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Crise migratoire : "Ce n'est pas vraiment le moment des polémiques, il y a urgence en Méditerranée", interpelle SOS Méditerranée

Des tensions sont apparues ces derniers jours entre la France et l'Italie au sujet de la gestion des flux migratoires notamment après les critiques de Gérald Darmanin sur la politique migratoire de la Première ministre italienne Giorgia Meloni.
Article rédigé par franceinfo
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Des migrants se préparent à débarquer de l'Ocean Viking à Toulon le 11 novembre 2022, après avoir été secourus par l'organisation humanitaire maritime européenne "SOS Méditerranée". Photo d'illustration. (VINCENZO CIRCOSTA / AFP)

"Ce n'est pas vraiment le moment des polémiques, il y a vraiment urgence en Méditerranée", interpelle vendredi 5 mai sur franceinfo Sophie Beau, directrice générale et co-fondatrice de SOS Méditerranée alors que de fortes tensions sont apparues entre la France et l'Italie au sujet des migrants. Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, a critiqué la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, "incapable", selon lui, "de régler les problèmes migratoires" dans son pays alors que la France fait face à un afflux de migrants qui tentent de traverser les Alpes. Sophie Beau dénonce le manque de "moyens de sauvetage" alors que "la situation reste absolument critique en Libye et plus récemment en Tunisie", a-t-elle expliqué.

franceinfo : Que pensez-vous de cette brouille entre la France et l'Italie ?

Sophie Beau : Ce n'est pas vraiment le moment des polémiques. C'est plutôt le moment de la prise de responsabilité politique parce qu'il y a vraiment urgence en Méditerranée. L'Organisation internationale pour les migrations a publié un extrêmement triste bilan très récemment, faisant état que le premier trimestre de cette année 2023 est le plus meurtrier en Méditerranée centrale depuis 2017.

"L'axe de Méditerranée centrale reste l'axe migratoire le plus meurtrier au monde. Ces chiffres parlent d'eux-mêmes. Il y a besoin d'agir, il n'y a pas besoin de parler."

Sophie Beau, directrice générale de SOS Méditerranée

à franceinfo

Vous poursuivez les opérations de sauvetage en ce moment ?

On poursuit nos opérations de sauvetage en Méditerranée. Il y a beaucoup de traversées. La situation reste absolument critique en Libye et plus récemment en Tunisie. La situation s'est dégradée aussi pour les migrants subsahariens. Il y a beaucoup de départs et donc beaucoup d'arrivées effectivement en Italie, mais aussi beaucoup de naufrages avec toujours ce même problème : il n'y a pas suffisamment de moyens de sauvetage, aucun moyen de sauvetage d'État et un contexte extrêmement difficile pour les navires humanitaires aujourd'hui.

MSF dénonce un environnement de plus en plus hostile pour les ONG qui organisent le sauvetage en mer. C'est un constat que vous faites ?

Les attaques sur les navires humanitaires qui portent secours aux personnes dont la vie est menacée en mer se poursuivent. Le gouvernement de Giorgia Meloni avait désigné les ONG comme boucs émissaires de leur politique au mois d'octobre dernier. Une pratique maintenant consiste à désigner des ports de débarquement pour les rescapés dans les ports les plus lointains de la Méditerranée centrale, ce qui éloigne nos navires de sauvetage pour des journées entières de la zone de détresse.

"Il y a toujours des attaques qui se poursuivent, du harcèlement administratif et judiciaire sur les navires. Le contexte est vraiment très compliqué."

Sophie Beau, directrice générale de SOS Méditerranée

à franceinfo

On est très peu nombreux à opérer en mer. Il manque cruellement des moyens de sauvetage et on a assisté à tous ces naufrages, plusieurs centaines de morts sur les deux dernières semaines du mois d'avril.

Qu'attendez-vous de l'Union européenne ?

On a besoin d'une flotte véritablement de sauvetage en mer Méditerranée centrale parce qu'il y a des milliers de morts. C'est vraiment ce qui se profile cette année encore. L'urgence humanitaire avec la météo qui s'améliore avec l'arrivée du printemps de l'été, repart de plus belle. Il faut reconsidérer la politique de soutien aux garde-côtes libyens, puisque depuis 2018, ils sont censés coordonner les recherches et le sauvetage dans une immense zone de détresse de Méditerranée centrale. Ils ne le font pas, ils sont absolument défaillants. Et pourtant, l'Union européenne continue à soutenir ces garde-côtes aussi bien en envoyant des millions d'euros aux autorités en Libye.

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