Crise ukrainienne : l'effort diplomatique patine alors que les discussions avec Paris et Berlin n'ont produit "aucun résultat", selon Moscou
Plusieurs séries de pourparlers ces derniers jours n'ont pas permis de progresser pour résoudre cette crise. Plus que jamais, la menace d'une offensive russe sur l'Ukraine est d'actualité.
Neuf heures et demie de pourparlers et peu de résultats. Les discussions ayant réuni jeudi 10 février, à Berlin, la Russie, l'Ukraine, l'Allemagne et la France pour tenter de trouver une issue à la crise ukrainienne n'ont produit "aucun résultat", a déploré vendredi 11 février le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Ces discussions ont eu lieu alors que la Russie, qui a massé plus de 100 000 soldats aux portes de l'Ukraine, est accusée de préparer une nouvelle opération militaire contre ce pays, des accusations rejetées par Moscou qui affirme vouloir assurer sa sécurité face à l'hostilité de Kiev et de l'Otan.
Dans ce contexte, les représentants des quatre pays, réunis depuis 2014 dans un format de discussions dit de Normandie, consacré au processus de paix dans l'est de l'Ukraine, ont multiplié ces dernières semaines les efforts diplomatiques pour aboutir à un apaisement. Retour sur une série des tentatives peu fructueuses.
Des discussions "difficiles"
"Nous sommes tous devenus témoins que la réunion des conseillers politiques sous le format 'Normandie' n'a abouti hier à aucun résultat", a déclaré en conférence de presse le porte-parole du Kremlin. Il a déploré l'"incapacité" des différents représentants à lire "de la même manière" les accords de paix de Minsk, signés en 2015 dans le but de mettre fin au conflit en Ukraine, qui a fait plus de 13 000 morts depuis son déclenchement il y a huit ans, selon l'ONU. "Nous n'avons pas pu nous accorder sur un document commun", a déclaré pour sa part le négociateur ukrainien Andriï Iermak, le chef de l'administration présidentielle ukrainienne. Mais "nous allons continuer à travailler", a-t-il ajouté.
"Les discussions ont été difficiles et ont permis de mettre clairement en évidence les différentes positions et les différentes options de solution", ont fait savoir à l'AFP des sources proches des négociateurs français et allemands. "Il a été convenu de se rencontrer à nouveau après les prochaines réunions du groupe de contact trilatéral en mars", a fait savoir le gouvernement allemand.
"Nous ne voyons toujours aucun signe de désescalade dans la situation actuelle et nous le regrettons vivement", a regretté vendredi le porte-parole du gouvernement allemand Steffen Hebestreit. Le chancelier allemand Olaf Scholz se rendra par ailleurs en Ukraine lundi, avant d'aller mardi à Moscou, comme l'a fait avant lui Emmanuel Macron.
Les Etats-Unis sceptiques sur les avancées diplomatiques
En début de semaine, le président français s'est rendu à Moscou, où il a rencontré son homologue russe, Vladimir Poutine, pour tenter de désamorcer la crise. L'Ukraine avait alors salué de "vraies chances" de désescalade et l'Allemagne des "progrès". Un concert d'optimisme prudent auquel n'a pas souhaité se joindre les Etats-Unis. Washington laissant ainsi filtrer son scepticisme sur les potentielles "avancées" accueillies avec soulagement par les Européens.
Jeudi, le président des Etats-Unis, Joe Biden, a appelé ses concitoyens à quitter immédiatement l'Ukraine. "Les choses pourraient vite s'emballer", a mis en garde le président américain dans une interview à la chaîne NBC. Il a répété qu'il n'enverrait pas de soldats sur le terrain en Ukraine, même pour évacuer des Américains dans l'hypothèse d'une invasion russe, car cela pourrait déclencher "une guerre mondiale". "Quand les Américains et les Russes commencent à se tirer dessus, nous sommes dans un monde très différent", a-t-il affirmé. "Les citoyens américains devraient partir, ils devraient partir maintenant. Nous avons affaire à l'une des plus grandes armées du monde", a plaidé le président en référence à l'armée russe.
Des "signes très troublants d'une escalade russe"
La Russie mène depuis jeudi des manœuvres d'envergure en Biélorussie, voisin de l'Ukraine. Le lendemain, Moscou a annoncé d'autres entraînements aux "missions de combat" dans la région frontalière russe de Rostov, avec des centaines de soldats et des chars. Par ailleurs, la marine russe conduit des manœuvres en mer Noire, dont l'Ukraine est aussi riveraine.
Depuis Melbourne (Australie), le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a quant à lui estimé qu'il voyait "des signes très troublants d'une escalade russe". "Nous sommes dans une période où une invasion pourrait commencer à tout moment, et pour être clair, cela inclut les Jeux olympiques", a-t-il déclaré, balayant les spéculations selon lesquelles Moscou attendrait la fin des Jeux de Pékin, qui s'achèvent le 20 février, pour éviter de faire de l'ombre à son allié chinois.
Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a quant à lui de nouveau mis en garde vendredi contre le "risque réel d'un nouveau conflit armé" en Europe, à l'occasion de la visite d'une base militaire roumaine clé pour l'Alliance. "Le nombre de troupes russes augmente tandis que les délais d'avertissement diminuent", a-t-il averti. "Dans le même temps, il n'y a pas de certitude, et donc nous continuons d'appeler la Russie à une désescalade et à s'engager dans un dialogue politique avec l'Otan", a ajouté le chef de l'Alliance.
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