"Un cinéma qui n’est pas sous terre, c’est dangereux" : quand les spectateurs viennent dans un cinéma souterrain de Kiev pour fuir la réalité de la guerre
Le KINO42 à Kiev est un cinéma mais aussi un abri anti-bombe. Une configuration unique dans la capitale ukrainienne qui attire de nombreux spectateurs.
Pour accéder à l'unique salle de projection, il faut descendre un escalier très raide, puis acheter son ticket une dizaine de mètres plus bas. Alors que les Russes peuvent frapper n'importe où et n'importe quand, le KINO42, avec ses 42 sièges, offre aux cinéphiles un abri anti-aérien.
"Se sentir en sécurité"
Le KINO42, dans le centre de Kiev, figure parmi la vingtaine de cinémas à avoir rouvert ses portes au cours des dernières semaines sur la cinquantaine que compte la capitale ukrainienne. Lisa et son compagnon Artem sont venus assister à la séance de 19 heures. Lisa se sent protéger. Et pour cause, ce cinéma est souterrain. "C’est un vrai avantage de se sentir en sécurité ici", dit-elle avant de se remémorer sa nuit dernière : "C’est toujours dangereux à Kiev. Cette nuit, je me suis levée à 2h du matin à cause d’une alerte aérienne. Je ne me sens pas à en sécurité". "Des missiles sont déjà tombés sur des centres commerciaux. Un cinéma qui n’est pas sous terre, c’est plus dangereux. C’est pour ça que je viens là", précise Artem.
Comme les deux amoureux, et la quinzaine de spectateurs présents dans la salle, ils sont des centaines tous les mois à venir voir des films dans l'un des derniers cinémas indépendants de Kiev. Du jamais vu pour ce petit cinéma de quartier, qui depuis le début de la guerre, bat des records de fréquentation.
"C'est bien mieux qu'avant la guerre"
Ilko Gladshtein, le gérant de l’établissement, a le sourire. Ouvert en 2019, ce cinéma souterrain est devenu un refuge. Être à dix mètres sous terre lui offre "un argument commercial unique" : les films ne sont pas arrêtés quand les sirènes retentissent, ce qui garantit au gérant de ne pas "perdre de spectateurs". Au final, "c'est bien mieux qu'avant la guerre", lâche-t-il.
"Normalement, tous les commerces doivent s’arrêter quand il y a une alerte aérienne. Et ça arrive parfois trois ou quatre fois par jour. Dans les autres cinémas, quand ça se passe, les gens attendent 20 minutes et ensuite la projection doit s’arrêter"
Ilko Gladshtein, gérant du KINO42franceinfo
La programmation exigeante attire aussi une audience plutôt jeune et branchée. Ici, pas de blockbusters américains, la priorité est donnée au cinéma ukrainien. Les productions russes sont, elles, prohibées. Selon Ilko Gladshtein, elles "déshumanisent" les Ukrainiens et sont trop orientées.
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