Guerre en Ukraine : parce qu'il n'y a "pas d'avenir sans passé", des Ukrainiens prennent des cours pour mieux comprendre leur histoire "et pas le récit russe"
La classe a lieu au sous-sol du musée. C'est devenu très banal, alerte aérienne oblige. Une douzaine d’étudiants assistent au cours ce jour-là, essentiellement des femmes, dont Natalya. Cette quinquagénaire est déterminée à se débarrasser d’une vision soviétique de l’histoire. "C’est en Ukraine que nous vivons. Donc c’est l’histoire d’Ukraine qui nous intéresse et non pas le 'récit russe' !"
Iryna, la professeure, raconte que l’intérêt pour son cours a commencé dès 2014. À ce moment-là, dit-elle, beaucoup de gens ont voulu comprendre ce qui s’était passé dans le Donbass, quelle était l’histoire de la Crimée. Puis l’invasion russe en février 2022 a relancé les inscriptions. "Les gens ont eu, à nouveau, beaucoup de questions : 'Qui sommes-nous ? D’où vient-on, nous, les Ukrainiens ?' Ce concept russe de 'fraternité' entre nos deux peuples, 'ça date de quand ? Est-ce qu’on est vraiment frères ?'", détaille-t-elle. "Ce sont vraiment des sujets actuels."
Car les programmes scolaires n’ont pas toujours su fournir de réponses aux Ukrainiens, note Tetiana, l’une des élèves. "J’ai 34 ans, j’ai appris l’histoire à l’école, mais maintenant je comprends que je ne connais pas beaucoup de choses, je suis perdue maintenant. Les Russes disent qu’on a la même culture, qu'on parle la même langue, mais ce n'est pas la même langue, ce n'est pas la fraternité. Ils nous disent que nous sommes des peuples frères mais ce n'est pas vrai".
Les faits historiques "étaient systématiquement tournés en faveur des Russes"
Andryi, qui est anesthésiste, explique que l’enseignement soviétique, à son époque, a toujours "déformé l’histoire". Alors il est grand temps de décortiquer les relations entre Kiev et Moscou, ajoute Lylia. "J’ai enfin compris que notre affrontement avec la Russie remontait à la Rus' de Kiev, au Moyen-âge. Donc ça permet vraiment de mieux saisir les liens de cause à effet entre les évènements", explique la jeune femme de 26 ans avant d'ajouter : "Il n’y a pas d’avenir sans passé." Tetiana abonde : "Sans nos racines, ce n'est pas possible de construire le futur que nous voulons, pas possible d’éviter les erreurs". Un avenir sans liens avec la Russie, voilà ce que souhaitent tous ces étudiants du Musée d’histoire nationale d'Ukraine.
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