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Les Croates «sont fatigués» de l’Europe
La Croatie est membre de l’UE depuis juillet 2013. Pour Ranko Stojanac, journaliste au bureau de Rijeka (troisième ville du pays) de la télévision publique HRT, ses compatriotes en ont assez d’un processus d’adhésion commencé en 2005.
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«Pour les élections qui ont désigné nos 12 représentants provisoires à Bruxelles (ils ne seront plus que 11 à partir de 2014, NDLR), il n’y a eu que 20 % de participation. Un peu plus tard, la participation aux élections locales s’est élevée à 37 %. Cela situe le problème !», analyse Ranko Stojanac.
Pourtant, le 22 janvier 2012, les deux tiers des électeurs croates avaient approuvé par référendum l’entrée de leur pays dans l’UE. Mais aujourd’hui, «ils en ont assez». Assez d’avoir à prouver qu’ils sont pleinement européens, après un long processus d’adhésion. «Nous formons naturellement partie du Vieux continent. Napoléon est venu chez nous. Nous avons appartenu à l’Empire austro-hongrois», rappelle le journaliste. Mais malgré son émancipation du communisme, malgré la fin de la guerre avec la Serbie (1991-1995), il leur a fallu patienter de nombreuses années pour intégrer l’Union.
«Au départ, nous pensions que notre adhésion serait très rapide. Mais nous avons dû patienter et nous adapter : nous avons changé nos lois, lutté contre la corruption, coupé les subventions à nos chantiers navals. Aujourd’hui, nous sommes fatigués. Fatigués de la crise. Et de l’Europe».
Dans ce contexte, nombreux sont ceux qui prêtent l’oreille aux voix nationalistes et eurosceptiques, particulièrement fortes dans l’est du pays, région durement touchée par la guerre il y a deux décennies. Ces voix répètent que le processus européen va entraîner la perte de l’indépendance du pays et ses industries. Parallèlement, on constate l’émergence d’un sentiment populiste : «Certains pensent que les députés au Parlement de Strasbourg sont trop payés avec l’argent de nos impôts». Dans le même temps, le message européen passerait mal en raison d’un manque de pédagogie de la part des milieux politiques.
Pour autant, pense le journaliste, la majorité des Croates ne sont pas opposés à l’Europe. Ils se montrent plutôt indifférents. «Les esprits ouverts savent que l’Europe est la seule solution. Ils voyagent et comparent notre situation avec celle de nos voisins serbes et bosniaques, qui ne sont pas membres de l’Europe. Ils constatent ainsi que notre niveau de vie est deux fois plus élevé qu’en Serbie et trois fois plus qu’en Bosnie».
Dans le même temps, ses compatriotes ne sont pas dupes, pense Ranko Stojanac. Et de préciser, quelque peu cynique : «Bruxelles nous incite à combattre la corruption. C’est très bien. Mais cela se fait aussi pour le plus grand profit des investisseurs européens. Chez nous, on dit que si l’on veut faire du business en Europe, il faut graisser la patte à une ou deux personnes. En Croatie, il faut le faire auprès de dix personnes !». La lutte anti-corruption est donc tout bénéfice pour les investisseurs venus d’ailleurs dans l’UE…
Pourtant, le 22 janvier 2012, les deux tiers des électeurs croates avaient approuvé par référendum l’entrée de leur pays dans l’UE. Mais aujourd’hui, «ils en ont assez». Assez d’avoir à prouver qu’ils sont pleinement européens, après un long processus d’adhésion. «Nous formons naturellement partie du Vieux continent. Napoléon est venu chez nous. Nous avons appartenu à l’Empire austro-hongrois», rappelle le journaliste. Mais malgré son émancipation du communisme, malgré la fin de la guerre avec la Serbie (1991-1995), il leur a fallu patienter de nombreuses années pour intégrer l’Union.
«Au départ, nous pensions que notre adhésion serait très rapide. Mais nous avons dû patienter et nous adapter : nous avons changé nos lois, lutté contre la corruption, coupé les subventions à nos chantiers navals. Aujourd’hui, nous sommes fatigués. Fatigués de la crise. Et de l’Europe».
Dans ce contexte, nombreux sont ceux qui prêtent l’oreille aux voix nationalistes et eurosceptiques, particulièrement fortes dans l’est du pays, région durement touchée par la guerre il y a deux décennies. Ces voix répètent que le processus européen va entraîner la perte de l’indépendance du pays et ses industries. Parallèlement, on constate l’émergence d’un sentiment populiste : «Certains pensent que les députés au Parlement de Strasbourg sont trop payés avec l’argent de nos impôts». Dans le même temps, le message européen passerait mal en raison d’un manque de pédagogie de la part des milieux politiques.
Pour autant, pense le journaliste, la majorité des Croates ne sont pas opposés à l’Europe. Ils se montrent plutôt indifférents. «Les esprits ouverts savent que l’Europe est la seule solution. Ils voyagent et comparent notre situation avec celle de nos voisins serbes et bosniaques, qui ne sont pas membres de l’Europe. Ils constatent ainsi que notre niveau de vie est deux fois plus élevé qu’en Serbie et trois fois plus qu’en Bosnie».
Dans le même temps, ses compatriotes ne sont pas dupes, pense Ranko Stojanac. Et de préciser, quelque peu cynique : «Bruxelles nous incite à combattre la corruption. C’est très bien. Mais cela se fait aussi pour le plus grand profit des investisseurs européens. Chez nous, on dit que si l’on veut faire du business en Europe, il faut graisser la patte à une ou deux personnes. En Croatie, il faut le faire auprès de dix personnes !». La lutte anti-corruption est donc tout bénéfice pour les investisseurs venus d’ailleurs dans l’UE…
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