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Licences de pêche post-Brexit : à Ramsgate, la lassitude et le ressentiment anti-français des pêcheurs anglais

Le ministre du Brexit, David Frost, rencontre jeudi à Paris Clément Beaune, secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, pour tenter de mettre fin au conflit qui oppose les deux pays sur la pêche. À Ramsgate, un port du sud-est de l’Angleterre, les pêcheurs anglais confient leurs doutes et leur lassitude.

Article rédigé par Richard Place
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
John Nichols, le président de l’association locale de pêcheurs. (RICHARD PLACE / RADIO FRANCE)

Il pourrait s’agir d’une réunion décisive sur le conflit qui oppose la France au Royaume-Uni sur le sujet de la pêche. Le ministre du Brexit, David Frost, rencontre Clément Beaune, secrétaire d’État aux Affaires européennes, jeudi 4 novembre à Paris. La France espère obtenir davantage de licences de pêche pour ses bateaux dans les eaux britanniques.

>> Licences de pêche post-Brexit : on vous explique la nouvelle passe d'armes entre la France et le Royaume-Uni

Dans l’attente de ce rendez-vous, la France a suspendu les mesures de rétorsion pour les pêcheurs du Royaume. À Ramsgate, un port du sud-est de l’Angleterre, les pêcheurs interrogés secouent la tête, dégoûtés, quand on évoque la réunion du jour, la France ou même le Brexit. Pourtant, ici, tous, ou presque, ont voté pour la sortie de l’Europe. C’est le cas de John Nichols, le président de l’association locale de pêche, qui a mal vécu les joutes politiques de ces derniers jours.

"Nous ne sommes pas là pour nous amuser. Nous aussi, nous pouvons être des têtes brûlées si l’on veut. Macron est à la traîne dans les sondages pour la présidentielle, alors il veut à tout prix faire des histoires."

John Nichols, président de l’association locale de pêche

à franceinfo

John Nichols en a après la France mais il est déçu aussi de son propre gouvernement. En sortant de l’Europe, il espérait retrouver la splendeur d’antan, quand une trentaine de chalutiers revenaient remplis de soles et de bars. Accoudé à une rambarde sur le port, Tony, qui a connu cette époque, observe essentiellement des navires de plaisance désormais, contre seulement une dizaine de bateaux de pêche. "Quand j’étais gamin, il y en avait plein ici, soupire le pêcheur. Grâce au Brexit, nos pêcheurs devraient pouvoir faire comme ils veulent. Ils auraient de quoi travailler. Les Français n’ont plus besoin de venir ici. Certainement pas." Ici les pêcheurs ne suivront pas la réunion du jour. Ils ont, disent-il, mieux à faire : ils seront en mer.

Le gouvernement anglais campe sur sa ligne

Sur le terrain les pêcheurs britanniques semblent abattus, ne faisant plus confiance à personne dans cette affaire. Côté gouvernement, la ligne britannique est toujours la même : "Nous avons respecté les règles de l’accord de sortie de l’Europe à la lettre. Nous avons accordé des licences de pêche quand les documents nécessaires étaient présentés." Et enfin : "La France doit lever ses menaces." D’ailleurs, quand Emmanuel Macron a repoussé l’entrée en vigueur des mesures de rétorsion, ils y ont vu une petite victoire, présentée comme un recul de la France dans une affaire où l’orgueil prend une place importante.

Voilà au moins pour le discours de façade : puisque les négociations continuent, sans doute qu’en coulisses, les émissaires du gouvernement Johnson se montrent plus arrangeants. Si aucun accord n’est trouvé, Paris dira non aux pêcheurs britanniques, qui ne pourront pas décharger leur cargaison en France, leur plus gros client, 28% du chiffre d’affaires. Le Royaume-Uni, quant à lui, menace de durcir les contrôles des bateaux français.

A Ramsgate, la lassitude et le ressentiment anti-français des pêcheurs anglais - le reportage de Richard Place

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