"La vie ici est un peu difficile" : après avoir tout risqué pour gagner l'Europe, les migrants installés à Malte solidaires des nouveaux venus
Sur les 223 migrants arrivés à mercredi à Malte à bord du "Lifeline", quelques dizaines peuvent espérer être accueillis en France. Quartier de Marca, d'autres, qui vivent aujourd'hui à Malte, sont venus par solidarité accueillir les nouveaux arrivants.
L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) a commencé son recensement parmi les 233 migrants arrivés le 28 juin à Malte sur le bateau allemand, le Lifeline. Une fois ce travail achevé, plusieurs dizaines d'entre eux rejoindront la France. En attendant, c’est dans un centre d’accueil de Malte que se déroulent les opérations, quartier de Marca, devenu le quartier des migrants sur l'île.
On connaissait de La Valette ces petites rues, ces petits restaurants, ces spots à touristes et ces taxis aux fauteuils de cuir et aux tarifs approximatifs. Mais il existe aussi le quartier de Marca, tout au bout du port avec ses bateaux rouillés. Ici, pas de magasins de luxe, pas de carte bilingue ou trilingue sur les menus des restaurants, mais pourtant on y parle beaucoup de langues. C’est là en effet que vivent tous les migrants. Ceux enfermés dans le centre d’accueil et à qui il est impossible de parler, et ceux qui sont dehors, Soudanais, Burkinabés, Libyens, Ivoiriens, et qui sont venus par solidarité accueillir les nouveaux arrivants, juste pour un petit regard, un petit mot.
Joseph vient du Soudan. Il connaît le parcours par cœur, la traversée du désert, l’attente en Libye, la mort de certains de ses amis, la traversée en mer et puis la vie ici, à Malte, où l’accueil n’est pas toujours à la hauteur. "La vie ici est un peu difficile", dit-il pudiquement. Difficile mais il est là, vivant. Là pour accueillir les nouveaux venus.
Joseph n'est pas seul. "Nous avons commencé hier les entretiens avec ces passagers", explique en effet Pascal Brice, le directeur de l’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. La France s’est engagée à accueillir sur son sol quelques dizaines de migrants. Les critères retenus sont ceux du droit d’asile, de la sécurité des personnes, et les choix ne sont pas faciles à faire car les histoires se ressemblent. Celles des 233 migrants qui sont passés là, avec le Lifeline, raisonnent avec un goût de déjà entendu. "Ce sont des périls qu’hélas nous connaissons bien à l’Ofpra, puisque ce sont ceux de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants, qui ont fui l’Afrique, qui ont traversé la Libye, la Méditerranée, dans des conditions souvent terribles", explique Pascal Brice. "Notre travail est d’être là pour prendre en compte leur besoin de protection", poursuit le directeur de l’Ofpra.
Les migrants qui resteront à Malte peuvent être rassurés, ils seront en partie protégés. Protégés de la mort mais pas forcément du quotidien. Yaya Assau est arrivé depuis plusieurs années à Malte. Il est assis sur un petit muret dans ce quartier de Marca. Impossible de lui donner un âge. Il explique que les arrivées de migrants se font plus rares et quand on lui demande où est sa maison, il préfère expliquer là où il dort, "à côté de l’aéroport, là-bas", dit-il. Il raconte avoir retrouvé à Malte des amis qui venaient de Côte d’Ivoire et dont certains sont passés en Italie ou en France.
Mais les amis finalement il n’en reste pas tant que cela dans ce quartier de Marca, où l’Afrique semble se donner rendez-vous lorsque la chance est du bon côté. Quand on le quitte, il faut le faire à pied, parce que les taxis n’y viennent pas. Et on sait que même s’ils sont en sécurité, les 233 migrants du Lifeline n’en ont pas fini avec leur fuite pour découvrir un monde meilleur.
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