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Guerre en Ukraine : la livraison d'avions de chasse "est un tabou qui doit sauter", estime le député européen Raphaël Glucksmann

Pour l'eurodéputé Raphaël Glucksmann, "nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour aider la résistance ukrainienne", pour "nous-mêmes, pour notre propre sécurité, pour notre propre stabilité".
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'eurodéputé Raphaël Glucksmann dans une manifestation pour le peuple iranien, en février 2023. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

Ce serait "l'honneur de la France" d'"initier le mouvement" parce que "c'est un tabou qui doit sauter", a affirmé lundi 15 mai sur franceinfo Raphaël Glucksmann, député européen Place publique et président de la commission spéciale sur les ingérences étrangères dans le processus démocratique de l’Union européenne, alors que Volodymyr Zelensky continue de réclamer des avions de combat. Le président de l'Ukraine a rencontré Emmanuel Macron dimanche soir à Paris après être passé par Rome et Berlin.

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Les deux présidents ont annoncé conjointement que la France formerait et équiperait "plusieurs bataillons avec des dizaines de véhicules blindés et de chars légers" dans les prochaines semaines, mais la livraison d'avions de chasse est "prématurée" pour l'Elysée. "Nous prenons du retard et ce retard se paye en vies humaines sur le terrain", a regretté Raphaël Glucksmann. "Nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour aider la résistance ukrainienne", pour "nous-mêmes, pour notre propre sécurité, pour notre propre stabilité", a-t-il expliqué.

franceinfo : La France ne livrera pas pour l'instant d'avions de combat. Vous le regrettez ?

Raphaël Glucksmann : Comme à chaque fois, comme à chaque étape dans les livraisons d'armes, nous prenons du retard et ce retard se paye en vies humaines sur le terrain. Nous avons hésité pendant des mois et des mois avant de livrer des tanks, avant de livrer des missiles. Nous refaisons la même chose sur les avions. C'est dommage parce que depuis le début, notre stratégie devrait être claire. Nous n'interviendrons pas militairement directement sur le front ukrainien. Ce sont les Ukrainiens qui vont mourir et qu'ils vont combattre. Par contre, en dessous de cette ligne rouge, nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour aider la résistance ukrainienne, parce que ce n'est pas simplement pour l'Ukraine que nous le faisons, c'est aussi pour nous-mêmes, pour notre propre sécurité, pour notre propre stabilité. Chaque retard pris se paye en matière de sécurité et en question de vies humaines sur le terrain.

L'Élysée dit que c'est un "peu prématuré". On finira par livrer ces avions ?

On y viendra comme sur toutes les autres questions. Au début, nous avons hésité avant les armes lourdes. On ne voulait livrer que des casques et du matériel médical. Puis finalement, on a accepté de livrer des armes. Et puis, la question des tanks qui est arrivée, la question des missiles longue portée est arrivée et à chaque fois, la même décision a été prise, non pas par altruisme, mais par réalisme parce que nous savons bien, au fond, que ce qui est en jeu en Ukraine, c'est notre propre sécurité, de notre propre stabilité.

"Il n'y a pas d'investissement dans la sécurité meilleure que celui de l'armement que nous transmettons que nous fournissons à la résistance ukrainienne. C'est aujourd'hui notre première ligne de défense."

Raphaël Glucksmann, eurodéputé français.

à franceinfo

Ce n'est pas simplement la solidarité à l'égard d'un peuple qui lutte de manière héroïque pour sa survie et pour nos principes. C'est au fond de l'égoïsme bien intelligent, de l'égoïsme bien senti. Il faut que Vladimir Poutine perde cette guerre, sinon nous ne connaîtrons plus la paix et la stabilité en Europe dans les prochaines années et les prochaines décennies.

Si la France refuse ces livraisons, c'est peut-être pour ne pas démunir sa propre armée ?

Il y a des Mirage 2000 qui ont été vendus aux Émirats arabes unis et qui aujourd'hui ne sont plus utiles, qui ne sont plus utilisés par personne. Il ne s'agit pas simplement de désarmer l'armée française, il s'agit de prendre la décision politique symbolique de livrer des avions. C'est ça qui bloque aujourd'hui. Il serait l'honneur de la France et aussi son intelligence que de prendre les devants y compris par rapport aux États-Unis, et d'initier le mouvement parce que c'est un tabou qui doit sauter comme ont sauté les tabous précédents sur les livraisons de tanks ou sur les livraisons de missiles. C'est plus un geste politique qu'une question de disponibilité de matériel.

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