Conservateurs et libéraux démocrates ont présenté mercredi l'équipe et les principaux objectifs du nouveau gouvernement
Après 13 ans de pouvoir travailliste, le chef de file du Parti conservateur, David Cameron, forme un gouvernement avec les libéraux-démocrates qui prennent cinq portefeuilles et a nommé leur numéro un, Nick Clegg, vice-Premier ministre.
La tâche essentielle du premier gouvernement de coalition depuis 1945 sera de résorber un déficit public record.
Le poste stratégique de chancelier de l'Echiquier a été le premier pourvu mardi soir, confié à un ami et allié proche de David Cameron, George Osborne, 38 ans. "Il va y avoir une accélération conséquente de la réduction du déficit budgétaire", a déclaré ce dernier à la presse.
L'eurosceptique William Hague, 49 ans, a été nommé aux Affaires étrangères.
Un gouvernement "réformateur et radical"
Le nouveau Premier ministre David Cameron a pris mardi soir la tête d'une coalition gouvernementale après être parvenu à un accord de partage du pouvoir avec les libéraux-démocrates de Nick Clegg nommé vice-Premier ministre. Le même soir, le Premier ministre sortant Gordon Brown a présenté sa démission à la reine qui l'a acceptée.
Les marchés financiers ont salué l'accord conclu entre les deux camps, faisant porter leurs espoirs sur ce gouvernement de centre droit susceptible à leurs yeux de prendre rapidement des mesures pour réduire les dettes du pays.
Le nouveau gouvernement britannique hérite d'un déficit budgétaire record de plus de 11% du produit intérieur brut.
La coalition a adopté le plan des Tories qui prévoit de réduire cette année les dépenses publiques de six milliards de livres. Les "Lib Dems" plaidaient pour une réduction plus tardive.
"Aucun gouvernement des temps modernes ne s'est jamais trouvé face à un héritage économique aussi désastreux", a déclaré David Cameron lors d'une conférence de presse conjointe mercredi avec Nick Clegg .
"Nous savons qu'il y aura des décisions difficiles à prendre", a-t-il ajouté. Nick Clegg a dit pour sa part que le gouvernement serait "réformateur et radical" et "source de stabilité".
Des concessions ont été faites dans les deux camps
L'entrée des conservateurs et libéraux à Downing Street met fin à treize ans de gouvernements travaillistes, dont près de trois sous Gordon Brown, qui avait succédé à Tony Blair en juin 2007 sans passer par les urnes. Il s'agit également de la première coalition depuis 70 ans.
Arrivés en troisième position aux législatives de jeudi dernier, les Lib Dems étaient courtisés à la fois par les conservateurs, victorieux du scrutin mais sans réussir à dégager une majorité absolue, et les travaillistes, deuxièmes du scrutin.
Après de longues tractations, conservateurs et libéraux démocrates ont mis au point un programme fait de concessions. Les Tories ont accepté de renoncer au relèvement du seuil des droits de succession à un million de livres, les libéraux démocrates estimant que cette mesure ne profiterait qu'aux plus riches.
Autre concession de taille accordée par le camp tory, la mise en place d'une réforme électorale via un référendum sur un système à la proportionnelle, auquel les Tories ont toujours été farouchement opposés.
De leur côté, les "Lib Dems" ont accepté de renoncer à leurs exigences concernant l'Union européenne. Le nouveau gouvernement ne rejoindra pas la zone euro. Nick Clegg, européen convaincu, a estimé que ce n'était pas le moment. En matière d'immigration, il a accepté une limitation annuelle d'immigrés issus des pays.
Première coalition en Grande-Bretagne depuis 1945
David Cameron, qui à 43 ans devient le plus jeune Premier ministre en près de 200 ans, succède à Gordon Brown. Le leader travailliste a démissionné après avoir constaté son incapacité à conserver le pouvoir, mettant fin à treize ans de règne du Labour.
Nick Clegg, dont le parti avait été promu au rang de faiseur de gouvernement à l'issue des élections législatives du 6 mai, devient n°2 du gouvernement dans le cadre de cet accord, qui réserve au total cinq portefeuilles au Lib Dem.
Les députés libéraux-démocrates ont approuvé l'accord passé avec les Tories aux premières heures mercredi, levant le dernier obstacle à la formation du premier gouvernement de coalition en Grande-Bretagne depuis 1945.
Premier discours de Cameron devant le 10, Downing Street
Le chef de file libéral-démocrate "Nick Clegg et moi-même sommes tous deux des dirigeants politiques souhaitant mettre de côté nos différences et travailler dur pour le bien commun et l'intérêt national", a déclaré David Cameron s'exprimant pour la première fois devant la porte noire du 10, Downing Street, bureau londonien du Premier ministre. "Je crois que c'est le meilleur moyen d'avoir le gouvernement fort dont nous avons besoin".
