Accueil des réfugiés en France : Amnesty International critique un "décalage malheureux entre le discours et les actes"
Jean-François Dubost, de l'ONG Amnesty International, estime, mercredi sur franceinfo, que la France ne respecte pas ses promesses concernant l'accueil des réfugiés.
Dans son rapport annuel présenté mercredi 22 février, Amnesty international dresse un tableau sombre de l'évolution des droits de l'Homme en France. L'un des points évoqué concerne l'accueil des réfugiés. Selon l'ONG, la France n’a pas respecté ses engagements.
Jean-François Dubost, responsable du programme protection des populations à Amnesty International, a souligné ce mercredi sur franceinfo le "décalage malheureux entre le discours et les actes. La France a promis que d’ici fin 2017, au moins 10 000 personnes seraient accueillies de zones de conflits, qui ont fui les persécutions et été victimes de tortures. Nous sommes à peine à 2 200 personnes accueillies."
franceinfo : Y a- t-il un décalage entre le discours des autorités françaises et les actes en matière d’accueil des réfugiés ?
Jean-François Dubost : Oui, il y a un décalage malheureux entre le discours et les actes. Les discours posent les principes et rappellent qu’il y a une obligation pour les États d’accueillir, que la France a une longue tradition d’accueil et de protection de personnes qui fuient les persécutions et le terrorisme. En même temps, on est dans une sorte de timidité. Même au niveau européen, la France ne s’est pas illustrée par des discours forts ou par des actes significatifs pour dire "non". On ne peut pas négocier avec la Turquie parce qu’on veut y renvoyer des réfugiés. Elle ne s’oppose pas non plus à des discussions pour négocier avec la Libye, où des migrants et des réfugiés sont maltraités, torturés, détenus.
On n’entend pas cette voix forte de la France dans l’Union européenne.
Jean-François Dubost, d'Amnesty internationalà franceinfo
La France n'en fait pas assez selon vous ?
La France a promis que d’ici fin 2017, au moins 10 000 personnes seraient accueillies depuis des zones de conflits, qui ont fui les persécutions et été victimes de tortures. Aujourd'hui, nous sommes à peine à 2 200 personnes accueillies. On n’atteindra probablement pas les 10 000 personnes, nombre déjà très faible pour la France. Le Liban est un pays beaucoup plus petit que la France, avec une économie beaucoup plus faible. Il accueille un million de personnes. Par ailleurs, la France a certes augmenté le nombre de places d’hébergement pour éviter à ces migrants et réfugiés de dormir à la rue, mais ils sont encore trop nombreux à se retrouver littéralement sans abri, notamment à Paris. Il y a donc des efforts à faire et si ces efforts ne sont pas faits, la force des propos que pourraient tenir la France, aux niveaux international et européen, est beaucoup plus faible.
Les citoyens n'influencent-ils pas aussi les responsables politiques ?
La politique se dit influencée par l’opinion publique. Mais nous, qui sommes sur le terrain, nous nous rendons compte que le schéma est complètement différent. Au niveau local, il y a d’incroyables énergies d’accueil des réfugiés. Des mobilisations transcendent les partis politiques, les opinions religieuses ou autres. Certaines personnes se mobilisent par empathie parce qu’elles sont face à des hommes qui ont fui l’horreur et la terreur. Elles voient chez ces réfugiés non pas des menaces, mais des personnes comme elles, qui ont besoin d’un accueil et d’un accompagnement. Les responsables politiques jouent sur des supposés peurs. Mais la situation est différente sur le terrain. D'ailleurs, les autorités reconnaissent discrètement qu’il y aurait bien plus de capacité d’accueil au niveau local que le nombre réfugiés sur laquelle la France s’est engagée à accueillir.
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