Suède : une ville entière déménage pour ne pas être engloutie dans une mine
A force de grandir, l'exploitation du plus grand gisement de fer du monde a grignoté le sous-sol de cette ville. Pour éviter l'effondrement des bâtiments, Kiruna et ses 18 000 habitants vont être déplacés de 3 km.
La ville de Kiruna, située dans le cercle polaire arctique en Suède, est en danger. Pour permettre l'extension d'une mine de fer sous son sol, qui pourrait entraîner son effondrement, elle va devoir être entièrement reconstruite 3 km plus loin, à l'est de son emplacement actuel. Le projet, initié en juin, est prévu pour s'achever à l'horizon 2100, a détaillé France Info mardi 28 octobre.
Dès 2033, les zones les plus menacées devraient être évacuées, poursuit The Guardian.com (en anglais). Le tout afin de relever progressivement un défi unique : la migration des 18 000 habitants.
Kiruna 4-ever - How to Move a City? from whitearkitekter on Vimeo.
Déménager ou disparaître
Les habitants de Kiruna, située à dix-sept heures de train au nord de Stockholm, n'ont pas vraiment le choix. Son histoire est inextricablement liée à la mine qu'elle jouxte : elle a été entièrement bâtie pour accueillir les mineurs chargés d'explorer cet incroyable gisement de fer, le plus important du monde.
Mais au début du XXe siècle, qui aurait soupçonné que ce dernier s'étendait sous la ville ? Aujourd'hui, l'extension de la mine est devenue inévitable et c'est la compagnie qui l'exploite qui passe logiquement à la caisse. Elle a mis 400 millions d'euros sur la table pour sauver à la fois la ville et son exploitation du fer. "Soit les mineurs arrêtent de creuser, et la ville sera frappée par un chômage de masse, soit la ville se déplace, ou du moins, subit d'importantes dégradations", explique au Guardian l'architecte Krisfer Lindstedt, dont le cabinet White architect est chargé de ce chantier "biblique". Car la compagnie minière emploie aujourd'hui près de 2 100 personnes à Kiruna.
"Les habitants ont mis leur vie entre parenthèses"
Kiruna porte déjà les stigmates de ces coups de pioches sous-terrains, qui affaiblissent son sol. "Des fissures apparaissent année après année en surface, expliquait Slate.fr, en 2011. Si le centre de la ville est pour l'instant épargné, les escaliers géologiques, déjà visibles dans les quartiers vidés à proximité de la mine entre les années 1960 et 1980, donnent le ton de ce qui adviendra du centre-ville si aucune décision n'était prise."
Ainsi, dès 2004, la compagnie exploitante, la LKAB, avait déjà prévenu la municipalité du funeste destin qui l'attendait. Et depuis, "les habitants ont mis leur vie entre parenthèses, incapables de prendre de grandes décisions, telles qu'acheter une maison", explique au Guardian l'anthropologiste Victoria Walldin.
Reconstruire, mais en mieux
Pour faire passer son projet pharaonique, "la LKAB a proposé de racheter aux habitants leurs biens immobiliers 25% plus cher que la valeur du marché, afin de leur revendre ensuite une propriété dans la nouvelle cité", explique La Tribune.fr. Dans la vidéo de présentation du projet, les intervenants louent une initiative "démocratique", censée respecter le bien-être des habitants, soucieux de ne pas perdre ce qui fait le charme de leur ville, comme l'église en bois couleur rouille datant de 1912 ("jadis élue plus bel édifice de Suède", précise le site du quotidien britannique) ou encore sa mairie. Ainsi, plusieurs bâtiments emblématiques seront reconstruits à l'identique.
Pour ce qui est du reste de la ville : "On crée ce qui manque aujourd'hui aux gens, comme les places publiques, explique à France Info Mikael Stenqvist, architecte en charge du projet. On réinvente leur ville, mais on la rend plus fonctionnelle, plus agréable. C'est pour ça aussi que les gens soutiennent le projet et qu'ils attendent avec impatience leur nouvelle ville." L'ancienne, elle, sera de toute façon engloutie.
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