Annonçant des "décisions difficiles" conformément à son programme électoral d'austérité, le nouveau chef du gouvernement a cependant promis de ne pas oublier "les personnes âgées, les personnes en situation de précarité et les plus pauvres de notre pays", dans des accents marqués par le "conservatisme compatissant" dont il a fait sa marque de fabrique.
Peu avant, David Cameron était apparu en direct sur les télévisions du pays, franchissant dans sa Jaguar blindée les grilles du palais de Buckingham, résidence londonienne de la reine. Accompagné de son épouse Samantha enceinte, vêtue d'une robe bleu nuit, le chef de file Tory a sollicité d'Elizabeth II l'autorisation de former le prochain gouvernement. Il a refranchi les grilles du palais environ 25 minutes plus tard, fort de l'assentiment royal et devenu officiellement Premier ministre.
Juste avant, le Premier ministre sortant Gordon Brown avait fait le même voyage, pour remettre sa démission à la souveraine. Il est resté environ 20 mn au Palais de Buckingham. Peu après, le Palais a annoncé avoir accepté sa démission.
Gordon Brown avait annoncé sa décision de quitter ses fonctions un peu plus tôt, très ému, sur le perron du 10, Downing Street, aux côtés de son épouse, après l'échec des négociations entre le parti travailliste et les libéraux-démocrates. Les bureaux de Gordon Brown ont en effet reconnu mardi que les pourparlers, qui avaient débuté lundi soir, n'avaient pas abouti et qu'ils n'aboutiraient jamais.
Sarkozy à Londres le 18 juin
Nicolas Sarkozy rencontrera le nouveau Premier ministre britannique David Cameron le 18 juin à Londres, à l'occasion d'une visite pour commémorer les 70 ans de l'appel du général de Gaulle, a annoncé mercredi le 10 Downing Street. Le président français et le Premier ministre britannique se sont entretenus par téléphone de la situation économique mondiale et ont fait savoir qu'ils souhaitaient vivement travailler ensemble au sein de l'Union européenne, du G8, du G20 et des Nations unies, a ajouté un porte-parole du gouvernement britannique.
Le président français avait présenté la veille au soir "ses vives félicitations" à David Cameron, "espérant pouvoir travailler avec lui au renforcement de la coopération très étroite et des liens exceptionnels tissés entre la France et le Royaume-Uni".
De son côté, le président américain Barack Obama a invité David Cameron à venir a Washington et lui a rappelé son "profond attachement personnel à la relation spéciale entre nos deux pays - un lien qui persiste depuis des générations et au-delà des clivages partisans, et qui est essentiel à la sécurité et à la prospérité de nos deux pays et du monde".
La chancelière allemande Angela Merkel a également félicité M. Cameron, l'invitant à Berlin "à la première occasion".
Gordon Brown démissionne du Labour et fait son mea culpa
Après avoir quitté le Palais de Buckingham, Gordon Brown s'est rendu au quartier général du parti travailliste et s'est adressé aux militants pour endosser la responsabilité complète de la défaite du Labour aux élections législatives du 6 mai, qui ont débouché sur la fin de 13 ans de pouvoir Labour.
"Je dois accepter, et souligner, que c'est ma faute, et que je vais en porter seul la responsabilité", a indiqué Gordon Brown, remerciant les militants et les candidats pour leurs efforts.
Son parti travailliste a terminé deuxième des élections législatives, derrière les conservateurs de David Cameron qui n'a pas obtenu de majorité absolue.
M. Brown a désigné Harriet Harman, qui était son adjointe à la tête du parti, nouveau leader par intérim du parti travailliste, avant de s'envoler pour l'Ecosse. M. Brown avait annoncé lundi qu'il démissionnerait de la tête du Labour d'ici à l'automne, dans l'espoir de persuader les libéraux-démocrates (Lib Dems) de former une coalition de gouvernement avec son parti.
Mais les négociations entre le Labour et les Lib Dems ont échoué mardi, ouvrant la voie à un accord de gouvernement entre Tories et Lib Dems.
Gordon Brown, qui a pris la succession de Tony Blair en 2007 sans passer par la case élection, après avoir été ministre des Finances dix années durant, avait survécu à plusieurs putschs au sein de son parti, le Labour. Depuis plusieurs jours, des voix s'élevaient pour exiger sa démission.
Milliband candidat à la succession de Brown au Labour
Mercredi soir, le ministre des Affaires étrangères sortant, David Milliband, 44 ans, a annoncé sa candidature à la tête du Labour en remplacement de Gordon Brown. Il est le favori des "bookmakers" pour reprendre les rênes du parti, qui passe dans l'opposition pour la première fois depuis 13 ans. Le Labour devrait tenir une élection pour désigner son nouveau leader avant l'automne.
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