Cet article date de plus d'un an.

Accord sur les céréales : "Cette tension que Poutine crée est une manière de détourner l'attention", pour un ancien officier de l'Armée française

La Russie a annoncé, samedi 29 octobre, qu'elle suspendait sa participation à cet accord conclu en juillet pour éviter une famine dans de nombreux pays dépendant de la production de céréales venue d'Ukraine.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un navire céréalier dans le port d'Odessa (Ukraine), le 21 octobre 2022. (YULII ZOZULIA / NURPHOTO / AFP)

"Cette tension que Vladimir Poutine crée autour des céréales est une manière de détourner l'attention", a expliqué samedi 29 octobre sur franceinfo Guillaume Ancel, ancien officier de l'Armée française, écrivain et auteur du blog "Ne pas subir". La Russie suspend sa participation à l'accord sur les exportations de céréales depuis l'Ukraine. Cette décision a été prise après l'attaque d'une flotte russe samedi matin dans le port de Sébastopol, en Crimée.

>> Guerre en Ukraine : les États-Unis accusent la Russie de se servir de l'alimentation "comme une arme" après son retrait de l'accord sur les céréales

franceinfo : Ces dernières semaines, Vladimir Poutine a été très critique envers cet accord qui expire dans un peu plus de quinze jours. Est-ce qu'il utilise l'attaque comme un prétexte ?

Guillaume Ancel : Clairement. Cela fait plusieurs jours que l'on a des doutes sur la volonté des Russes de maintenir cet accord. Depuis dix jours, ils mettent sur la table des accusations contre les Ukrainiens qui, selon eux, veulent utiliser une bombe sale. On se demande où ils veulent en venir puisqu'ils n'ont aucune preuve et que cela n'a aucun sens. Depuis deux semaines, les Russes ont lancé des vagues d'attaque avec des centaines de missiles et de drones contre des cibles civiles en Ukraine. L'élément le plus important est la bataille autour de Kherson que les Russes sont en train de perdre. Ils ont tout pillé avant de partir, même jusqu'aux médicaments. Il faut voir dans cette tension que Vladimir Poutine crée autour des céréales une manière de détourner l'attention alors que, en réalité, ce sont les opérations militaires autour de Kherson qui sont structurantes dans l'évolution de la crise en Ukraine.

Est-ce que cela pourrait être un prétexte pour lancer des nouvelles frappes sur les ports de la mer Noire ?

C'est possible. Les Russes n'ont plus besoin de prétexte pour frapper n'importe où. On sait qu'ils ont abîmé entre un tiers et 40 % du système électrique ukrainien afin de mettre la population dans un désarroi total. Les Russes sont rentrés dans une guerre totale contre les Ukrainiens et tout ce qu'ils font en termes de propagande est juste inquiétant. On sait que c'est le prélude à une vague d'attaques supplémentaires. Je pense qu'il va y avoir des attaques très violentes sur toutes les villes qui sont proches de la zone de front.

Cet accord est-il un levier de pression ?

Très clairement. Il est fort probable que Vladimir Poutine espère un round de négociations pour pouvoir conserver une partie de ce qu'il a conquis illégalement en Ukraine. Il sait que le temps joue contre lui puisqu'il n'arrive pas à stopper les Ukrainiens. Son armée est laminée, elle perd sur tous les fronts. Donc, s'il arrivait à négocier maintenant un accord de paix, il aurait une chance de faire croire qu'il a gagné quelque chose en Ukraine. Si le temps court, il risque un échec total voire une débâcle. C'est cela qu'il veut empêcher.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.