Brexit : le Royaume-Uni "a perdu la capacité à diviser l'Europe sur laquelle elle comptait pour négocier"
La Première ministre du Royaume-Uni, Theresa May, lance mercredi le processus historique de sortie de l'Union européenne. Un défi majeur dont les conséquences peuvent être "difficiles pour tout le monde", selon Florence Faucher, professeur à Science Po.
Neuf mois après le vote pour Brexit, voté par 52% de la population le 23 juin 2016, le Royaume-Uni lance mercredi 29 mars le processus historique de sortie de l'Union européenne qu'il avait rejointe il y a 44 ans. L'annonce sera faite par la Première ministre Theresa May devant les députés du parlement de Westminster à la mi-journée. Cela ouvrira deux ans de difficiles négociations pour couper les amarres au printemps 2019.
Florence Faucher, professeur à Science Po au Centre d'études européennes, a estimé mercredi sur franceinfo que "les droits des citoyens européens installés au Royaume-Uni et des Britanniques installés en Europe vont être un des points de départ" des négociations. Pour elle, les conséquences du Brexit peuvent être "difficiles pour tout le monde".
franceinfo : Ces négociations qui vont durer deux ans. Par quoi vont-elles commencer ?
Florence Faucher : On espère que cette lettre va clarifier la position du Royaume-Uni et puis les Européens vont se réunir et décider exactement comment ils répondent. Il y a un sommet européen de prévu. (...) Si cette lettre offre quelques premières pistes, on pourrait commencer par ça.
Il y a tellement de choses à négocier qu'on pourrait commencer par n'importe quel bout.
Florence Faucherà franceinfo
Il est clair que les droits des citoyens européens installés au Royaume-Uni et des Britanniques installés en Europe vont être un des points de départ.
Quels secteurs de la négociation pourraient poser problème dans ce long processus ?
Beaucoup de secteurs sont dans le brouillard, il y a bien sûr la City mais aussi l'agriculture. Il y a tous les secteurs qui sont très dépendants de main-d'oeuvre européenne qualifiée ou non qualifiée, en particulier l'agriculture qui va perdre à la fois des subventions européennes mais aussi une main-d'œuvre bon marché dont elle est très dépendante. Ce sont des secteurs qui ont voté massivement, en particulier au Pays de Galles, pour quitter l'UE avec l'espoir que le budget économisé sur la contribution du Royaume-Uni à l'Union européenne leur sera reversé. Ce qui ne semble pas être la direction dans laquelle on s'oriente.
Le Royaume-Uni a perdu potentiellement un certain nombre de ses alliés en janvier quand elle a fait une sortie un peu rude en déclarant que 'pas d'accord était mieux qu'un mauvais accord'.
Florence Faucherà franceinfo
Et en particulier en maintenant des positions extrêmement fermes contre l'immigration, en proposant des droits différentiels pour les pays de l'Est, en particulier la Pologne, qui aurait pu dans un premier temps avoir des sympathies pour les Britanniques. Le Royaume-Uni a perdu la capacité à diviser l'Europe sur laquelle elle comptait pour négocier.
Après le Brexit et avec le refus des Pays-Bas de voter en faveur du populisme, n'assiste-t-on pas à un retour du sentiment européen ?
C'est ce qu'on peut espérer. L'Europe a toujours rebondi, avancé sur ses crises et il s'agit là d'une grosse crise. Quelque chose d'assez traumatique dont les conséquences sont très difficiles à imaginer... En même temps, on sait que cela peut être dur pour tout le monde. C'est une des raisons qui peut expliquer que les pays européens se ressoudent et que la désunion qui aurait pu être favorable au Royaume-Uni ne se produit probablement pas. L'Europe a envie d'être unie pour éviter une désagrégation.
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