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Plainte pour "complicité de crimes de guerre" contre TotalEnergies : l'avocat des plaignants dénonce "la mécanique de déni" du groupe pétrolier

Les ONG Darwin Climax Coalitions et Razom We Stand affirment que TotalEnergies a permis à la Russie de fabriquer du carburant pour les avions russes engagés dans la guerre en Ukraine. Des accusations démenties par la société à franceinfo.

Article rédigé par franceinfo
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Le siège de TotalEnergies à La Défense (Hauts-de-Seine), en mars 2022. (VINCENT ISORE / MAXPPP)

William Bourdon, avocat de Darwin Climax Coalitions et de Razom We Stand, les deux ONG qui ont porté plainte contre TotalEnergies pour "complicité de crimes de guerre" en Ukraine dénonce vendredi 14 octobre sur franceinfo la "mécanique de déni" du groupe pétrolier français. Selon lui, "plus le crime est grave, plus l'enjeu 'réputationnel' est sévère et plus se met en route, de façon universelle, une mécanique de déni qui tend à discréditer l'action des ONG qui portent la procédure".

TotalEnergies "n'ignorait pas la destination finale du produit"

Dans un communiqué envoyé à franceinfo vendredi, TotalEnergies dénonce des accusations "outrancières et diffamatoires". Fin août, le groupe avait déjà démenti les accusations du journal Le Monde qui avait révélé qu'une entreprise, Terneftegaz, codétenue à 49% par TotalEnergies et à 51% par le russe Novatek fabriquait du carburant destiné à alimenter des avions de guerre russes engagés dans le conflit en Ukraine. Une participation que TotalEnergies a cédée depuis à Novatek. TotalEnergies explique par ailleurs que les condensats produits par Terneftegaz avaient été "exportés à l'étranger" et n'avaient donc pas pu être utilisés par l'armée russe comme carburant pour ses avions.

"Pour asseoir des accusations de complicité, il faut démontrer deux choses", répond William Bourdon. "Premièrement que l'entreprise visée a fourni les moyens de commettre l'infraction", poursuit-il estimant, sur ce premier point, que "quand on est une entreprise comme TotalEnergies et qu'on exploite un champ gazier aussi important", il est "évident", que "par définition on fournit les moyens pour que cette exploitation se fasse et perdure". La deuxième chose, ajoute l'avocat, c'est qu'il "n'est plus nécessaire, pour prouver qu'un acteur privé est complice, de démontrer qu'il partageait le dessein de commettre des crimes de guerre". "Il suffit de démontrer qu'elle ne pouvait pas l'ignorer", précise-t-il, convaincu que "personne ne peut douter un seul instant que Total n'ignorait pas la destination finale de ce produit pétrolier".

L'"immense embarras" du groupe pétrolier

"Les sources documentaires enseignent bien que ce produit pétrolier en passant par la raffinerie d'Omsk [en Sibérie] a servi à alimenter les réservoirs des avions russes", assure William Bourdon. "Et pourquoi TotalEnergies s'est débarrassé de sa participation à Terneftegaz 48 heures après les révélations du journal Le Monde ?", s'interroge-t-il. L'avocat y voit surtout "le signe d'un immense embarras". Il reproche à Total d'avoir continué d'exploiter ce gisement "alors que les sanctions internationales se multipliaient, alors que les crimes de guerre de la Russie étaient en temps réel documentés et établis".

"Nous considérons que tout cela justifie l'ouverture d'une enquête", résume l'avocat des deux ONG. Leur plainte, dit-il, a été déposée "avec la conviction qu'une enquête sera ordonnée, avec l'ambition que soit établie la responsabilité, et dans la perspective que les personnes qui seraient mises en cause rendent compte, un jour, des infractions dénoncées".

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