Détachement des travailleurs, dernier coup de rein
La directive date en fait de 1996, au siècle dernier. Elle établissait les conditions de détachement dans un pays membre de salariés venus d’une entreprise d’un autre Etat. Et déjà, il s’agissait de protéger et le salarié détaché et d’éviter un certain nombre de distorsions de concurrence. Il fallait donc assurer dans le pays d’accueil les mêmes conditions salariales, Salaire minimum quant il existait ou salaires assurés en fonction des qualifications en cas d’accord collectif. Enfin les conditions de travail devaient êtres les mêmes pour tous. En revanche, le régime de protection social restait celui du pays d’origine. Cotisations salariales et cotisations patronales.
Le pourquoi de la révision
Essentiellement pour deux raisons. Avec dans de nombreux pays des cotisations patronales bien moins élevées et avec l’arrivée des pays nouveaux entrants, la distorsion était évidente en matière de coût du travail. Et cela concernait de nombreux secteurs, bâtiment, agroalimentaire par exemple. Mais le problème de base était sans doute la trop grande perméabilité du texte. De grands principes, mais des lacunes. Beaucoup ont compris très vite qu’en installant une simple société boite à lettres dans un des états où les cotisations étaient peu élevées, on pouvait largement influer sur les prix, les devis. Et remporter les marchés au nez et à la barbe des entreprises locales. Un raisonnement que tenaient aussi certaines entreprises utilisant des sous-traitants. Et c’est ainsi, aussi qu’après le spectre du plombier polonais est arrivé le « détaché « de l’Est, si possible maçon. Une nouvelle source de fantasme, certains bons esprits allant jusqu’à réveiller le fantôme de la directive Bolkestein pourtant elle aussi largement revue, amendée et corrigée. Une révision du texte de 1996 s’avérait donc nécessaire à la fois pour des raisons économiques et pour des raisons politiques.
Le nouveau texte
Les négociations pour obtenir cette révision ont été ardues. En gros, deux camps s’affrontaient. Les adeptes de dispositions vraiment contraignantes, France et Allemagne en tête, et ceux adeptes de contrôles à minima, le Royaume Uni ou la Pologne. Il aura fallu des accords discrets et bilatéraux d’abord entre la France et la Pologne puis d’ultimes négociations pour aboutir à ce qui est logiquement un compromis en décembre 2013. Alors quelles sont les avancées ?
Les pays européens vont coopérer pour éviter les fraudes avec au départ une définition commune du travailleur détaché. De même des informations doivent être échangées pour prouver la réalité de l’activité des prestataires. Une manière d’éviter les entreprises coquilles vides ou simple boîte aux lettres.. Les donneurs d’ordre sur un chantier devront vérifier les pratiques de leurs sous-traitants et seront responsables en cas de fraude. C’est là l’un des points forts de la nouvelle mouture du texte.
Pas satisfaisant pour tout le monde
Ce texte est incontestablement un plus par rapport à l’ancienne directive. Mais on a pas profité du problème pour régler au fond la question du marché du travail en Europe. Et tout les eurodéputés ne voteront pas ce texte. Il augure en revanche des nouvelles batailles qui vont opposer les partisans d’une Europe régulée à ceux qui défendent un fonctionnement très libéral de l’économie européenne. Salaire minimum partout, harmonisation sociale et fiscale, le chantier est énorme. Et il est encore devant nous.
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