Législatives contestées en Géorgie : après avoir dénoncé des fraudes, la présidente Salomé Zourabichvili refuse de s'expliquer devant le procureur

La dirigeante avait dénoncé une fraude électorale massive et contesté les résultats du scrutin remporté par le parti Rêve géorgien, accusé par ses opposants de dérive autoritaire et russophile.
Article rédigé par franceinfo
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La présidente géorgienne Salomé Zourabichvili prend la parole devant le Parlement, le 28 octobre, lors d'une vaste manifestation pour contester la victoire du parti Rêve géorgien aux législatives. (DAVIT KACHKACHISHVILI / AGENCE ANADOLU VIA AFP)

Elle n'a "aucune intention" de se rendre dans le bureau du procureur. La présidente géorgienne Salomé Zourabichvili, qui a dénoncé des fraudes électorales lors des dernières élections législatives dans le pays, a annoncé, mercredi 30 octobre, qu'elle rejetait une convocation de la justice à ce sujet. La cheffe d'Etat "serait en possession d'indices prouvant la possible falsification des élections législatives", écrit le bureau du procureur général dans son communiqué, semblant donc lui réclamer des comptes, alors que le parquet a ouvert une enquête sur ces soupçons de fraude électorale.

L'ouverture de cette enquête a été déclenchée sur la base des déclarations prononcées la veille par la commission électorale centrale. Celle-ci avait dénoncé, dans un communiqué, une "campagne d’informations manipulatrices et infondées visant à induire en erreur les électeurs" et rejeté en bloc les accusations de fraude pensant sur le scrutin, en citant trois affaires.

La coalition My Vote, qui regroupe une trentaine d'associations, a pourtant relevé des irrégularités dans la plupart des bureaux de vote où elle comptait des observateurs, dont certains ont témoigné auprès de franceinfo. Le parti Rêve géorgien, partisan d'une normalisation des relations avec la Russie et accusé de dérive autoritaire, l'a emporté devant les oppositions proeuropéennes.

Le parquet géorgien promet de mener "toutes les actions d'enquête et de procédure nécessaires pour étudier les faits évoqués dans la déclaration de la commission électorale", ajoute le bureau du procureur général, "ainsi que ceux mentionnés par la présidente de la Géorgie, certains partis politiques et les représentants des missions d'observation électorale". En parallèle, un nouveau comptage des voix a été ordonné dans 14% des bureaux de vote, sélectionnés au hasard. Il est en cours depuis mardi midi, sans qu'on en connaisse les résultats pour l'instant.

Une figure en rupture avec le gouvernement

"Le régime de [l'oligarque Bidzina] Ivanishvili a clairement indiqué qu'il n'allait pas enquêter de manière significative sur les fraudes électorales", commente David Zedelashvili, professeur de droit constitutionnel à Tbilissi et chercheur associé à l'institut de recherche Gnomon Wise.

"Cette démarche n'a qu'un seul but : des manœuvres de représailles et d'intimidation contre la présidente Salomé Zourabichvili, motivées par des considérations politiques."

David Zedelashvili, professeur de droit constitutionnel

à franceinfo

La présidente géorgienne a un pouvoir essentiellement symbolique, mais elle a dénoncé à plusieurs reprises les textes adoptés par le parti Rêve géorgien – notamment sur les "agents de l'étranger" et sur la "propagande LGBT".

A Tbilissi, lundi soir, elle avait encore pris la parole devant des milliers de manifestants, depuis les marches du Parlement. Le constitutionnaliste analyse cette convocation comme une punition, visant in fine à obtenir le départ de la dirigeante, en rupture avec le gouvernement. "Avant même les élections, le régime a entamé une deuxième procédure de destitution contre la présidente, promettant de la démettre de ses fonctions et de la condamner", rappelle-t-il. Et hier, "l'ancien président russe Dmitri Medvedev a demandé l'arrestation de Salomé Zourabichvili, ce qui explique la rapidité avec laquelle le régime mandataire de la Russie à Tbilissi agit selon les souhaits de ses maîtres russes".

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