Dans les années 80, le pape Benoît XVI a traîné des pieds pour défroquer un prêtre californien accusé de pédophilie
Des lettres échangées entre le Vatican et le diocèse californien d'Oakland décrivent les "libertés sexuelles" prises en 1978 par le père Stephen Kiesle avec "six adolescents âgés de 11 à 13 ans", des faits reconnus par l'intéressé devant la justice.
A sa propre demande, le père Kiesle avait demandé à être défroqué sans être entendu par le Vatican.
Un futur pape soucieux du "bien de l'Eglise universelle"
Le Vatican répondit qu'il souhaitait obtenir des informations supplémentaires sur l'affaire. Elles furent envoyées par l'évêque d'Oakland, John Cummins en février 1982 au cardinal Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI, alors à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
L'évêque écrivait dans son courrier qu'il avait la "conviction" que défroquer le père Kiesle "ne ferait pas scandale", ajoutant: "ce serait un scandale plus grand pour la communauté si le père Kiesle retrouvait son ministère".
Malgré les demandes répétées du diocèse d'Oakland, il faudra attendre le 6 novembre 1985 pour que Joseph Ratzinger réponde à John Cummings.
Dans cette réponse, rédigée en latin, le cardinal reconnaît la "gravité" de la situation mais se montre réticent à prendre une décision immédiate, soucieux des effets qu'elle pourrait avoir sur "le bien de l'Eglise Universelle". Pour le futur pape, l'affaire doit faire l'objet "d'une attention particulière, qui nécessite beaucoup de temps".
A la lecture de cette lettre, le père George Mockel, du diocèse d'Oakland, avait estimé que le Vatican "allait s'asseoir sur l'affaire jusqu'à ce que Steve (Kiesle) devienne un peu plus âgé. Je pense que c'est regrettable".
Défroqué cinq ans après sa demande
Le père Kiesle fut finalement défroqué en 1987. Selon l'avocat du père Kiesle, Jeff Anderson, un an plus tard, il travailla pendant huit mois comme coordinateur des activités pour les jeunes dans la paroisse californienne de Pinole.
Un porte-parole du Vatican, Ciro Benedettini, a assuré vendredi à l'agence Ansa que "l'alors cardinal Joseph Ratzinger n'a pas couvert le cas, comme il est clairement compréhensible en lisant la lettre, mais il a fait état de la nécessité d'étudier le cas avec une attention majeure, en ayant présent à l'esprit le bien de toutes les personnes impliquées".
Interrogé par l'AFP, Jeff Anderson affirme que les documents montrent de façon "incontestable que le cardinal Ratzinger et le Vatican ont étouffé et continuellement nié" les affaires de pédophilie au sein de l'Eglise.
Des scandales pédophiles
L'Eglise est secouée ces dernières semaines par une série de scandales pédophiles, accusée d'avoir gardé le silence sur des abus commis par des prêtres ou des religieux. Benoît XVI lui-même a été éclaboussé par ces scandales, accusé d'avoir couvert les abus quand il était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
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