d'une réplique.

Toutefois, on ne peut pas tomber dans l'ultra-sécuritaire. En Belgique, on ne connaît pas encore l'état d'urgence tel qu'il existe en France. Aujourd'hui, la durée légale de la garde à vue est de 24 heures. La discussion pour l'étendre à 72 heures dans les affaires de terrorisme est encore en cours au Parlement. Peut-être qu'après ces attentats, cette mesure sera définitivement prise.

On était en pleine discussion face aux mesures à prendre, contre ceux qui sont soupçonnés de se rendre en Syrie, contre la radicalisation et la déradicalisation — des mots que je n'apprécie pas vraiment, d'ailleurs. Il n'y a pas de définition commune pour ces termes, donc il y a des difficultés pour régler le problème.

On débat aussi de la surveillance avec des bracelets électroniques. Mais il faut pouvoir assurer le suivi budgétaire pour tout cela. Des efforts financiers doivent être faits. Jusqu'ici, la culture du renseignement est trop réactive et pas assez pro-active. Mais cela change.

Comment la Belgique peut-elle coopérer avec ses voisins européens pour lutter contre le terrorisme ?

La Belgique ne peut pas se passer d'une collaboration internationale pour lutter contre le terrorisme, du fait de sa position géographique, centrale en Europe, et des institutions européennes sur place. La collaboration avec les services étrangers, et français en premier lieu, fait déjà l'objet d'un travail énorme. L'arrestation de Salah Abdeslam le montre. Mais il est vrai qu'au niveau international, cela doit encore progresser.

Toutefois, il ne faut pas tomber dans les travers d'un Etat policier, car ce serait entrer dans le jeu des terroristes. Dans cette guerre asymétrique, on ne peut pas poser des barbelés à toutes les frontières. Les pays doivent respecter les normes et les droits de l'Homme. Au niveau européen, il va donc falloir développer des liens multilatéraux et trouver des standards communs pour parvenir à une meilleure collaboration.

Les cibles choisies par le terrorisme sont symboliques et l'impact sur la population est réel. Mais la Belgique doit faire son deuil, puis prendre des décisions de manière posée. La coopération internationale doit se définir de façon réfléchie, sur le long terme.

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