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Delphine Baya : «Partir était une très lourde responsabilité»

Ce 21 septembre 1981, ils sont nombreux à venir soutenir la jeune Delphine à l'aéroport de Brazzaville. Son pays s'appelle encore la République populaire du Congo et le plan quinquennal alors en vigueur impose aux meilleurs élèves d'aller étudier à l'étranger. Certains iront en URSS, pour d'autres, comme Mme Baya, ce sera la France.
Article rédigé par Hervé Pozzo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Professeur d'Histoire et de Français Mme Delphine Baya enseigne à Decines (69) (HP/FTV)

C'est une perruque comme on en voit rarement. Côté droit, les vert, jaune et noir du Congo-Brazzaville; côté gauche, les bleu, blanc et rouge du drapeau français. Tout un symbole : celui de l'attachement à ses origines et à son pays d'adoption.

L'histoire commence à Madingo-Kayes, un petit village des environs de Pointe-Noire, seconde ville du pays. C'est la télévision et la radio qui annoncent les résultats du baccalauréat. Le statut de la jeune femme change à cet instant.

Dès lors, elle est déstinée à devenir un des cadres de la nation et, au titre du plan quinquennal imposé par le Parti congolais du travail, elle devra revenir au pays à la fin de ses études.

Jusqu'à son départ, une douce folie va s'emparer de sa communauté. Les propositions d'aides, financières pour la plupart, abondent.
Pendant les deux mois qui précéderont son départ, tous les matins, elle devra réviser ses gammes au ministère de la Jeunesse et des Sports. «Nous étions les ambassadeurs du Congo et à ce titre nous devions représenter dignement notre pays, on nous expliquait ce que nous pouvions faire, ce qui nous était interdit...»

Familles, amis et inconnus vont réunir une forte somme d'argent, des poissons séchés, des sacs de riz ou des couvertures pour son départ vers ce pays «du froid et de la faim»

Au depart, il y avait une certaine curiosité à aller voir ce qu'est un pays «impérialiste» car, depuis longtemps, tous les matins, la radio fustigeait «la France, l'impérialisme et ses valets».

Une négociation s'engage entre les autorités et son grand-père. Ce dernier veut des asurances : sa petite-fille ne partira que si elle est acceuillie au sein d'une famillle d'accueil et suivie par un prêtre. Des engagements tenus.
«J'en pleure encore, tant de gens comptaient sur moi; c'était une très lourde responsabilité !»

Même si au grand dam d'esprits chagrins elle chante dans le bus, même si le premier escalator est effrayant, même si les réflexions sont parfois peu amènes, Mme Baya s'adapte et poursuit son but : aider son pays.
«Les étudiant français étaient étonnés : je leur disais que j'étudiais pour mon pays, eux me répondaient que je devais d'abord penser à moi !»

A son retour, elle enseignera l'archivistique dans les facultés de son pays, mais aussi au Niger, au Gabon, en Mauritanie et au Sénégal. Elle reviendra ensuite en France, faisant des allers et retours entre Lyon et la Sarthe, «son petit coin de paradis».

Avec d'autres, elle recueillera des fonds pour développer son village, y installera une halte-garderie, une salle polyvalente, renovera l'hôpital.
Une manière pour elle de tenir des engagements pris au sortir de l'adolescence.


Depuis longtemps Delphine Baya milite pour le rapprochement entre les peuples. En septembre 2009 elle organise à Lyon une manifestation qui entend rassembler les communautés étrangères. Un mot d'ordre : chacun doit posséder deux drapeaux. Celui de son pays et le drapeau français. Des associations, des collégiens et des lycéens répondront présents. 



Lors de ce tournage Delphine Baya donnait un cours sur les religions. La plupart des élèves de sixième du collège de Décines semblaient receptifs. 




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