: Reportage Guerre en Ukraine : "Sans nous, le pays risque d’être en déclin économique", ces ouvriers ont déménagé leur usine loin des combats
Face aux combats qui continuent dans le Donbass, une usine de fabrication de boulons a fui la ligne de front près de Kramatorsk pour se réinstaller, un peu plus loin, à Dnipro, grand cœur industriel du pays.
"C’était complètement vide ici, on a dû tout aménager dans l’atelier" : Dimitri est le directeur de cette entreprise d'une quinzaine de salariés. Il a dû déménager son usine de fabrication de boulons à 250 km de chez lui, à Dnipro, grand cœur industriel du pays, dans cet entrepôt, dix fois plus petit.
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Il n’avait pas le choix : cela devenait trop dangereux de travailler pour ses salariés à Kramatorsk. "Notre usine a été touchée…On est sur la ligne de front, dès les premiers jours de la guerre. Les fenêtres ont été soufflées par une explosion, certains de nos salariés ont vu leur appartement endommagé. Et maintenant, les combats s’intensifient de plus en plus. On a évacué seulement les machines transportables par camions. Pour les plus grandes, il faut les charger sur des trains, mais les rails sont cassées", souffle le patron.
Si une dizaine de salariés en recherche et développement travaillent à distance depuis Kramatorsk, les ouvriers, comme Michael, n’ont pas vraiment eu le choix. Devant sa machine qui "presse des boulons de support ,diamètre et filetage M16", il se redresse sur sa chaise : il n'a pas perdu ses habitudes de travail, car "tout ça est temporaire", glisse-t-il, montrant une pointe d'inquiétude pour sa famille. "Je suis de Donetsk. Il y a encore ma sœur et mes parents sous les bombes… "
"Non, je ne commence pas une nouvelle vie ici, j’espère que tout ça va vite se terminer."
Michaelà franceinfo
100 tonnes avant la guerre, moins de 30 aujourd'hui
L'Ukraine a perdu depuis fin février environ 30% de ses emplois, ce qui correspond à 4,8 millions de postes rayés de la carte en seulement quelques semaines, selon les chiffres dévoilés par l'Organisation internationale du Travail.
Ici, l'usine continue sa production, tant bien que mal. On y fabrique notamment des boulons très techniques pour la métallurgie, le transport du gaz, les plateformes pétrolières. Bien qu'elle soit une référence dans son domaine, Dimitri ne préfère pas penser au chiffre d’affaires de son entreprise : "Avant la guerre, nous fabriquions environ 100 tonnes de pièces par mois. Maintenant, nous espérons monter notre capacité de production de 30 tonnes."
Andriy, ingénieur, estime pour sa part que c’est sa contribution à la guerre : "On voudrait être à la maison mais sans nous, notre pays risque d’être en déclin économique. Nous sommes venus nous installer ici pour aider par nos compétences… Nous sommes les forces économiques." L’entreprise a suspendu ses contrats avec la Russie et la Biélorussie et tente de percer désormais sur le marché européen.
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