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Brexit : la communauté polonaise de Grande-Bretagne sous pression après le vote

Depuis le vote du Brexit jeudi dernier, les agressions à l'encontre de la communauté polonaise se sont multipliées au Royaume-Uni. Très nombreux en Grande-Bretagne, les Polonais s'inquiètent d'être pointés du doigt. Reportage à Slough, banlieue populaire de Londres.
Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Les Polonais, qui constituent la plus grosse communauté d'immigrés européens en Grande-Bretagne, s'inquiètent du vote du Brexit © France info/ Sandrine Etoa-Andegue)

L’immigration, notamment européenne, a été l’argument phare des Brexiters. Depuis l’adhésion de la Pologne à l’UE en 2004, les Polonais forment aujourd'hui la communauté immigrée la plus représentée au Royaume-Uni, derrière les Indiens. Après le vote de jeudi dernier, les attaques contre eux se sont multipliées en Grande-Bretagne: agression physique, centre culturel vandalisé... 

A Slough, banlieue populaire de l'Ouest de Londres et ville multiculturelle, une quinzaine de nationalités sont représentées et vivent dans une relative harmonie. Mais contre toute attente, près de 54% de la population a voté en faveur du Brexit. Ce résultat inquiète la grande communauté polonaise qui se sent de plus en plus montrée du doigt.

"Je ne vois pas ma vie ailleurs que dans ce pays"

Chantant à en perdre haleine, en rouge et blanc et bouteilles à la main, des supporters aux couleurs de la Pologne paradent en terrain conquis dans l’artère principale de Slough. Leur équipe vient de se qualifier en quarts de finale de l’Euro pour la première fois de son histoire. "Le football…ça ne nous intéresse pas " lâchent Cacha et Daria. Les deux mamans discutent devant une épicerie polonaise où elles ont acheté quelques produits du pays, rangés sous leurs poussettes. "On parle du vote, de cette situation, explique l'une d'entre elles. J’habite ici depuis 7 ans, mes enfants sont nés ici, pas moi donc je ne peux pas voter. Je suis vraiment triste. C’est le début des problèmes. On est tous inquiets. On travaille dans ce pays, mon anglais n’est pas génial mais je continue d’apprendre. S'ils veulent quitter l’UE, ça veut dire qu’ils ne veulent plus de nous ici."

Une affiche en faveur du "In"  est encore placardée sur la vitrine de la boutique où "la nourriture, la viande, les fruits et légumes et même les employés... tout est polonais " comme l'explique la vendeuse. Près des caisses Pawoe attend son tour. A 18 ans, il a voté pour la première fois et le résultat dans sa ville, où il habite depuis l’âge de 8 ans, est une claque. "Slough est une ville multiculturelle , maintient-t-il. Les gens viennent de partout : Asie, Europe de l’Est… Moi je suis né en Pologne et j’ai émigré ici il y a 10 ans avec ma mère. Je ne vois pas ma vie ailleurs que dans ce pays, j’aimerais rentrer dans l’armée anglaise, mon avenir est ici."   Mais il est fatigué d’entendre toujours les mêmes discours ; "On me répète souvent que les travailleurs polonais volent le travail des anglais. C’est vrai dans un sens, mais c’est parce que les polonais travaillent dur. Et ils prennent les boulots que les anglais refusent, comme le ménage par exemple. Nous, on le fait."

 

" Des Polonais, il y en a trop "

Dans la ville de 140 000 habitants, quand vous évoquez la communauté polonaise, on vous répond souvent qu' "il y en a trop ". Tina, elle, formule ça autrement :  "J’étais pour le Brexit donc je suis contente. Il y a un problème avec les gens de ce pays qui reçoivent des allocations familiales. Si la Pologne n’en donne pas à ses ressortissants et qu’ils débarquent ici juste pour pouvoir en percevoir et renvoyer cet argent dans leur pays ça ne va pas. Bon je ne mettrais pas ma main à couper... Mais c’est ce qu’on m’a dit " explique-t-elle ."Vous savez je ne suis pas raciste, je viens d’Asie , poursuit-elle. Je suis arrivée ici à l’âge de 5 ans. Mais mes parents ont dû travailler, travailler dur, on ne leur a pas fait cadeau."

Pour deux retraités pro-Brexit présents dans le quartier, il faut carrément revoir la liberté de circulation des citoyens européens au Royaume-Uni. "Notre île est surpeuplée, ça n’a rien à voir avec du racisme, c’est un fait, s 'insurgent-ils. On ne peut pas héberger et prendre soin de tout le monde. Notre système santé, l’un des meilleurs à une époque, va s’effondrer. C’est déjà le cas, notre système est à bout de souffle, trop de gens en bénéficient." 

Quand on lui répète ça, Eden secoue la tête. Pour lui, ces discours traduisent l’angoisse d’une ancienne génération qui voit sa ville changer. "Les britanniques de souche ont vu un changement radical de la population ces dix dernières années, analyse-t-il. La ville est devenue très multiculturelle, c’est un changement énorme . Et je pense que les plus âgés ont voulu exprimer leur nostalgie par leur vote. La jeune génération, elle, s’est  parfaitement adaptée à cette évolution. L’importante diversité de cette ville, moi je trouve ça beau."

Les Polonais stigmatisés en Angleterre après le Brexit. Reportage à Slough, dans la banlieue de Londres de Sandrine Etoa-Andegue pour France Info
 

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