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Guerre en Ukraine : l'Unesco se dit "préoccupée" par le patrimoine, en danger face aux bombardements

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Guerre en Ukraine : face aux bombardements, le riche patrimoine du pays est en danger
Guerre en Ukraine : face aux bombardements, le riche patrimoine du pays est en danger Guerre en Ukraine : face aux bombardements, le riche patrimoine du pays est en danger
Article rédigé par franceinfo - Cédric Cousseau
France Télévisions

L'organisation des Nations unies appelle ses Etats membres, dont fait partie la Russie, à respecter le droit international en ne ciblant pas les sites culturels. Au risque de voir disparaître à jamais des pans entiers de l'histoire de l'Ukraine et de l'humanité.

Comme cela a été le cas au cours de précédents conflits, au Mali, en Irak ou en Syrie, la guerre en Ukraine fait craindre la destruction de monuments et de collections inestimables. L’Unesco constate déjà grâce aux remontées du terrain et aux images satellite des destructions et dégradations de plusieurs centres villes historiques et de musées à cause de bombardements, incendies ou dommages collatéraux.

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Dans l'est du pays, Kharkiv compte parmi les villes lourdement touchées. Les frappes russes ont atteint de nombreux édifices, des églises et l’université nationale. Tout comme au sud, à Marioupol, avec le bombardement mercredi du théâtre dramatique. À l'ouest, l’Unesco se dit également inquiète pour Odessa qui se prépare à l’arrivée des Russes. Sur les rives de la Mer Noire, ce joyau est un carrefour culturel avec l’Europe. Là-bas, les musées ont reçu l’ordre de fermer leurs portes et de mettre à l’abri leurs œuvres d’art.

La ville d'Odessa redoute un débarquement des forces russes. (France Télévisions)

"Il y a également Tchernihiv, au nord. Elle fait partie des villes qui auraient pu être inscrites au patrimoine mondial de l'Unesco dans les années à venir, elle semble aujourd'hui avoir été sérieusement endommagée, déplore Lazare Eloundou, directeur du patrimoine mondial de l'Unesco, joint par franceinfo. Voir toutes ces références disparaître, c'est comme nier l'existence de l'Ukraine. C'est une très grande source de préoccupation car ces destructions risquent bientôt d'arriver sur les sites du patrimoine mondial."

Protéger les statues avec les moyens du bord

Des bombardements se rapprochaient effectivement vendredi du centre historique de Lviv classé à l’Unesco. Sa fondation remonte au Moyen-Âge. Ici, les traditions architecturales d’Europe de l’Est ont été influencées par celles de l’Italie et de l’Allemagne. La bibliothèque scientifique nationale conserve la mémoire de la ville avec 8 millions de livres dans ses archives. Un lieu déjà percuté par les balles lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Les habitants de Lviv ont entouré ces derniers jours les statues de la ville. (France Télévisions)

Les habitants ont protégé ces derniers jours leur patrimoine tant bien que mal. Les statues ont été entourées de laine de verre, de mousse et de tissus anti-feu. Les vitraux de la basilique de l’Assomption datant du XIVe siècle ont été recouverts de panneaux. 

"Nous sommes bien conscients que nous ne sommes pas en mesure de les protéger d'un impact direct mais nous essayons autant que possible de les protéger de tout dommage léger, qu'il s'agisse d'un incendie ou d'une onde de choc", témoigne Andreyi Pochekva, restaurateur d’art et mobilisé pour préserver les trésors de la ville.

En tout, 7 sites sont inscrits en Ukraine au patrimoine mondial de l’Unesco. Figure également la Résidence des métropolites de Bucovine et de Dalmatie, un témoignage culturel de l'Église orthodoxe du temps de l'Empire austro-hongrois. Ou la cathédrale Saint-Sophie de Kiev du XIe siècle, prisée notamment pour sa collection de mosaïques et de fresques ou ses bâtiments monastiques. 

"Des villes comme Kiev sont des villes où sont née la religion orthodoxe russe, où l'on retrouve encore aujourd'hui des témoignages de cette histoire, rappelle Lazare Eloundou, directeur du patrimoine mondial de l'Unesco. Les craintes sont énormes."

Marquer les bâtiments pour éviter qu'ils ne soient ciblés

L'Unesco aide à distance les autorités et directeurs de musée avec des conseils techniques et recommandations pour préserver les sites, classés ou non. L'organisation nous affirme que toutes les options sont prises localement pour cacher, évacuer et mettre à l’abri des œuvres. Des opérations qui se déroulent dans le plus grand secret afin de ne pas fournir d'informations aux forces militaires russes.

Autre action actuellement déployée : le marquage des bâtiments avec le "bouclier bleu", un symbole bleu et blanc qui peut être apposé sur des murs, des toits ou des portes. Le but est de signaler les monuments qui ne doivent pas être ciblés puisque protégés en cas de conflit armé par la Convention de la Haye de 1954.

Exemple de "bouclier bleu" apposé dans le centre historique de Lviv (©UNESCO/Alexandre Larcan)

Le texte condamne toute attaque et tout dommage porté au patrimoine culturel, sous toutes ses formes. La Russie l'a ratifié. Elle pourrait donc être tenue responsable de destructions de sites culturels ou historiques devant la Cour pénale internationale si un jour une enquête était menée. Dans certains cas, la dénomination de crime de guerre peut être caractérisée.

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