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Témoignage Journaliste français tué en Ukraine : "Les éclats ont transpercé le pare-brise blindé", affirme le gouverneur de la région de Louhansk

Frédéric Leclerc-Imhoff, 32 ans, est mort alors qu'il accompagnait des civils à bord d'un bus humanitaire près de Sievierodonetsk, dans l'est du pays. Serhiy Gaidai, le gouverneur de Louhansk, a précisé les circonstances du drame.

Article rédigé par franceinfo - Thibault Lefèvre - Alexandre Abergel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une photo non-datée du journaliste de BFMTV Frédéric Leclerc-Imhoff, tué en Ukraine, le 30 mai 2022.  (HANDOUT / AFP)

Il est environ 14h, lundi 30 mai, quand un bus blindé part de Kramatorsk, escorté par des voitures de police. L'objectif est clair : aller chercher dix civils, des personnes âgées, bloqués à Lysichansk, 80 kilomètres plus loin, au cœur de la guerre du Donbass. 

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Frédéric Leclerc-Imhoff, journaliste de BFMTV, est en reportage : il filme quelques images à l’avant du véhicule quand un obus explose devant le convoi. 

"C’était un obus de gros calibre, de 152 mm, dont les éclats ont transpercé le pare-brise blindé, précise à franceinfo Serhiy Gaidai, le gouverneur de la région de Louhansk, occupée dans sa quasi-totalité par les Russes, qui a annoncé la mort de notre confrère lundi après-midi. Les journalistes portaient des casques et des gilets pare-balle mais l’éclat lui a touché le cou. Il ne pouvait pas s’en sortir. C’est la première fois que ça se produit. Des journalistes ont déjà accompagnés nos patrouilles de police."

Il a été tué par "un bombardement russe", précise la ministre des Affaires étrangères française, Catherine Colonna, qui condamne un "double crime qui vise un convoi humanitaire et un journaliste".  

Depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie fin février, au moins huit journalistes sont morts sur le terrain dans l'exercice de leur profession, selon un décompte de RSF (Reporters sans frontières). Il s'agit du deuxième journaliste français mort en Ukraine, plus de deux mois après la disparition du Franco-Irlandais Pierre Zakrzewski.

Journaliste français tué en Ukraine : le témoignage du gouverneur de la région de Louhansk au micro de Thibault Lefèvre et Alexandre Abergel

"Il a héroïquement raconté ce qu'il se passe en Ukraine"

Le gouverneur fait état d'une aggravation de la situation dans cette zone de guerre, pilonnée par les Russes depuis quelques jours. Les témoins parlent de bombardements permanents, sans discernement, notamment sur la route principale de Lysychansk et Sieverodonetsk, mais aussi les itinéraires parallèles. La guerre dans le Donbass est une guerre d’artillerie "à l’ancienne", où l’objectif est de faire reculer l’ennemi par la force et par le feu. Conséquence directe : les principales victimes sont les militaires, bien sûr, mais aussi les civils, les humanitaires et les journalistes. 

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"C’est très douloureux pour moi. Vous savez, quand on aura gagné contre les hordes de Poutine, je voudrais aller chez les parents de ce journaliste et les remercier : leur fils a héroïquement raconté ce qu’il se passe en Ukraine. C’est un travail risqué mais très important pour montrer la réalité et contrer la propagande russe", confie avec émotion Serhiy Gaidai.

Des médias russes qui se sont aussi emparés de l’affaire : lundi, l'un des officiers des alliés séparatistes du Kremlin a affirmé à l’agence Tass que Frédéric Leclerc-Imhoff n’était pas un journaliste, mais un mercenaire étranger et qu’il aurait livré des armes et des munitions à l’armée ukrainienne. 

Le parquet national antiterroriste a annoncé lundi soir l'ouverture d'une enquête confiée à l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité, les génocides et les crimes de guerre. Cette enquête porte  également sur "les blessures subies par son confrère Maxime Brandstaetter", présent avec lui lors du reportage, a précisé le parquet. 

Le corps de Frédéric Leclerc-Imhoff a été évacué sur la ville de Dnipro, au centre de l’Ukraine. C'est la deuxième fois qu'il se rendait en Ukraine pour couvrir la guerre : il y était depuis le 16 mai dernier, "à sa demande", précise Marc-Olivier Fogiel, le directeur de BFMTV.  Frédéric Leclerc-Imhoff avait 32 ans et est mort en faisant son métier de journaliste.

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