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Guerre en Ukraine : trois questions sur le système Swift, présenté comme l'arme fatale contre la Russie

Swift est un système d'échange d'informations financières administré par une société privée depuis 1973. Le président ukrainien demande que la Russie soit déconnectée de ce système.

Article rédigé par franceinfo
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Une manifestante ukrainienne demande que la Russie soit coupée de Swift, le 24 février 2022 à Berlin (Allemagne). (PAUL ZINKEN / DPA / AFP)

Quelles sanctions après l'invasion de l'Ukraine par la Russie ? Le président ukrainien a demandé, jeudi 24 février, à la communauté internationale d'exclure la Russie du système de messagerie interbancaire Swift, une décision considérée comme l'arme fatale contre l'économie russe. "Nous exigeons d'exclure la Russie de Swift et d'introduire une zone d'exclusion aérienne au-dessus de l'Ukraine", a déclaré Volodymir Zelensky sur Twitter après un entretien téléphonique avec Emmanuel Macron. Son homologue américain, Joe Biden, a estimé que cela restait "une option" pour sanctionner Moscou. Il a toutefois souligné qu'"actuellement cela n'était pas (une) position" partagée par les Européens

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Franceinfo vous explique en quoi consiste ce rouage essentiel de la finance mondiale.

1Qu'est-ce que Swift ?

Swift est l'acronyme de Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication. Cette société coopérative est basée en Belgique, à La Hulpe, près de Bruxelles. Elle a été fondée en 1973 par les principales banques mondiales. Il s'agit d'un intermédiaire dont le principe est simple : remplacer le télex par une messagerie automatisée pour l'écriture et l'envoi des ordres de paiement entre les différentes banques un peu partout sur la planète. Swift ne détient pas et ne transfère pas les fonds, mais permet d'informer les établissements bancaires des échanges qui les concernent. Il connecte aujourd'hui plus de 11 000 institutions*, présentes dans plus de 200 pays. En 2021, elle a transmis en moyenne 42 millions de messages par jour.

2Quelles seraient les conséquences pour la Russie ?

La communauté internationale a déjà empêché un pays d'utiliser Swift. En 2012, la société a expulsé 30 institutions iraniennes, dont sa banque centrale, en accord avec les sanctions prises par l'Union européenne contre la République islamique et son programme nucléaire. Après l'accord sur le nucléaire iranien signé en 2015, Téhéran a été reconnecté au système, puis à nouveau déconnecté quand les Etats-Unis ont pris, sous la houlette de Donald Trump, de nouvelles sanctions, en 2018.

Selon le Carnegie Moscow Center*, l'Iran a perdu presque la moitié de ses revenus pétroliers à l'export et 30% de son commerce extérieur du fait de ces déconnexions. Pour ce centre de réflexion international basé à Moscou, l'impact sur l'économie russe serait "également dévastateur" : "La Russie est lourdement dépendante de Swift à cause de ses milliards d'exportations d'hydrocarbures libellées en dollars."

Les banques russes pourraient se replier sur le système national pour les échanges bancaires dans le pays. Cependant, elles auraient de grandes difficultés à l'international. "L'impact économique serait sérieux et immédiat", abondait en décembre un diplomate américain dans les colonnes du Monde. En 2014, lorsque la menace de cette sanction avait été brandie après l'invasion de la Crimée, le ministre des Finances russe de l'époque avait estimé l'impact d'une telle mesure à 5% du PIB russe.

Les autorités russes minimisent un éventuel impact. "Oui, ce sera plus difficile, c'est évident, mais ce ne serait pas une catastrophe", a assuré l'ancien président Dimitri Medvedev. Auprès du New York Times*, une experte de la Russie, Maria Snegovaya estime que "ce ne sera pas aussi douloureux pour la Russie que les Occidentaux l'imaginent".

3Quel serait le risque pour l'économie mondiale ?

Le hic pour la communauté internationale, c'est que la Russie ne serait pas la seule à souffrir de cette sanction. "L'économie russe, c'est une toute autre histoire. Elle fait le double de toute économie déjà sanctionnée par les Etats-Unis", analyse auprès du New York Times*, Adam Smith, un ancien du ministère de l'Economie sous Barack Obama.

La France, par exemple, a de nombreux intérêts économiques dans le pays. Comme le rappelle la direction nationale du Trésor, la France est le deuxième investisseur étranger en Russie et le premier employeur étranger, avec 160 000 salariés d'entreprises françaises. La Société générale détient Rosbank, l'une des principales banques russes.

Ces derniers jours, la Russie a mis en garde la communauté internationale contre un retour de bâton. "Si la Russie est déconnectée, nous ne recevrons pas de paiement étranger, mais nos acheteurs, les pays européens en premier chef, ne recevraient pas nos biens : pétrole, gaz, métaux et d'autres produits d'imports", a prévenu dans un entretien à l'agence TASS* le sénateur Nikolay Zhuravlev. Cela pourrait se traduire par une augmentation des prix de l'énergie en Europe.

* Tous les liens suivis d'un astérisque sont en anglais.

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