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Guerre en Ukraine : aux portes de l'Union européenne, les exilés attendent des heures de pouvoir fuir le pays

Des dizaines de milliers d'Ukrainiens fuient leur pays depuis jeudi et le début de l'invasion russe. Cet exode massif provoque de gros embouteillages aux postes-frontières.

Article rédigé par Nicolas Teillard, Mathilde Dehimi - édité par Clémentine Vergnaud
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Au poste frontière de Siret entre l'Ukraine et la Roumanie, vendredi 25 février.  (MATHILDE DEHIMI / RADIO FRANCE)

Durant les deux premiers jours de l'offensive militaire russe en Ukraine, 50 000 personnes ont quitté le pays, a annoncé vendredi 25 février sur franceinfo Filippo Grandi, haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés. Ces mouvements d'exode se sont poursuivis samedi, notamment aux frontières polonaises et roumaines. Massifs, ils provoquent des embouteillages monstres entre l'Ukraine et l'Union européenne et rendent la progression des exilés très difficile. 

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Ainsi, la route vers la Pologne est particulièrement chaotique. "J'ai parcouru un kilomètre en cinq heures", raconte ainsi Nicolas Teillard, journaliste de franceinfo présent en Ukraine et qui tente de rejoindre la Pologne. Parti samedi matin de Lviv, la grande ville de l'ouest de l'Ukraine, dernière métropole avant l'Europe et la Pologne, il a pu rouler une trentaine de kilomètres avant de devoir s'arrêter à 20 kilomètres de la frontière. En fin d'après-midi, il était toujours complètement bloqué par une colonne ininterrompue de voitures. 

"J'ai des voitures à perte de vue : devant moi, derrière moi, sur plusieurs files, de manière totalement désordonnée", décrit-il. Ce véritable amas de véhicules est hétéroclite : bus, camions, voitures - des plus modernes aux vieilles Lada qui rappellent l'époque soviétique. Il assiste parfois à des situations ubuesques car chacun tente de parvenir au but, quitte à passer sur le bas côté, pratiquement dans le fossé. Parfois, les croisements avec les quelques voitures qui vont vers le centre de l'Ukraine sont impossibles : "Tout à l'heure, il y avait six voitures de front - sur une nationale à deux voies - et une voiture arrivant de l'autre côté ne pouvait pas passer." Beaucoup de voitures convoyent en fait des femmes, des enfants et des parents au plus près de la frontière polonaise, avant ensuite de faire machine arrière.

Mais toutes les voitures ne font pas le voyage jusqu'au bout. Certaines renoncent et finissent par déposer leurs occupants. "On voit de plus en plus de monde à pied, sur le bas côté, avec les valises, les sac à dos ou les poussettes", décrit Nicolas Teillard. Beaucoup ont aussi des affaires pour passer la nuit dans le froid : des couvertures, des vivres... 

En Roumanie, des trajets gratuits jusqu'à la première gare

Autre frontière, autre encombrement : en Roumanie, les postes-frontières sont saturés avec - là encore - une vingtaine de kilomètres d'attente avant le poste frontière de Siret, dans le nord du pays. Comme à la frontière avec la Pologne, beaucoup d'Ukrainiens choisissent de passer à pied et sont aidés ensuite par des Roumains qui, par solidarité, les emmènent ensuite à la gare de Suceava, à 50 kilomètres de la frontière.

Arrivés là, passeport bleu à la main, les Ukrainiens font la queue pour prendre un billet de train pour Bucarest. Durée du trajet : six heures et demi. "Je me sens en sécurité depuis que j’ai passé la frontière mais je ne me sens pas bien. C’est un sentiment partagé car j’ai laissé ma famille là-bas", raconte Vlad, 22 ans. Sur le quai, il peine à lire son numéro de wagon en alphabet latin. "Ils habitent du côté d’Odessa. Là où ils se trouvent, il n’y a pas eu de combats mais ils sont loin de la ville. C'est dans les grandes villes qu'il y a des problèmes, pas encore dans les alentours."

Vlad est l’un des derniers hommes à avoir traversé la frontière avant l’ordre de mobilisation générale, jeudi. Il dit souhaiter "la paix et le calme pour l’Ukraine". Il s’engouffre dans le wagon pour tenter de reprendre ses études à Bucarest. Peu des réfugiés ukrainiens restent ici. "Pour l’instant, nous n'avons que trois personnes qui restent pour deux ou trois semaines. La majorité partent loin : en Italie, Espagne, Turquie... N’importe où mais pas ici", constate Ainka, une étudiante venue les aider. Face à cet afflux, les autorités craignent un manque rapide de transports et d’hebergements pour les Ukrainiens en exode.

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