Brexit : l'accord entre l'Union européenne et le Royaume-Uni "n'est pas acquis"
Alors que les députés britanniques ont déclenché le Brexit, Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes, détaille mardi les prochaines étapes de la procédure. Selon lui, un accord entre l'UE et le Royaume-Uni n'est pas garanti.
Les députés britanniques ont voté lundi 13 mars le projet de loi autorisant le gouvernement britannique à déclencher le Brexit. La Chambre des Lords, après les députés, a adopté le texte sans l'amender. La Première ministre britannique, Theresa May, va maintenant pouvoir déclencher la procédure prévue par l'article 50 du Traité de Lisbonne, préalable aux négociations à une sortie de l'Union européenne.
Patrick Martin-Genier, enseignant à Sciences Po et spécialiste des questions européennes, assure, mardi 14 mars sur franceinfo, que l'accord entre l'Union Européenne et le Royaume-Uni n'est pas garanti. En cause : des positions divergentes au sein du gouvernement britannique et entre pays de l'UE.
franceinfo : Quelles sont les prochaines étapes, comment Theresa May va-t-elle enclencher cette procédure de sortie ?
Patrick Martin-Genier : D'ici la fin du mois, Theresa May va écrire officiellement un courrier au Conseil européen pour l'informer qu'elle a décidé d'enclencher le processus de sortie de l'Union européenne. Elle va probablement laisser passer les élections aux Pays-Bas, extrêmement sensibles en ce moment. Dès que le Conseil européen sera officiellement informé, il devra se réunir de façon extraordinaire début avril pour acter de la décision de la Grande-Bretagne (ndlr : en réalité, le Royaume-Uni). Dans un premier temps, il devra faire part de sa propre position. Il y aura ensuite une période de deux ans pour négocier une sortie avec, ou pas, un accord. Aujourd'hui, il y a un débat important au Royaume-Uni car il y a la perspective qu'il n'y ait pas d'accord compte tenu des positions divergentes au sein du gouvernement. Une telle possibilité serait extrêmement difficile pour le Royaume-Uni, pour les entreprises et pour les citoyens. Rien n'est acquis.
Qu'est-ce qui pourrait bloquer ? ll y a notamment cette facture de 50 à 60 milliards d'euros que l'UE pourrait réclamer. À quoi correspond cette somme ?
La Grande-Bretagne a souscrit à un budget sur une période qui est de six ans, de 2014 à 2020. Ce sont des budgets sur lesquels ils se sont déjà engagés. Par conséquent, ils participent aux différentes politiques européennes. D'ailleurs, ils reçoivent de l'argent et participent à des réalisations d'infrastructures. Ils participent aux régimes et retraite des fonctionnaires de l'UE. Les Britanniques se sont engagés financièrement. S'ils se retirent en 2019, il y a une partie de cet argent qui doit être remboursé, car il y aura un trou dans le budget de l'Union européenne.
En face, comment les Européens vont-ils se présenter à ces négociations. Vont-ils rester unis face à Londres ?
Pour l'instant, l'Union européenne fait bloc. Le député européen Michel Barnier, qui fait le tour des capitales européennes avec ses collaborateurs pour rencontrer les Premiers ministres, l'a dit : il y a un front uni vis-à-vis de la Grande-Bretagne, mais il y a aussi des divergences, de plus en plus importantes, avec des pays comme la Pologne, la Roumanie, la Hongrie qui pourraient avoir une vision plus souple que l'ensemble des autres pays de l'UE. Il y a une période de deux ans qui va s'ouvrir, une période très longue durant laquelle il n'est pas garanti que l'unité de l'Union européenne demeure. Les élections à venir peuvent aussi changer la donne. Il faudrait éviter que Madame May enclenche l'article 50 en pleine élection aux Pays-Bas. Il y a des élections en France et en Allemagne qui sont de nature à perturber le calendrier.
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