"Un incident toucherait un milliard d'êtres humains" : à Zaporijjia, les combats autour de la centrale nucléaire continuent et l'inquiétude demeure
En Ukraine, le directeur général de l’AIEA, le gendarme international du nucléaire, doit se rendre dans les prochains jours dans la centrale de Zaporijjia. C'est sa deuxième visite depuis que la plus grande centrale d’Europe est aux mains des russes. Depuis, la situation ne s'est pas améliorée, bien au contraire. À six reprises, la centrale s'est retrouvée déconnectée du réseau électrique. L’AIEA tente de son côté, depuis des mois et en vain, de réclamer une zone de sécurité pour protéger la centrale.
Hryhoriy Plachkov est un des plus grands experts ukrainiens du nucléaire, il est extrêmement inquiet. Il n'est pourtant pas de nature alarmiste, il "ne pense pas que la Russie utilisera son arsenal nucléaire", cette hypothèse, il la balaie d'un revers de la main, selon lui "la Russie en serait victime aussi". Ce qui lui noue l'estomac, c'est la centrale de Zaporijjia. De cette situation, il préfère en rire, "nous vivons avec la menace d'une catastrophe nucléaire depuis un an, mais nous sommes toujours vivants. Tout va bien !". "Je plaisante bien sûr", reprend sérieusement Hryhoriy Plachkov, "il n'y a tout simplement jamais rien eu de tel dans l'histoire des conflits humains, dans l'histoire de l'humanité."
"Un incident à la centrale toucherait, selon les calculs des scientifiques, un milliard d’êtres humains, dans 40 pays."
Hryhoriy Plachkov, expert ukrainien du nucléaireà franceinfo
Mais selon lui, le pire est à venir. La sécurité de la centrale dépend de Kakhovka, une gigantesque réserve d’eau douce, située plus au sud et occupée par l’armée russe. Il s'inquiète du niveau du réservoir : "c'est très dangereux, le niveau d’eau du réservoir est tombé très bas. Et l’eau est nécessaire pour refroidir les cœurs des réacteurs. Pour l’instant, ça va tout juste. Mais d’ici l’été, cela deviendra un vrai problème." Un autre risque plane sur la centrale, celui que courent les employés sur place. Sur les 11 000, près de la moitié ont fui l’occupation russe. Hryjoriy Plachkov échange discrètement avec ceux qui restent à la centrale : "Imaginez l’état psychologique des employés. Leur ville est envahie, ils y ont leur famille, leurs enfants. Les bombes tombent à côté de la centrale. C'est très difficile en ce moment."
Hryjoriy Plachkov est persuadé que si l’AIEA n’a pas réussi pour l’heure de miracle, elle contribue à limiter les dégâts. Il partage cependant l'avis du patron de l’AIEA, tant que la centrale ne sera pas hors de la zone de combat et réparée, l’accident nucléaire menace.
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